La surcapacité de production d'acier dans le monde ainsi que «l'agressivité» de la Chine ont entraîné vers le bas les marges des opérateurs y compris marocains. Sonasid s'attend à un résultat net déficitaire alors qu'elle venait de renouer avec le bénéfice en 2014. La concurrence chinoise est de plus en plus rude dans le secteur de la sidérurgie dans le monde. Pire encore, elle s'invite sur le marché marocain. Conséquence ? Sonasid accuse une baisse de son chiffre d'affaires de 17% et s'attend à afficher un résultat net déficitaire pour 2015, alors qu'elle avait rompu avec le déficit en 2014. À l'origine de cette contraction des mutations que connaît le marché de l'acier à l'international. En effet, la surcapacité de production de la Chine s'est ajoutée à celle européenne, entraînant une baisse importante des prix de l'acier sur le marché international et une pression sur le marché local. Parallèlement, la chute continue des prix du minerai de fer a donné un avantage important à la filière haut fourneau. Face à ces mutations, plusieurs pays ont accéléré les mécanismes de protections tarifaires, notamment en Turquie, en Egypte, en Russie, aux Etats-Unis ou encore en Australie. Ces mesures ainsi adoptées ont diminué les opportunités d'exportation et ont fait du Maroc une destination privilégiée des exportations européennes en dépit de l'instauration de mesures de sauvegarde, renouvelées pour trois autres années depuis janvier 2016. D'ailleurs, le pays a connu l'entrée d'1 million de tonnes d'acier. Cette concurrence accrue s'est davantage «prononcée au quatrième trimestre, notamment en novembre où l'on a assisté à une entrée importante des produits à très bas prix», souligne Mohamed Ali Kabbadj, directeur général de Sonasid, qui a également exprimé le souhait que le Maroc adopte à son tour des mesures de protections tarifaires, dites aussi mesures anti-dumping. Le poids de la Chine La Chine dispose, en effet, de 300 millions de tonnes de surcapacités de production d'acier, sur une production de 800 millions de tonnes. Celles-ci s'ajoutent à la capacité européenne, qui s'élève à 150 millions de tonnes et celle des Etats-Unis à 120 millions de tonnes. Cette situation de surcapacité s'explique par le fait que les Chinois ont tablé sur une base de croissance de 10% et que depuis 1 an, l'économie chinoise est à l'arrêt dans l'acier. De ce fait, une partie de la production d'acier ne trouve pas d'utilisateur sur le marché. Pis encore, la Chine subventionne les billettes à béton pour mieux écouler le surplus. À cause de la situation en Chine (faible demande) et dans les pays de la CEI (chute du prix du pétrole), les prix de la billette sont toujours au plus bas. Les spread aussi. Ainsi, en un an, le prix du minerai de fer a encore baissé de 15 euros la tonne et celui de la ferraille de 52 euros la tonne, une baisse insuffisante étant donné que la filière haut fourneau a réduit son spread minerai de fer contre billette de 84 euros la tonne, alors que la filière électrique n'a réduit son spread que de 47 euros la tonne. «Ce qui signifie que la filière haut fourneau a encore baissé sa marge», explique Kabbadj. Seuls les lamineurs ont conservé leur spread billette contre rebar à environ 35 euros la tonne, ce qui reste très faible, le niveau normatif étant de 65 euros la tonne. Les lamineurs turcs ont amélioré leur spread billette contre rebar de 6 euros la tonne passant de 54 à 60 euros la tonne en un an. Baisse non répercutée Au Maroc, la baisse des matières premières n'a pas suivi le même trend. Selon le directeur général de Sonasid, «la ferraille n'a pas baissé à la même vitesse, ce qui a posé un problème pour l'acierie mais aussi pour les ferrailleurs. D'ailleurs, on a eu avec eux quelques ratés parce qu'on n'a pas pu suivre la baisse à l'international. Cette situation fait que la filiale ferraille au Maroc n'est plus compétitive». Avec ce faible repli des prix de la ferraille marocaine, la marge sur consommation de ferraille en dirham par tonne s'est vue dégrader, passant de -7% à -15%. Afin de mieux y faire face, Sonasid a cherché à davantage maîtriser ses coûts variables. D'ailleurs, le sidérurgiste a réduit son coût variable réel de 21% face à la résistance des coûts de l'énergie (fuel et électricité) qui n'ont pu être réduit que de 5%. Les coûts fixes pour leur part, ont été réduits d'1%. La recette Sonasid Dans le but de mieux gérer cette situation et rétablir les bénéfices de Sonasid, retrouvés en 2014, le sidérurgiste entend continuer l'optimisation de la gestion des stocks. Selon Kabbajd, les stocks coûtent chers à Sonasid, qu'ils s'agissent de stocks de ferrailles, de billettes ou encore de produits finis. «Nous adoptons des mesures drastiques pour les réduire», précise le directeur général. Par ailleurs, pour assurer ses ressources en matières premières, il est question de restructurer la filière de la ferraille, notamment la manière dont est collectée la ferraille qui compte trop d'intermédiaires, tout en n'assurant que 50% des besoins de Sonasid. L'idée est de faire basculer 7.000 chiffonniers parmi les 14.000 que compte le secteur de l'informel vers le formel via le statut d'auto-entrepreneur. Par ailleurs, pour s'assurer davantage de ferraille, le sidérurgiste envisage de créer une activité de démantèlement de navires pour pérenniser la production d'acier. La société compte aussi étendre le modèle de sa filiale de distribution, Sonasid Distribution, en adressant directement les segments de marché important et plus précisément le marché de l'auto construction. La société envisage aussi de diversifier son bouquet énergétique pour sécuriser une énergie à moindre coût et tirer profit des relais de croissance comme les dérivés applicatifs de l'acier, l'armature ou encore la distribution de matériaux de construction.