Les citoyens marocains ont une perception négative sur plusieurs secteurs et à leur tête l'enseignement et la santé. Ils pointent du doigt plusieurs phénomènes comme la corruption, le clientélisme et le peu de rigueur du système coercitif. C'est l'une des conclusions de l'enquête menée par le HCP sur la perception par les ménages de quelques cibles des principaux objectifs de développement durable. Menée entre le 1er juillet et le 19 août 2016, l'enquête du Haut-commissariat au Plan sur les objectifs de développement durable s'avère d'une grande importance. La réalisation des ODD ne peut, en effet, que s'enrichir de la prise en compte du point de vue des citoyens sur leur vécu de la réalité économique, sociale, culturelle et institutionnelle, comme le souligne le Haut-commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi. L'objectif étant de promouvoir «une large conscience des exigences de la durabilité pour une croissance soutenue, une société équitable et paisible et un environnement sain». Lahlimi tient à mettre l'accent, à travers la perception transversale des Marocains sur l'origine des maux et des déficits sociaux dénoncés, sur la large incrimination des citoyens de la pauvreté, du chômage et de la drogue dans les phénomènes du violence, comme leur incrimination des inégalités dans le domaine de l'emploi, de la santé et des services sociaux à la corruption et au népotisme. Les citoyens expliquent les maux et déficits sociaux par le peu de rigueur du système coercitif. Sur le volet de la dimension environnementale, la majorité des citoyens sont conscients des enjeux des changements climatiques et de leurs effets sur la régularité des pluies, le réchauffement de la planète et les ressources hydriques. Ils pointent du doigt certaines problématiques du vécu quotidien, comme les insuffisances en matière d'assainissement liquide (26 %), de gestion des déchets (65%) et la promiscuité démographique dans les lieux d'habitat et la pollution de l'air. S'agissant de l'accès à l'eau et à l'électricité, même si la facture est jugée élevée, la perception des citoyens demeure positive. Par contre, les enquêtés épinglent le niveau de qualité et de sécurité des transports routiers ainsi que celui des espaces verts et de la forêt avec une large demande pour les protéger d'une plus grande sévérité dans le contrôle et la sanction. Au niveau de la santé et de l'enseignement, l'éloignement et le faible équipement des structures sanitaires et scolaires sont critiqués. Les reproches ont trait particulièrement au mauvais accueil et à la corruption des centres de santé. Les citoyens incriminent aussi la faiblesse des équipements sociaux, le faible niveau du personnel et le faible rendement externe de l'enseignement. Sur le plan de l'emploi, les citoyens estiment que la croissance et les politiques économiques doivent avoir pour objectif de booster la création des postes de travail. En effet, 57% pensent que la finalité de la politique économique doit être l'emploi, 33% soulignent l'amélioration des conditions de vie et 10% évoquent la création de la richesse nationale. Au niveau de l'emploi que les citoyens souhaitent exercer, le Haut-commissaire au Plan souligne un changement de taille dans la société. Alors qu'il y a quelques années, c'est l'administration publique qui était en tête des prédilections, l'enquête du HCP dégage une nouvelle tendance : 41% privilégient l'auto-emploi, 33% l'emploi public et 5% l'emploi dans le secteur privé. S'agissant de la paix sociale, les deux tiers des ménages estiment que la criminalité, dans leur environnement, est due aux vols ou aux actes de violence physique. Ils pointent du doigt le chômage et la drogue qui sont perçus comme les principales causes. Par ailleurs, plus de la moitié des interviewés pensent qu'il y a une hausse de la corruption pratiquement dans tous les domaines et institutions. À cet égard, le secteur de la santé est particulièrement perçu négativement. Pour pallier ce fléau, les citoyens appellent à une plus grande rigueur de la loi et une plus grande sévérité de la justice. En ce qui concerne le niveau de vie, près de 44% des ménages considèrent que l'extrême pauvreté est une réalité dans l'environnement. «Ceci est en décalage avec les données statistiques basées sur les différentes méthodes d'analyse», précise Lahlimi. La mendicité est citée comme un phénomène fréquent ou très fréquent ; 45% en attribuent la raison au chômage, 33% à la lucrativité de la pratique. En gros, le Haut-commissaire au Plan relève que le chômage, la précarité de l'emploi et les difficultés d'accès aux programmes sociaux, avec un accent particulier sur les limites de la protection sociale et de couverture médicale qui sont cités comme les causes explicatives de l'indigence sociale. En matière d'égalité des sexes, elle est perçue comme une réalité au Maroc par, uniquement, 41% de la population, alors que plus de 70% attribuent l'origine des inégalités au poids de l'héritage et de la tradition ainsi qu'à des comportements innés chez l'homme. Une grande majorité se prononce pour la parité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines économiques et institutionnels. Néanmoins, 87% sont contre toute parité dans le partage de l'héritage. Le Haut-commissaire au Plan souligne un décalage «paradoxal» dans ce domaine entre l'expression d'une adhésion à l'égalité des sexes dans tous les domaines et à la parité dans toutes les institutions, d'une part et l'accord donné par plus de 60% de la population à des affirmations telles que : «La priorité doit être donnée aux hommes dans le marché du travail» ou bien, «le travail de la femme se fait au détriment de l'éducation des enfants» ou encore, «les hommes sont plus capables d'assumer les responsabilités que les femmes». Tags: Enquête HCP Ahmed Lahlimi Maroc