Le Plan solaire marocain (PSM), initié par SM le roi Mohamed VI en 2009, a été accueilli avec enthousiasme par l'ensemble des acteurs du secteur énergétique. Aujourd'hui, personne ne remet en question la pertinence, la viabilité mais surtout la rentabilité de ce plan. Le paradigme est simple : un Etat visionnaire sait parier sur l'avenir. En effet, sur le court terme, la recherche, le développement et d'une manière plus globale, l'innovation nécessitent de lourds investissements, mais dont les externalités positives sont multiples et nombreuses sur le long terme : rentabilité économique, création de valeur au niveau local via l'intégration industrielle, innovation sociale, valorisation du capital immatériel à travers le transfert de savoir-faire et de connaissances, leadership international, et j'en passe. Le positionnement du Maroc sur les énergies nouvelles, relève du génie économique et politique ce qui fait aujourd'hui du du Maroc une des références mondiales dans le domaine. L'innovation au coeur de l'industrie pharmaceutique Pourquoi cette introduction sur un secteur qui n'est pas le mien ? Tout simplement parce que j'opère depuis de nombreuses années dans un secteur fortement dépendant de l'innovation et des progrès technologiques : l'industrie pharmaceutique. Notre secteur répond à la même logique que celle du secteur énergétique : créer de la valeur et obtenir un retour important, autant économique que social sur le long terme. Certains observateurs s'empêchent de concevoir une industrie de la santé innovante et portée sur la R&D de pointe, pour la seule et unique raison qu'un pays comme le Maroc, ne peut se payer le luxe de l'innovation. Je peux comprendre le raisonnement, mais je me pose la question suivante : Quel est l'impact d'un énième générique d'un IPP, d'un antidiabétique, un hypertenseur ? Cette logique est finalement inadéquate pour un pays - qui s'est déjà prouvé - visionnaire, aux ambitions internationales grandissantes et affichées au plus haut sommet de l'Etat. Rappelons que les laboratoires biopharmaceutiques, présents pour la plupart sur le territoire marocain depuis plusieurs décennies, sont confrontés à des évolutions rapides des connaissances scientifiques, sans cesse bouleversées par une recherche extrêmement active, et dans un environnement global en constante mutation. Nos entreprises s'ingénient à une relecture permanente des maladies afin d'adapter les process, les méthodes et les modèles dans la R&D. Ces progrès représentent une opportunité de taille pour le royaume afin d'accéder à une médecine moderne, individualisée, plus efficace et avec moins d'effets secondaires. Du sur mesure. Investir dans l'innovation et la R&D dans le secteur pharmaceutique est aujourd'hui l'évidence d'une profitabilité incontestée aussi bien pour le patient que pour le système de santé. Tout d'abord, nous le savons tous, l'économie mène et domine notre monde. Il est possible d'en débattre, mais on ne peut s'écarter à ce jour de cette réalité. Cependant, le plus important dans le secteur de la santé, c'est de gagner en indépendance face à toute logique comptable. Si celle-ci est incontournable sur le plan économique, les missions de santé publique sont vitales sur le plan humain. À ce titre, j'aimerai souligner que l'ADN des laboratoires biopharmaceutiques est d'agir au quotidien dans l'intérêt du patient. Ce n'est pas un slogan marketing, mais bel et bien le substrat de notre modèle économique, la raison même de notre existence. Sans une compréhension micro-détaillée des besoins du patient, aucun progrès scientifique n'est possible. Notre finalité est de permettre au patient de vivre plus longtemps, en bonne santé, actif et autonome, dans la dignité et avec une meilleure qualité de vie. Les exemples de progrès médicaux grâce à l'innovation thérapeutique ne manquent pas. Il n'est pas inutile de rappeler que les médicaments innovants ont considérablement augmenté l'espérance de vie et les chances de survie face aux maladies considérées comme immédiatement létales il y a 10 ans, mais qui tendent aujourd'hui de plus en plus vers la chronicité. Selon l'American Society of Cancer Oncology (ASCO), 83% des gains de survie dans le cancer sont attribuables à de nouveaux traitements. De la même manière, depuis près de trois décennies, les nouveaux traitements ont transformé des maladies lourdes en maladies chroniques et gérables, tels que le VIH ou encore le diabète. Meilleur accès aux soins Il est à mon avis essentiel de reconsidérer l'approche financière et économique des dépenses en santé. Aujourd'hui, un des principes de base de la pharmaco-économie, c'est d'évaluer le coût global de la gestion de la maladie plutôt que le coût immédiat du médicament ou des traitements prescrits. J'aimerai avancer deux exemples qui concernent de près la population marocaine : un meilleur traitement et accès aux médicaments antihypertenseurs pourrait sauver près de 200 000 vies et éviter plus d'un million d'hospitalisations. De même, dans des pays où le système de santé est déjà optimal, comme les Etats-Unis, l'amélioration de l'accès aux médicaments innovants chez les patients atteints de diabète permettrait d'éviter plus d'un million de visites aux urgences et des hospitalisations chaque année. Il est aussi prouvé aujourd'hui qu'un meilleur accès au médicament augmente la productivité des travailleurs, et par effet ricochet accroît la performance du tissu économique. Si les efforts en R&D des laboratoires biopharmaceutiques dans le monde sont gigantesques et se chiffrent désormais en centaines de milliards de dollars, il est plus que jamais le moment pour le Maroc de réussir à capter une part de ces investissements en R&D, au niveau local. D'ailleurs, une réflexion en profondeur est aujourd'hui menée par les laboratoires pharmaceutiques internationaux, basés au Maroc, afin de proposer un plan d'investissement colossal dans la R&D. Je tiens à souligner les efforts consentis par les autorités marocaines qui, avec beaucoup de clairvoyance, ont pris conscience du caractère stratégique de l'innovation dans le secteur du médicament, et des mesures concrètes et positives ont d'ores et déjà été entamées ces dernières années. Dans ce contexte, face aux opportunités d'investissement des laboratoires pharmaceutiques internationaux et aux enjeux en termes de performance, de souveraineté sanitaire et de leadership du royaume à l'échelle continentale, il est essentiel de promouvoir et soutenir un secteur pharmaceutique fort, innovant et créateur de valeur au même titre que la vision énergétique marocaine, clairvoyante, courageuse et ambitieuse, aujourd'hui saluée et référencée par la communauté internationale. Taher Hassen Vice-Président de l'association Les Entreprises du Médicament au Maroc (LEMM) et DG de Merck Maroc