Poursuivre l'expansion économique du Maroc sur le continent, appuyer la candidature du royaume à la CEDEAO, mais aussi favoriser le développement des PME sur le continent, tout en incitant les grands groupes africains à se lancer enfin sur le marché marocain. Tels sont les grands axes des deux binômes en lice pour la présidence de la CGEM. Décryptage. Quel est le programme africain des deux tickets en lice pour la présidence du patronat marocain? Tant chez le binôme Mezouar-Mekouar que Marrakchi-Benhida, le renforcement des relations économiques avec le continent figure en bonne place. Globalement, tous entendent poursuivre la dynamique enclenchée lors du mandat de la présidence sortante. La nouveauté, clairement exprimée, porte sur la nécessité de passer au co-investissement. Autrement dit, ce n'est plus au Maroc uniquement d'aller investir sur le continent. Les grands groupes africains devraient désormais être incités à venir tenter leur chance dans le royaume. «L'idée est aussi d'élargir le co-investissement dans les deux sens: du Maroc vers l'Afrique subsaharienne et, inversement, de l'Afrique subsaharienne vers le Maroc», répète le colistier de Mezouar, qui enfourche la même trompette que Marrakchi, pour qui «le développement des affaires doit se faire dans les deux sens». Il s'agit là d'une grande avancée, sachant que l'inaccessibilité du marché marocain aux businessmen africains est souvent brandie comme argument par les détracteurs de l'expansion du Maroc sur le continent. Dialoguer avec les patrons africains Autre point commun aux deux binômes: la nécessité de renforcer les relations avec les organisations patronales ouest-africaines pour appuyer la candidature du Maroc à la CEDEAO. Sur ce point, tous ajoutent que le royaume doit développer davantage ses relations avec le Nigeria, le géant démographique et économique continental et de la sous-région ouest-africaine. S'agissant de la poursuite de l'expansion économique du royaume en Afrique, tous la presque nécessaire pour faire davantage rayonner le label Maroc sur le continent. «L'Afrique australe, par exemple, connaît un développement certain; les entreprises y vont donc naturellement», tonne Marrakchi. Ce dernier estime toutefois que «La CGEM s'inscrit dans le dispositif que le roi définit et à la place qui lui est octroyée» dans la diplomatie économique. En outre, auprès des deux listes challengers, on croit fermement que les PME doivent être mieux soutenues pour profiter de la présence marocaine en Afrique subsaharienne. Echanges d'étudiants En dehors de ces points de convergence, chacun des deux tickets essaie de se distinguer par ses idées. Chez Mezouar-Mekouar, on promet de créer «un Club Afrique au sein de la CGEM pour encourager et promouvoir notre politique africaine». Autre volet important selon ce binôme, le Maroc doit davantage capitaliser sur les étudiants africains en formation dans ses établissements supérieurs, en «créant un outil institutionnel permettant à nos étudiants d'aller en Afrique pour des échanges universitaires ou des expériences professionnelles, et ce afin de créer des liens solides et une connaissance de l'Afrique qui puissent se traduire par des investissements». Arsenal juridique Pour leur part, Marrakchi-Benhida entendent œuvrer pour renforcer la convergence réglementaire entre le Maroc et ses partenaires du continent, afin de mieux encadrer certains métiers non réglementés. «Nous allons œuvrer avec les centrales ouest-africaines pour développer l'arsenal réglementaire commun et construire un marché ouest-africain», promet Hakim Marrakchi. En outre, pour ce dernier, l'intelligence économique et la veille concurrentielle doivent désormais être activées à plein temps, afin de favoriser une meilleure connaissance du marché africain. 1 Comment comptez-vous renforcer la présence marocaine en Afrique ? Hakim Marrakchi, Candidat à la présidence de la CGEM Tout d'abord, il faut dire que la diplomatie économique est menée par sa majesté Mohammed VI. La CGEM s'inscrit dans le dispositif que sa majesté définit et à la place qui lui est octroyée. Cela dit, nos entreprises continueront à se développer partout où la concurrence et les opportunités les appellent. L'Afrique Australe, par exemple, connaît un développement certain, donc les entreprises y vont naturellement. Nous allons vers l'instauration de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLEC) et il faut s'ouvrir et se préparer à ce bouleversement. Plus globalement, nous devons faire en sorte de renforcer les investissements marocains sur le continent et en même temps œuvrer pour que les entreprises africaines viennent investir au Maroc. Le développement des affaires doit se faire dans les deux sens. Faïçal Mekouar, Candidat à la vice-présidence de la CGEM Notre souhait est de consolider, de développer et de renforcer la synergie mise en place sur le continent africain et les initiatives d'investissements. L'idée est aussi d'élargir le co-investissement dans les deux sens : du Maroc vers l'Afrique subsaharienne et inversement de l'Afrique subsaharienne vers le Maroc. Aussi, il faut ouvrir de nouveaux horizons et des possibilités pour donner l'opportunité à des investisseurs subsahariens d'investir au Maroc. Cela passe par la mise en place de davantage de forums, de rencontres de travail B to B, etc. Nous devons aussi travailler à l'amélioration de la logistique, de la connectivité, des échanges d'expériences, d'expertises et d'informations. Enfin, il faudra mettre l'accent sur le développement des échanges culturels et mettre en avant les éléments cultuels et les traditions susceptibles de renforcer la proximité entre les différents peuples. 2 Comment inclure les PME dans la présence marocaine en Afrique ? Hakim Marrakchi Nous avons de grands groupes marocains exerçant dans plusieurs secteurs qui investissent sur le continent. Leur bonne connaissance de leurs activités facilite l'arrivée d'autres investisseurs marocains dans les pays africains et en même temps contribue à renforcer les échanges. Il nous faut davantage d'intelligence économique, de la veille concurrentielle afin de réussir à placer nos entreprises dans des pays qui nous sont encore difficiles d'accès. Je veux dire par là que lorsque les grands groupes s'installent quelque part, ils peuvent être un puissant levier pour fournir le maximum d'informations aux entreprises de taille modeste afin de faciliter leur implantation. Dans ce sens, nous allons mettre en place toute une démarche avec des personnes qualifiées pour faciliter cet exercice. Faïçal Mekouar Ma conviction est qu'il faut inciter les grandes entreprises qui investissent en Afrique à faire appel à davantage de PME marocaines qui opèrent dans la chaîne de valeurs des grandes entreprises. Il faut mettre en place des dispositifs permettant à nos PME d'aller en Afrique dans le sillage de nos champions nationaux. Les PME doivent être dans une dynamique de co-investissement et de partenariats. Le Maroc a la chance de recevoir un nombre très important d'étudiants africains et doit capitaliser sur cela en créant un outil institutionnel permettant à nos étudiants d'aller en Afrique pour des échanges universitaires où des expériences professionnelles et ceci afin de créer des liens solides et une connaissance de l'Afrique qui puissent se traduire par des investissements. Nous proposons la création d'un club Afrique au sein de la CGEM pour encourager et promouvoir notre politique africaine. 3 Que proposez-vous pour faciliter l'adhésion du Maroc à la CEDEAO ? Hakim Marrakchi J'œuvrerai en tant que président de la CGEM en faveur de l'adhésion du Maroc à la CEDEAO parce que cette adhésion va repositionner le Maroc dans son environnement naturel d'avant la colonisation car comme le disait feu sa majesté Hassan II, le Maroc a ses racines en Afrique. J'engagerai un dialogue avec les instances patronales de la sous-région ouest-africaine pour faciliter l'intégration du Maroc. Nous allons œuvrer avec les centrales ouest-africaines pour développer l'arsenal réglementaire commun et construire un marché ouest-africain. Faïçal Mekouar Notre approche, c'est de continuer le dialogue mis en place par la CGEM avec les différents patronats étrangers liés à la CEDEAO. Ce dialogue va nous aider à réaliser des études d'impact pour déterminer les avantages pour le Maroc dans le cadre de l'adhésion et de connaître les gaps sectoriels sur lesquels il faudra travailler pour mettre en place un plan d'intégration et un plan d'accompagnement des secteurs. Le Maroc est une chance pour la CEDEAO à laquelle elle va apporter des avantages significatifs avec une ouverture sur le continent africain, l'échange d'informations avec les pays membres, des économies complémentaires.