« Vous êtes victimes de violence physique ou morale, vous avez peur d'en parler autour de vous ? Vous ne savez pas à qui parler ? Venez en parler avant de ne plus pouvoir le faire ». Tel est l'appel lancé par les centres d'écoute mis à la disposition de chaque femme victime de violence. Pourquoi les avoir créés ? Réunis dans le réseau Anaruz (espoir en berbère) depuis 2004, les centres d'écoute accueillent les femmes victimes de violence, en leur proposant une assistance, tant psychologique que juridique. Ils permettent d'uniformiser les outils de travail utilisés au niveau des centres. Tout d'abord, il faut composer un numéro vert, le 0 8 000 8888, introduit depuis 2004 par le ministère du Développement social. Ce numéro, au-delà de sa gratuité, permet au centre d'écoute national de recenser l'ensemble des affaires. « Dès qu'une victime nous contacte, elle est orientée vers le centre d'écoute le plus proche de l'endroit où elle se trouve », apprend-on auprès des responsables du centre concerné. « Elle est accueillie par une spécialiste, qui a suivi une formation dans l'écoute des femmes victimes de violence. Si elle a subi de graves blessures, elle est dirigée vers l'hôpital le plus proche », explique Naïma Rabbaa, directrice du centre d'écoute Basma à Sidi Bernoussi.La réconciliation avant tout Des centres, pourquoi faire? Ces centres jouent avant tout un rôle de médiateur. « L'objectif de notre centre d'écoute n'est pas d'intenter automatiquement une action en justice. Nous essayons d'écouter à la fois la femme violentée et son conjoint. Il faut penser aux conséquences terribles que pourraient avoir un divorce sur la femme (surtout si elle est analphabète et ne travaille pas) et sur ses enfants », ajoute la même source. Lorsque le recours à la justice représente l'unique issue finale, des avocats sont là, pour défendre les droits des femmes victimes de violence.Par ailleurs, nous apprenons que la violence la plus « en vogue » est la psychologique, et non pas la physique. Il est plus facile d'insulter que de frapper, et les risques d'être condamné sont quasiment nuls, lorsqu'on connaît le vide juridique sur ce type de violence. En effet, si des évolutions ont été enregistrées à ce niveau (cf. article de droite), dans les faits, la criminalisation de la violence, reste encore au stade théorique. Chez la police et dans les tribunaux, la légèreté de l'application des lois laisse à désirer, et décourage de plus en plus les victimes. À cela s'ajoutent des facteurs d'ordre socioculturel, qu'aucune loi ne réussit à effacer. La violence en chiffres Au Maroc, les chiffres officiels sur la violence conjugale font cruellement défaut. Les seules statistiques disponibles proviennent des associations féminines et des centres d'écoute. Il en découle que les femmes mariées sont plus exposées à la violence que les divorcées, commise le plus souvent par le mari. Autre information, c'est la violence psychologique qui vient en tête des cas recensés. Il s'agit notamment l'insulte et l'humiliation pour les femmes mariées, suivie par la violence physique, la presque totalité des cas (98 %), consistant en des coups et blessures. Les femmes âgées de 18 à 24 ans sont plus touchées par la violence. En 2008, le nombre des cas a atteint 14 617 dont 80% liés à la violence conjugale. Dans le monde, au moins une femme sur trois a été battue, contrainte d'avoir des rapports sexuels, ou a subi d'autres formes de sévices au cours de sa vie. La violence est la principale cause de décès ou d'incapacité pour les femmes âgées de 15 à 44 ans.