La population mondiale croît et s'urbanise rapidement. Nous devinons ce qu'il en coûtera de nourrir la planète de demain. Il s'agira de plus de 9,3 milliards d'habitants à l'horizon 2050, selon l'ONU. Cela représente une augmentation de la production alimentaire de plus de 70%. Il faut donc s'orienter vers des écosystèmes sains et bien gérés, afin d'assurer la sécurité alimentaire des populations et de couvrir leurs besoins en eau. Autrement, c'est la perspective d'une crise alimentaire qui se profile ! En effet, de multiples constats montrent que la planète épuise progressivement et à un rythme soutenu ses ressources en eau. C'est notamment le cas dans les zones de forte production agroalimentaire. Le réchauffement climatique s'ajoute à ce fait menaçant d'accentuer davantage les problèmes de sécheresse et d'inondations. Assurément, des politiques inadaptées de développement peuvent ravager les terres, épuiser les ressources en eau et réduire la fertilité des sols, particulièrement dans les régions les plus vulnérables à l'instar du Maroc. Cette situation a de graves conséquences physiques, sociales et économiques. Ceci appelle sans tarder à reconsidérer les méthodes d'amélioration des rendements, à un moment où la production alimentaire représente déjà plus de 70% de la consommation en eau mondiale. Un changement radical d'approche par la mise en place de politiques communes entre environnement et agriculture s'impose. Ces politiques devraient ainsi aboutir à une augmentation de la productivité agricole, tout en préservant les ressources naturelles comme l'eau et les différents écosystèmes. Concrètement, cela signifie une meilleure adaptation des cultures aux nouvelles conditions climatiques, à l'amélioration des techniques d'irrigation, à la préservation des zones humides et à une gestion plus rationnelle des ressources hydriques. Autrement, si on maintient les mêmes pratiques agricoles et les régimes alimentaires actuels, la quantité d'eau nécessaire à l'agriculture, qui est de 7.000 kilomètres cubes aujourd'hui, augmentera de 70 à 90%, pour nourrir neuf milliards de personnes d'ici à 2050. Désormais, la recherche de la souveraineté alimentaire est considérée comme un objectif stratégique pour les Etats. D'autre part, les aléas des changements climatiques et de la mondialisation, la crise alimentaire mondiale de 2007-2008, ont mis en évidence la vulnérabilité de plusieurs pays en matière de couverture des besoins alimentaires de base, ainsi que le poids financier «insupportable» des importations en temps de crise mondiale.La famine ne résulte pas seulement de la sécheresse. Les résultats insuffisants dans le secteur agricole y sont dus aussi à la qualité de la gouvernance. L'accès des populations à une nourriture suffisante en quantité et en qualité nutritive, une nourriture variée à moindre frais, restent une nécessité qui passe d'abord par la préservation et la réhabilitation des potentialités nationales en ressources naturelles et humaines. D'où l'importance d'une stratégie de renouveau agricole et rural, fondée sur l'optimisation et la diversification des productions, sur le développement d'une capacité nationale de production d'intrants agricoles et sur la régulation des marchés agricoles et agroalimentaires locaux, y compris par des mécanismes de subvention, afin d' assurer, pour tous, un accès réel à une alimentation saine, suffisante et équilibrée. L'accent est à mettre sur la collecte et la diffusion d'informations et sur des statistiques agricoles allant des phénomènes d'observation de changement climatique à l'analyse des modes de production, de consommation et de leurs impacts divers : santé publique, caisse de compensation... Par ailleurs, pour répondre au besoin pressant de souveraineté alimentaire, l'agriculture nationale devra réaliser un saut qualitatif important en matière de progrès technique et d'organisation. Ce progrès est fortement conditionné par le niveau des investissements consentis au profit de la recherche et développement et par les innovations qui peuvent en découler, spécialement pour la prise en charge des risques liés au changement climatique. En outre, la mise en cohérence du secteur agricole avec le secteur industriel est fondamentale, par l'encouragement de rapprochements et de synergies entre les deux secteurs. Cette approche mieux raisonnée de l'agriculture permettra de prendre les décisions à long terme dont dépendent notre environnement et sa pérennité. Elle nous favorisera, de surcroît, l'assurance d'un équilibre vital entre nos demandes en alimentation, en eau et en énergie, tout en nous préservant face aux changements climatiques, aux fluctuations des marchés et aux bouleversements socio- économiques qui peuvent en découler.