Près de 30% des Marocains ont déclaré être satisfaits ou très satisfaits de leur qualité de vie, 24,4% sont moyennement satisfaits et 45,7% peu ou pas satisfaits. Le Haut-Commissariat au Plan (HCP) a rendu publics mercredi les résultats d'une enquête sur la perception de la qualité de vie des Marocains menée en 2012. Une perception que le haut-commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi, a qualifiée de «catastrophique» compte tenu des nombreux facteurs qui troublent le bien-être des citoyens. «Nous avons répertorié pas moins de 95 affects négatifs, correspondant aux différentes dimensions du bien-être évoquées par les répondants», a-t-il précisé. Qu'est-ce qui contribue au malheur des Marocains ? En tête de liste arrive le logement. Il semblerait que même lorsque le Marocain arrive à s'approprier un logement, plusieurs facteurs entravent sa satisfaction par rapport à cette dimension. Les conditions du logement, notamment sa superficie, contribuent à hauteur de 64% à ces difficultés, suivies des nuisances du voisinage (26%) et du confort du logement (10%). Un chiffre significatif à ce sujet : 88% des Marocains souffrent d'au moins 2 affects négatifs liés au logement. Sans surprise, la santé arrive en deuxième position. D'après l'enquête des services de Lahlimi, les Marocains ne se plaignent pas autant des problèmes de santé (19%) que de l'accessibilité et la qualité des services de santé, citées par 81% comme entrave au bien-être. De manière générale, la majorité écrasante (89%) des citoyens n'est pas satisfaite par rapport au domaine de la santé. Du côté de l'éducation, les résultats ne sont pas meilleurs : seulement 8,6% sont satisfaits. Le reste blâme la disponibilité des infrastructures éducatives (40%), la qualité de l'enseignement (33%), la qualité des équipements (15,3%) ou encore la compétence des enseignants (11,8%). En ce qui concerne l'emploi, le niveau moyen de satisfaction est de 4,7 sur 10. L'insatisfaction dans le domaine du travail revient à 63% à l'insuffisance du revenu et à la faible qualité du système de la retraite. Le reste des affects négatifs est lié aux conditions de travail à hauteur de 37%. Si, en matière de bien-être, la famille semblait être une valeur sûre, elle n'échappe pas non plus à son lot d'affects négatifs. 90% de la population en relèvent même au moins quatre dans le domaine de la famille et de l'environnement social. Parmi eux, 34% citent des problèmes de confiance, 29% le respect des droits et des lois sociales, 28% les liens de solidarité et 9% les liens familiaux et sociaux. «Le fait que les Marocains espèrent avoir une meilleure relation avec leurs frères, sœurs, parents ou grands-parents est normal lorsqu'on considère l'évolution qu'a connue la société marocaine et l'explosion des familles», a précisé Ahmed Lahlimi à cet égard. Enfin, le domaine de la culture et du loisir ne manque pas non plus de provoquer l'insatisfaction des Marocains. 95% de la population éprouvent au moins 5 affects négatifs liés à ce domaine. Dans l'ensemble, la disponibilité des infrastructures et l'accès aux activités sociales et de loisirs sont pointés du doigt à hauteur de 47%. Le reste revient à la disposition des personnes à pratiquer des activités de loisir (19,5%), aux difficultés à pratiquer des activités de divertissement (17%) et des activités culturelles (16,5%). Pourquoi une enquête sur le bien-être ? «Nous avons pensé passer de statistiques aux critères objectifs à une nouvelle approche qui met le citoyen et ses sentiments au cœur de nos intérêts», a déclaré le haut-commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi, justifiant le choix d'une enquête de ce type. Il faut dire que l'adoption de ce nouveau paradigme intervient dans un contexte mondial marqué par les inégalités sociales, où beaucoup d'organismes internationaux recommandent d'aller au-delà des indicateurs socio-économiques pour mesurer le progrès de chaque pays. En 2009, la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi chargée de la mesure des performances économiques et du progrès social avait conseillé aux gouvernements de développer de nouvelles mesures de la qualité de vie, de prendre en compte la dimension de durabilité du développement dans la mesure du progrès et d'améliorer les mesures conventionnelles existantes. L'enquête lancée en 2012 par le Haut-Commissariat au Plan (voir page 4), s'inscrit dans ce cadre, avec une volonté de mieux appréhender la qualité de vie, telle que ressentie par les citoyens. «Nous espérions expliquer le gap qui existe entre les statistiques du HCP et le ressenti des citoyens», a expliqué Lahlimi. Entre qualité de vie et inégalités sociales «Les inégalités en matière de bien-être ne concordent pas avec les inégalités sociales», tel était le constat du haut-commissaire au Plan, Ahmed Lahlimi, suite à la présentation des résultats de l'enquête sur la perception des Marocains de leur qualité de vie. L'enquête souligne que l'indice d'inégalité des affects négatifs est de 0,15, ce qui voudrait dire que les Marocains sont relativement égaux devant les affects et les difficultés liées à la qualité de la vie. Le niveau d'inégalité est cependant plus élevé dans le milieu urbain que dans le milieu rural. En observant les résultats de cette enquête de plus près, on peut néanmoins relever que les personnes les plus désavantagées en termes de qualité de vie sont un peu plus présentes dans le milieu rural (53%) que dans le milieu urbain (47%). Près de la moitié d'entre elles sont sans niveau scolaire, 40% sont des ouvriers, 24% sont des exploitants agricoles et 70% déclarent un revenu mensuel de moins de 3.000 dirhams. Les personnes bénéficiant de la meilleure qualité de vie sont, quant à elles, issues du milieu urbain à hauteur de 80%, 60% ont un niveau d'enseignement secondaire ou supérieur, 44% sont des cadres supérieurs ou cadres moyens et 44% déclarent un revenu mensuel supérieur à 5.000 dirhams.