Décembre 2017 est un mois charnière pour la profession d'avocat. Les 17 barreaux du royaume éliront leurs nouveaux membres, mais surtout leurs bâtonniers. Dans chaque barreau, le bâtonnier est élu par ses pairs -par le biais d'une assemblée générale composée de tous les avocats inscrits au tableau- et ce, à l'issue d'un scrutin secret à deux tours. Et sans surprise, c'est celui de Casablanca qui provoque le plus de remous, puisqu'un avocat sur cinq est installé dans la ville. Les élections au barreau de la ville vont se faire en deux étapes. Ce sont d'abord les avocats qui veulent être membres du Conseil de l'Ordre qui vont s'affronter pour décrocher un siège, les 14 et 15 décembre. La seconde étape, dédiée à l'élection du bâtonnier, est prévue le 22 décembre. Un poste qui requiert un minimum de 15 ans d'expérience en plus d'avoir siégé au moins une fois au Conseil de l'Ordre. Une trentaine de candidats ont déjà déposé leurs candidatures. Plusieurs paramètres conditionnent les alliances, qui se font en fonction des secteurs d'activité (droit pénal, droit des affaires, droit de la famille), des proximités politiques, voire, ce qui est rare, du genre.... À Rabat, le délai pour le dépôt des candidatures sera échu le 15 décembre. Le vote aura lieu les 20, 21 et 22 décembre. Le sujet qui anime le plus la campagne des futurs bâtonniers est, sans aucun doute, la réforme de la profession et les différentes propositions à présenter au ministère pour un amendement de la loi 28-08. Selon le dernier mémorandum, présenté à l'administration Ramid, les robes noires exigent la modification des conditions d'accès. Ainsi au lieu d'une licence en droit et d'un stage de trois ans après la réussite de l'examen du Certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA), l'Association des barreaux du Maroc propose d'exiger, des nouveaux entrants, l'obtention d'un master et le passage d'une année à l'Institut marocain d'avocats, dont la création est prévue un an après la publication de la nouvelle loi. Le tout conclu par un stage effectif de deux ans chez un avocat inscrit au barreau depuis plus de 5 ans. En outre, la profession a intégré des compatibilités à la profession d'avocat, en particulier la participation au Conseil d'administration d'une société, l'arbitrage et l'enseignement supérieur. Pour rappel, le texte en vigueur édicte des incompatibilités larges qui se résument en l'interdiction d'exercer une activité commerciale. Les avocats se proposent donc de préciser que seules peuvent faire l'objet d'une interdiction d'exercer les personnes inscrites au Registre de commerce ou relevant du Code du travail, et suggèrent que les avocats nommés en tant que magistrats à la Cour constitutionnelle suspendent leurs activités. Mais la proposition la plus audacieuse est l'obligation pour les sociétés tenues d'avoir un Commissaire aux comptes de faire appel à un avocat inscrit au barreau en tant que conseiller juridique. Certains candidats souhaitent également supprimer la disposition qui permet la présence du ministère public (procureur général près la Cour d'appel) dans les conseils de discipline des avocats, justifiée par des impératifs de «transparence, de contrôle et de responsabilisation dans les professions judiciaires». Dans son dernier coup d'essai de réforme, le ministère de la Justice prévoyait ainsi de «revoir la méthode et la durée d'élection du bâtonnier et des membres du conseil du barreau en vue de réaliser la parité et la représentativité des catégories d'âge et de l'ancienneté dans la profession, et en limitant la durée d'élection du bâtonnier en un seul mandat non renouvelable». Une disposition rejetée en masse par les professionnels. Vers l'amendement de la SCPA La Société civile professionnelle d'avocat, instituée en 2008 par la loi 28.08, est une sorte de structure «hybride» qui ne répond pas vraiment aux attentes de la profession, à la recherche de forme juridique plus souple. En effet, dans les SCPA, chaque associé répond, sur l'ensemble de son patrimoine, des actes professionnels qu'il accomplit. La société civile professionnelle est solidairement responsable avec lui des conséquences dommageables de ces actes. Du coup, l'action en responsabilité peut indifféremment être dirigée soit contre la société ou l'associé concerné, ou encore contre les deux.