Il fait froid dehors en ce début de soirée. Pourtant, nous sommes en plein mois de mai et le soleil a brillé à pleins feux toute la journée, illuminant la capitale de ses rayons bienfaisants. Mais ce n'est pas la brise printanière qui me donne la chair de poule ce soir. Dans l'obscurité de cette salle de théâtre noire de monde, c'est l'impression d'assister à l'un de ces rares moments dans une vie où l'on sent que l'on vit quelque chose de magique... qui donne des frissons.... A Moi et aux centaines de spectateurs qui ont répondu présents, en ce 20 mai 2009, à l'invitation d'un virtuose venu de l'autre côté de l'Atlantique, Al Di Meola. De Miami au Rabat Pourquoi autant d'émotion? Pourtant, le compositeur et guitariste italo-américain n'en est pas à sa première visite au Maroc, ni dans ce grand théâtre national d'ailleurs. Un an plus tôt, l'artiste se produisait sur ces mêmes planches devant presque autant de monde à l'occasion du festival Mawâzine et musiques du monde. Une première visite de ce côté-ci de l'océan, qui l'aura fait succomber aux charmes de la ville... et du pays tout entier. Après quoi, il reviendra une seconde, une troisième voire même une quatrième fois dans ce pays qui constitue désormais une source d'inspiration pour ses créations. Pourtant, l'artiste le disait, le lieu le plus propice à son inspiration était «sa maison sur la plage de Miami» où il aime s'isoler. Mais ça, c'était avant. D'où ces frissons dans le dos, et ce sentiment de vivre quelque chose d'unique. Mieux encore, pour sa seconde prestation à Rabat, Al Di Meola a choisi de composer en duo. L'artiste propose ainsi d'offrir une création exceptionnelle à son public de mélomanes dans un concert en duo avec un grand luthiste marocain, Said Chraïbi. Une rencontre certes musicale, mais avant tout humaine. Ce soir là, après une quinzaine de jours de recherches et de répétitions à deux, alors que Meola présente ses musiciens, après les acclamations du public, «Al Di aux mains d'argent» se présente à l'assemblée comme «Moroccan». Nul besoin d'en rajouter. On comprendra dès lors que quelque chose de grand est né de cette rencontre entre deux seigneurs de la musique... entre Meola et Chraibi.... Meola et le Maroc.Ce qui suivra ensuite restera gravé dans les mémoires des spectateurs pour longtemps. Un pur moment de création, une dégustation musicale au goût de la découverte et aux saveurs artistiques mêlant orient, jazz et création contemporaine. Bref, un moment unique qu'on espère voir se reproduire encore et encore dans l'enceinte de cette salle tapissée de rouge du théâtre Mohammed V. Morocco Fantasia C'est du moins ce que l'on aurait pu croire jusqu'à ce que l'artiste surdoué n'annonce récemment la sortie en janvier 2012 (le 24 du mois) du «Morocco Fantasia». Un DVD et Blu-ray de ce concert inédit tourné le 20 mai 2009 au théâtre Mohammed V de Rabat. Al Di Meola et Peo Alfonsi à la guitare, Fausto Beccalossie à l'accordéon, Gumbo Ortiz aux percussions, Victor Miranda à la basse, Peter Kaszás à la batterie, accompagnent, pendant plus d'une heure de concert, les sonorités arabo-andalouses du luth de Said Chraibi, du violon et des percussions d'Abdellah Meri et de Tari Ben Ali, dans une composition originale conjointement créée par les deux maestros enfermés dans un des hôtels de la capitale. Et ce n'est pas tout. Le DVD comprend justement des extraits exceptionnels de ces heures de répétitions entre Al Di Meola et Said Chraibi. Des images du duo se préparant sur scène à quelques heures de la grande première, ainsi qu'une vidéo inédite de la visite du compositeur latino-américain au Maroc, y sont également prévu. L'occasion donc de redécouvrir les bazars et les ruelles de l'ancienne médina de la capitale en compagnie d'Al Di Meola. * Une nouvelle source d'inspiration «Je n'avais jamais prévu cet accueil», déclarait-il aux médias en sortant de scène en mai 2008, pour sa première fois au Maroc. Ce virtuose et compositeur de talent, au parcours exceptionnel, aura donc été touché par la sensibilité du public marocain mais également par la musique qu'il y découvrira : «j'adore le Maroc pour la richesse de ses rythmes», lisait-on dans les colonnes des médias nationaux qui l'avait rencontré à l'époque. Aujourd'hui, après plus de 25 ans de carrière, Al Di Meola, le Marocain, se ressource dans les couleurs d'une création musicale nouvelle, aux rythmes plus orientaux. Ceux qui le connaissent le savent bien, ce militant de la création musicale, s'est toujours inspiré des autres cultures. Bien qu'étant étiqueté par certains critiques de «musicien de Jazz», Meola refuse de se cantonner à un seul style quand la musique lui offre la possibilité de créer à l'infini. Pour lui, la création est comme «ouvrir un robinet... je laisse l'inspiration couler et c'est pour cette raison que mes morceaux sont si longs». Né en 1954 à New Jersey City, ce latino-américain aux grosses lunettes commence très tôt sa carrière musicale. A l'âge de 19 ans déjà, il tourne avec le groupe Return to forever, à l'époque le premier groupe de fusion des années 70. Rapidement, Al Di Meola développe son jeu, sa technique et ses compositions pour se lancer en 1976 dans une carrière solo. C'est là que tout s'enchaîne. Depuis, de «Land of the Midnight Sun» (1976) à «Pursuit of Radical Rhapsody» (2011) en passant par «Electric Rendez-vous», «Orange and Blue» ou encore «Consequence of Chaos» l'artiste a enregistré une trentaine d'albums aux succès internationaux, faisant de lui une véritable icône de la scène jazz, mais surtout de la musique internationale.