Le gouvernement local de l'Andalousie est décidé à attaquer en justice des familles marocaines pour «abandon familial». Selon le département du Bien-être social et de l'égalité, plusieurs enfants appartenant à des familles dites «normales» ont été laissés par leurs parents devant les portes des centres de protection de mineurs. Le premier cas a été détecté en 2009, lorsqu'une famille avait renoncé à sa fille de 17 ans devant un établissement situé à Algésiras. Peu de temps après, trois de ses frères ont fait leur apparition au centre, réclamant une admission. Contraint d'appliquer la loi portant sur la protection des mineurs, le centre s'est vu dans l'obligation de les prendre sous son aile. Or, selon les recherches menées par le département en charge des centres d'accueil, et de l'aveu même des propres adolescents, les responsables andalous ont pu savoir que la famille est loin de vivre dans des conditions misérables. D'ailleurs, les parents maintiennent un contact permanent avec leur progéniture à travers le téléphone. Et selon ce qu'a déclaré à la presse la conseillère andalouse en charge de l'affaire, il arrive même que les parents leur rendent visite durant l'été. Cette situation a soulevé l'ire du gouvernement régional, lequel a décidé d'entamer une procédure judiciaire contre ladite famille. Il ne s'agit pas là de la première tentative d'abandon répertoriée en Espagne. Une première plainte a été déposée en 2010 et n'a pas abouti, étant donné que le juge n'a pas réussi à localiser les parents des jeunes sur le sol ibérique. Dès lors, d'autres cas se sont révélés au grand jour. La conseillère andalouse a précisé qu'il s'agissait de chefs de familles exerçant des métiers respectables et jouissant d'une situation financière assez confortable, comme en attestent les déclarations de leur descendance. Les autorités andalouses, irritées, estiment que l'Andalousie n'est pas un internat où viendraient séjourner des enfants, issus de milieux sociaux ordinaires, au détriment des laissés-pour-compte. Tout porte à croire que le projet des parents est mûrement réfléchi, car le choix du centre auquel sera confié le mineur n'est pas laissé au hasard. Ils abandonnent leurs rejetons dans les établissements les mieux réputés où ils auront droit à une formation et à de fortes chances d'accéder au marché du travail, puisque tous les mineurs sont sous la tutelle du gouvernement régional. Aujourd'hui, l'affaire prend un nouveau tournant, le juge en charge du dossier ayant établi l'existence d'infractions pénales. Ce verdict réconforte le gouvernement local, décidé à mener une action en justice contre six familles marocaines identifiées et repérées au Maroc. Aussi, l'administration andalouse est déterminée à réclamer la globalité des dépenses effectuées. Cela représente une facture salée, quand on sait que le centre destine une enveloppe budgétaire de 50 euros par jour à chacun de ses résidents. Le phénomène des mineurs marocains hébergés dans les centres d'accueil est un sujet qui irrite la société espagnole, vu que 75% des occupants de ces établissements sont d'origine marocaine. Ils estiment que ce n'est pas au contribuable espagnol de subvenir aux besoins de mômes abandonnés par leurs parents. Si, auparavant, ils toléraient cette pratique, puisque les centres offraient l'hospitalité à des enfants de la rue, abandonnés à leur sort et sans le moindre soutien, la découverte de l'existence de bénéficiaires appartenant à des familles disposant de ressources financières exaspère. Par ailleurs, la pratique prend de plus en plus d'ampleur, à en juger par ce témoignage d'une directrice de centre. Selon cette responsable, le profil des résidents mineurs a complètement changé depuis l'éclosion du phénomène dans les années 90. «Nous ne sommes plus devant des enfants en situation défavorisée ayant erré dans les rues avant de trouver le moyen ou l'occasion de tromper la vigilance des gardes frontières et de réussir à fouler le sol espagnol. Il s'agit désormais d'enfants qui entrent au pays légalement, avec un visa touriste et un projet migratoire ficelé», regrette cette directrice. La nouvelle forme de migration est davantage préoccupante, car la pratique connaît une forte progression de l'arrivée de jeunes filles. Selon les statistiques fournies par le département en charge du dossier, 189 adolescentes ont été admises durant 2010. De plus, l'âge des arrivants est de plus en plus jeune, vu qu'en 2011, ils étaient 326 enfants de moins de 15 ans à être accueillis au sein des centres de protection de mineurs.