Il y a encore deux ans on craignait la pénurie sur le secteur du ciment. Aujourd'hui c'est la surabondance qu'on redoute. Avec une capacité de production totale estimée à 18 millions de tonnes à fin 2010 et une demande de 15,1 millions de tonnes, le secteur il est recommandé de garder l'oeil sur le tableau de bord pour éviter le piège de la surproduction. Surtout que historiquement, les analystes et les professionnelles constatent que le secteur est têtu". Bien que la consommation nationale en ciment soit passée de 6 millions de tonnes en 1995 à 14,5 millions en 2009, elle n'a augmenté que de 0,5 million par rapport à 2008. Pour l'année 2010, l'ACP (Association professionnelle des cimentiers) table sur un fléchissement par rapport à 2009, voire une évolution à l'identique avec une enveloppe de 135 milliards de DH, allouée par l'Etat en 2009 aux investissements publics, portée à 160 milliards de dirhams en 2010. Tributaire des chantiers lancés principalement par le ministère de l'Habitat, l'impact de la relance de l'habitat social ne sera ressenti qu'à partir du 2e semestre 2011. Par ailleurs, «avec l'accélération de l'urbanisation et l'accroissement démographique, le besoin estimé pour les années à venir est de 90.000 unités par an. Or, si l'on cumule cette donnée au déficit global actuel et en prenant en compte une capacité de production de 130.000 logements par an prévue par le ministère de l'Habitat, le déficit ne se résorberait qu'en 2035», indique la note sectorielle d'Attijari Intermédiation. Plusieurs investissements portant sur l'augmentation de la capacité industrielle ont été réalisés par Holcim et Asment Temara. Avec une extension de sa cimenterie de Fès, qui permettra le doublement de sa capacité de 0,6 Mt à 1,2 Mt pour Holcim et la construction d'une nouvelle cimenterie, dotée d'une capacité de 0,75 Mt, par Asment Temara dans la ville de Meknès. Reconfiguration du paysage industriel cimentier Par ailleurs, l'oligopole, caractéristique fondamentale du paysage «cimentier» marocain, prendra fin au courant de cette année avec l'implantation de nouveaux producteurs, notamment Ciments de l'Atlas, Ynna Asment et l'espagnol Lubasa, qui devrait se traduire par une surcapacité de production de 10 à 15% entre 2010 et 2015. Avec la création de deux unités de production par Ciments de l'Atlas, une à Ben Ahmed, dans la région centre et la seconde à Béni Mellal, sur l'Oriental, d'une capacité de 1,6 Mt chacune. Quant à Ynna Asment, filiale de Ynna Holding du groupe Chaabi, elle installera son unique cimenterie d'une capacité de 1 Mt sur la région de Settat au centre, avec la possibilité de la doubler à court terme. D'autant plus que le démantèlement douanier en 2012, dans le cadre des accords de libre-échange signés par le Maroc, impliquera une meilleure compétitivité. Verra-t-on les prix à la baisse ? Pas si sûr. Depuis une décennie, l'évolution des prix ne dépend plus du jeu de l'offre et de la demande, subissant entre autres les fluctuations des matières premières sur le marché international. Sur le plan régional, la configuration de la demande en ciment a sensiblement changé. Ainsi pour une consommation de 470 kg par habitant, c'est la région du grand Casablanca qui garde la première place avec 15% de la consommation nationale en ciment. Tanger-Tétouan passe de la quatrième à la seconde place avec 12,8%, alors que Marrakech-Tensift-El Haouz passe de la sixième à la troisième place en atteignant 10,8%. Ces trois régions représentent à elles seules plus du tiers de la consommation nationale en ciment et près de 71% si l'on prend en compte Souss-Massa-Darâa (8,7%), l'Oriental (8,7%), Rabat-Salé-Zemmour-Zaër (7,7%) et Doukkala-Abda (7,4%). Ces changements reflètent principalement l'impact de la politique de développement régional adoptée par le Maroc. Mais ils sont aussi le résultat des projets structurants tels Tanger-Med et les équipements touristiques.