L'Union du Maghreb arabe (UMA) est-elle en train de suivre les traces de l'Union pour la Méditerranée (UpM) ? La question mérite d'être posée au regard des initiatives récemment prises pour insuffler une nouvelle dynamique à la coopération régionale. À défaut d'avancées tangibles sur le plan politique, c'est sur les réseaux économiques qu'entend s'appuyer l'organisation, basée à Rabat, pour concrétiser le vieux rêve communautaire. La dernière décision qui tend à confirmer cette thèse est le projet de création d'une zone de libre-échange pour les produits agricoles. Selon le secrétaire général de l'UMA, Habib Ben Yahia, le projet «est dans la phase d'achèvement de sa mouture finale». Cette étape, la dernière avant l'entrée en vigueur de l'accord cadre, devrait en principe être bouclée d'ici la fin de l'année. À cet effet, deux réunions de haut niveau sont prévues dans les prochaines semaines, dont la première réunira les ministres maghrébins du commerce et la seconde leurs homologues des Affaires étrangères, «afin d'installer les éléments de base pour la concrétisation effective de ce projet», souligne-t-on du côté de l'UMA. L'optimisme du responsable de l'organisation régionale fait suite aux conclusions de la 16e session de la commission ministérielle maghrébine de la sécurité alimentaire, qui vient se tenir à Alger, avec la participation des ministres en charge de ce secteur des 5 pays membres de l'Union (Algérie, Libye, Mauritanie, Tunisie et Maroc). Doper les investissements infrarégionaux Au niveau de l'UMA, on s'active déjà à prendre les devants pour préparer l'échéance. Benyahia a ainsi appelé à accélérer l'élaboration des listes des produits agricoles et de ceux transformés, ainsi que des produits de la pêche, qui peuvent être échangés entre les pays membres. Si l'initiative est assez prometteuse au vu des potentialités qui existent au niveau régional concernant la filière agricole et celle de la pêche, l'objectif visé va au delà du simple aspect de la sécurité alimentaire. L'objectif final est de doper les échanges intracommunautaires en actionnant plusieurs leviers capables d'accompagner la dynamique. Selon Habib Benyahia, «le volume des échanges commerciaux intermaghrébins est encore insignifiant». Celui-ci est en effet, de 3%, à l'heure actuelle, loin du niveau minimum qu'il pourrait atteindre. D'après les statistiques que viennent de publier les autorités tunisiennes, qui viennent de réaliser une étude sur les échanges régionaux intramaghrébins, la Tunisie exportait près de 10 fois plus vers la zone hors UMA que vers les pays de l'Union du Maghreb arabe, avec près de 19.194 millions de DT. Plus explicite, la part du Maroc dans la valeur du volume des échanges commerciaux tunisiens n'est que de 1.5%. Sur les dix premiers mois de l'année, la valeur des exportations marocaines ont atteint 70,3 millions de dinars, alors que les exportations se chiffrent à 20,9 millions de DT. Le premier responsable de l'UMA a d'ailleurs appelé tous les membres «à l'accélération de la création de la zone de libre-échange maghrébine». Ce projet ne saurait se réaliser sans des actions concrètes visant notamment à faciliter les procédures douanières et à accélérer le démantèlement, entre les 5 pays et pour certains produits, des droits de douane. Cela suppose au préalable, une réelle volonté politique entre les dirigeants des pays membres. C'est justement à ce niveau que les choses ont toujours bloqué même si ces derniers temps, le contexte politique régional a imposé une tendance vers un relatif dégel, principalement entre le Maroc et l'Algérie, dont le contentieux constitue la véritable pomme de discorde de la mise en œuvre du projet régional. De toute façon, «ces pays n'ont pas d'autre alternative, avec la conjoncture économique internationale qui a plombé la demande européenne, leur principal client et fournisseur», analyse un expert tunisien. Il y a là de quoi inaugurer un nouveau cycle commercial, en profitant des opportunités régionales, même si le chemin semble encore loin, au vu de la complexité des procédures et surtout de la faiblesse des infrastructures de transport sur lesquelles s'appuyer pour concrétiser efficacement les initiatives. Il s'agit là d'un autre aspect, qui nécessite d'autres initiatives.