Le festival Tanjazz a pris fin hier dimanche, avec un concert du multi-instrumentiste Ben Prestage, dont le lyrisme a prouvé que l'originalité était bien le mot d'ordre de cette 12e édition, qui a confirmé son ancrage au niveau national et même international. Un aréopage d'artistes de renom ont animé les soirées de cette manifestation, offrant au public, toujours au rendez-vous, des moments joyeux et colorés. Vendredi 23 septembre, au Palais des Institutions Italiennes, le jazz pur était à l'honneur, grâce à un spectacle du Roy Hargrove Quintet, sans chanteuse et sans habillage. Le festival tangérois de jazz a connu là l'une de ses grandes soirées. Trompettiste hors pair, Roy Hargrove, dont c'est la première venue à Tanjazz, a transporté l'assistance dans un univers chargé d'émotions. Produit depuis des années déjà par Universal Music, Roy Hargrove était accompagné de quatre musiciens poussés au dépassement grâce un public précis dans son écoute. Justin Robinson au saxophone, Sullivan Fortner au piano, Ameen Saleem à la contrebasse et Montez Coleman à la batterie étaient serrés au centre de la scène. À la micro-seconde, ils répondaient aux notes, aux rythmes des uns et des autres, comme par télépathie. L'interactivité de l'improvisation était dans son plus bel élan. «Je suis un habitué du festival... Assister à un concert de Roy Hargrove qui se produit sur les plus grandes scènes internationales est tout simplement un bonheur», nous confie un quinquagénaire français installé à Tanger. Comme une magie L'autre grande soirée de Tanjazz a été animée par «l'ambassadrice musicale de la Nouvelle Orléans», Lillian Boutté. Son concert, programmé samedi dans la soirée a été sans aucun doute l'un des moments forts de ce festival. Chanteuse aux côtés, entre autres, de James Booker, Patti Labelle et les Neville Brothers, Lillian a enflammé la scène. Associant les spectateurs à son show, elle a tout simplement transmis aux Marocains sa propre vision généreuse de l'héritage culturel de la Nouvelle Orléans, ville du grand Louis Armstrong. Samedi toujours, l'autre tête d'affiche de cette 12e édition, en l'occurrence Roberta Gambarini, n'a pas manqué d'opérer sa magie. Les titres de ses albums «Easy to love» ou «You are there», ont été très bien accueillis par le public de Tanger, ébloui par une voix souvent comparée aux grandes dames du jazz. Lillian Boutté & The Gigolos, Roberta Gambarini mais aussi Terrakota, The Jive Aces, Swing Dealers, Wab, Les Pommes de ma douche, Jeff Zima Swing Messengers, Jam Sessions... se sont produits samedi soir au Palais mythique des Institutions Italiennes (ancienne demeure du Sultan Moulay Hafid) qui s'est transformé cinq jours durant en un immense studio où musiciens américains et européens ont livré le meilleur d'eux-mêmes. Durant cette période du festival, le jazz a été célébré, même en dehors du Palais. Des animations de rues, des concerts en plein centre ville de Tanger, des soirées dans certains hôtels partenaires du festival... ont donné un caractère populaire à Tanjazz, qui a réussi au bout de 12 éditions à avoir son public, façonné au fil des années avec ses repères. Bref, grâce à Tanjazz, le chant du jazz a fait entendre son présent. Vivement l'édition 2012 ! «Le public m'a adopté»: Roy Hargrove, Musicien américain Les Echos quotidien : Vous vous êtes produit pour la première au festival Tanjazz. Comment a été la rencontre avec le public marocain ? Roy Hargrove : Elle s'est très bien passée. J'étais très heureux de rencontrer pour la première fois ce publicc. J'avoue que j'avais peur avant de monter sur scène, mais juste après, le public m'a adopté, ce qui m'a encouragé à donner le meilleur de moi-même. On estime aujourd'hui que le jazz se porte mal. Qu'en pensez-vous ? Je ne suis pas d'accord. Le jazz se porte très bien. Vous savez, le jazz évolue d'une manière perpétuelle, selon les musiciens, leurs humeurs, leurs styles et leurs compositions. En ce qui me concerne, j'essaie d'être créatif, en proposant des compositions où se confrontent plusieurs genres, mais qui respectent la tradition du jazz. Le plus important pour moi, c'est le feeling. Peut-on dire que la relève est assurée ? Absolument ! Il y a des jeunes musiciens talentueux qui sont en train écrire leurs noms en lettres d'or dans l'histoire du jazz. En un mot, je suis confiant en l'avenir de ce genre musical.