La demande d'adhésion du Maroc à la CEDEAO suscite des inquiétudes et des questions dans certains pays africains précisément au sein des corporations professionnelles. Afin de dissiper la méfiance quant à l'initiative marocaine, l'institut Amadeus à organisé, ce jeudi, une série de work shop et tables rondes entres les acteurs de la société civile et des opérateurs économiques des deux pays. Un débat franc, sincère, parfois musclé mais avec un préalable prôné des deux côtés; cet échange vise à renforcer les relations historiques des deux pays et enlever un malentendu qui n'en est pas un. D'emblée, Brahim Fassi Fihri, président d'Amadeus, plante le décor. "Le Maroc n'est pas pressé pour cette adhésion, cela prendra le temps qu'il faut pour que ce soit fait avec nos amis au Sénégal et les autres pays". Et d'ajouter que "le Maroc est admiratif du modèle d'intégration au sein de la CEDEAO, il veut apprendre de ce modèle, en bénéficier et apporter de la valeur aux pays membres". Mais cela ne se passe pas comme une lettre à la poste pour Jean Paul Dias, ancien ministre, qui dit haut et fort que "le Maroc a une industrie puissante, il veut des marchés extérieurs. C'est légitime, mais cela nous inquiète car nous ne somme pas encore prêts". Younes Slaoui d'Amadeus ne laisse pas passer. "Le Maroc ne cherche pas une portée économique, c'est une question de communauté et de destin. Cette demande s'inscrit dans cette tendance d'orienter son développement vers le sud dans le cadre d'une relation gagnant-gagnant". L'échange est ensuite plus détendu et enrichissant. Du côté sénégalais, on demande à comprendre ce que cherche le Maroc par cette adhésion si ce n'est plus de marchés et d'étendue économique. La délégation marocaine, dont l'argumentaire repose sur l'historique du rattachement du royaume à son africaniste, atténue les craintes en donnant comme exemple d'hégémonie la Chine et la Turquie en Afrique. Ces deux pays, dont personne ne conteste la prédation font pourtant l'essentiel des échanges commerciaux du Sénégal et de la CEDEAO. Bakary Sambé, écrivain journaliste, estime que l'ancrage historique des relations bilatérales n'est plus à discuter et d'ajouter que cette adhésion requiert un débat de franchise avant de conclure que "le Maroc adhère ou pas, nos relations resteront toujours exemplaires". Du côté du patronat sénégalais, Chikissan Basse ne remet pas en cause cette adhésion mais ne comprend pas cette "précipitation" puisque la demande est formulée en février 2017, a eu l'accord de principe en avril 2017 et a été actée par les chefs d'Etats de la CEDEAO en décembre 2017 sans que personne ne daigné nous expliquer les tenants et aboutissants de cette adhésion". Cependant, il y a eu aussi les optimistes des deux bords, ils croient dur comme fer à l'apport du Maroc à cette communauté et estiment que le royaume ne sera pas plus dangereux pour la CEDEAO que la Turquie et la Chine. L'ensemble des intervenants s'est accordé à dire que cette initiative de Amadeus est fort louable et devrait être rééditée afin de rapprocher les visions. D'ailleurs, Jean Paul Dias, le plus hostile des sénégalais à l'adhésion marocain a fini par reconnaître que "grâce à cette journée d'échange il a pu relativiser ses positions après ce qu'il a entendu de la par de marocains qui formulent aussi des inquiétudes quant à leur monnaie et aux flux d'immigration". Au terme de 10 heures d'échanges et de débats, les participants se sont accordés à approfondir le débat, à rapprocher les idées et à aller de l'avant dans le partage et l'ancrage qui lient les deux pays. La prochaine édition se passera dans quelques semaines à Abidjan pour rééditer l'expérience avec le tissu associatif et entrepreneurial ivoiriens.