Ahmed Lahlimi Alami, Haut-Commissaire au Plan, a dévoilé, mardi à Rabat, lors d'une conférence de presse, les résultats de son enquête nationale sur la perception par les citoyens des Objectifs de l'Agenda International de Développement Durable (ODD) et des conditions de leur réalisation au Maroc. « Réalisée entre le 1er juillet et le 19 août 2016, cette enquête, qui a couvert l'ensemble du territoire national avec un échantillon permettant d'en régionaliser les résultats, s'est fixé comme objectif, d'une part, d'appréhender l'évaluation par les citoyens, dans leur vécu quotidien, des dimensions du développement humain dans notre pays et des facteurs à l'origine de leur niveaux actuels et d'autre part, de recueillir leur point de vue sur les choix que devrait opérer notre pays pour atteindre, dans les meilleures conditions, les Objectifs de Développement Durable (ODD) à l'horizon 2030 », a souligné M. Lahlimi. Premier résultat de l'enquête ainsi soulevé par le Haut-Commissaire au Plan : 60% des citoyens perçoivent largement les changements climatiques et de leurs effets sur la régularité des pluies, le niveau des températures et le niveau des ressources en eau. Toujours au plan de la dimension environnementale, les perceptions négatives se réfèrent aux insuffisances en matière d'assainissement liquide (26%), de gestion des déchets (65%), ainsi qu'à la promiscuité démographique dans les lieux d'habitat et la pollution de l'air. En dehors de sa facture jugée élevée par la majorité, l'accès à l'eau et l'électricité est largement perçu comme satisfaisant. Un point de vue négatif est exprimé sur le niveau de qualité et de sécurité des transports routiers ainsi que sur celui des espaces verts et de la forêt avec une large demande, pour les protéger, d'une plus grande sévérité dans le contrôle et la sanction. Aux plans de la santé et de l'enseignement, les reproches récurrents ciblent largement l'éloignement et le faible équipement des structures sanitaires et scolaires, avec une mention particulière du mauvais accueil et de la corruption dans les centres sanitaires. La faiblesse des équipements sociaux, le faible niveau du personnel et le faible rendement externe de l'enseignement sont largement mis en exergue. M. Lahlimi a fait observer, en ce sens, que si 80% des concitoyens ont inscrit leurs enfants dans les établissements d'enseignement public, 43% accordent leur préférence à ce secteur de l'enseignement, alors que 30% souhaitent une politique d'encouragement à l'enseignement privé. Les résultats de l'enquête font ressortir, par ailleurs, que 57% des citoyens estiment que la finalité de la politique économique doit être l'emploi, 33% pour l'amélioration des conditions de vie et 10% pour la création de la richesse « Il est à cet égard remarquable que parmi les différentes catégories d'emploi, 41% privilégie l'auto-emploi, 33% l'emploi public et 5% l'emploi dans le secteur privé », a ajouté M.Lahlimi. Au plan de la paix sociale, les 2/3 des ménages soulignent que la criminalité dans leur environnement c'est d'abord les vols ou les actes de violence physique. Le chômage et la drogue en sont perçus comme les principales causes. Plus de 50% perçoivent, par ailleurs, une hausse de la corruption pratiquement dans tous les domaines et institutions et, en particulier, dans le secteur de la santé. Pour faire face à ces maux, une plus grande rigueur de la loi et une plus grande sévérité de la justice sont considérées comme la solution souhaitable. Malgré cela, poursuit le Haut-Commissariat au Plan, il est remarquable que 50% au total, – 47,8% en milieu urbain et 52,2% en milieu rural – sont pour l'abolition de la peine de mort. Les résultats de l'enquête font ressortir aussi qu'au plan du niveau de vie, près de 44% des concitoyens considèrent que l'extrême pauvreté est une réalité dans leur environnement. Plus de 80% d'entre eux pointent la mendicité comme un phénomène fréquent ou très fréquent et 45% en attribuent la raison au chômage, 33% à la lucrativité de la pratique. D'une façon générale, le chômage, la précarité de l'emploi et les difficultés d'accès aux programmes sociaux avec un accent particulier sur les limites de la protection sociale et de la couverture médicale sont cités comme les causes explicatives de l'indigence sociale. D'autre part, l'égalité des sexes est perçue comme une réalité par 41% de la population. Plus de 70% attribuent l'origine des inégalités dans ce domaine aux valeurs héritées de la tradition et à des comportements innés chez l'homme. En grande majorité favorable à la parité hommes-femmes dans tous les domaines de la vie économique et institutionnelle, la population est, cependant, à 87% contre toute parité dans le partage de l'héritage. M. Lahlimi a tenu à noter, à cet égard, que le décalage paradoxal, dans ce domaine, entre l'expression d'une adhésion à l'égalité des sexes dans tous les domaines et à la parité dans toutes les institutions, d'une part et l'accord donné par plus de 60% de la population à des affirmations telles que : « la priorité doit être donnée aux hommes dans le marché du travail » ou encore « le travail de la femmes se fait au détriment de l'éducation des enfants » ou encore « les hommes sont plus capables d'assumer les responsabilités que les femmes ». A la lumière de ces résultats, M. Lahlimi fait conclure que ce que les Marocains dénoncent largement ce sont la pauvreté, le chômage, les inégalités dans le domaine de l'emploi, de la santé et des services sociaux... Néanmoins, plus de 90% jugent la société paisible et en attribuent les conflits, quand ils existent, à un déficit moral. 50% des concitoyens déclarent avoir pris des initiatives en faveur de l'environnement au cours des cinq dernières années et 65% se déclarent disposés à en prendre pour contribuer à sa protection par le recours, notamment, à l'énergie solaire au lieu du gaz et du bois. Toujours est-il que pour plus de 80%, le Maroc arrivera à réaliser totalement l'ensemble des ODD à l'horizon 2030.