De nouveaux changements interviennent en faveur du capital investissement au Maroc. Des perspectives d'évolution encourageantes se présentent. Analyse. Le capital investissement est bien parti pour prendre une place de choix dans le financement de l'économie marocaine. Ce sont en tout cas les propos des professionnels du secteur. Alors que la Bourse de Casablanca affiche une contreperformance en 2012 entraînant l'abstinence des investisseurs à aller sur ce marché, l'industrie marocaine du capital investissement s'est caractérisée par une forte croissance de la collecte de fonds depuis 2011, témoignant de la confiance des investisseurs et plus particulièrement des organismes de développement internationaux dont émanent 52% des capitaux levés. Le choix de ces derniers n'est pas fortuit. Il suffit d'observer les réalisations des sociétés de capital investissement pour s'en rendre compte. À titre d'exemple, le TRI (Taux de rendement interne) brut moyen par sorties des entreprises investies par le capital Investissement se situe aujourd'hui à 14% lorsqu'il s'agit du capital développement et à 28% pour le capital transmission. De l'autre côté, la Bourse n'a fait qu'essuyer les pertes depuis 2011. De nouveaux fonds arrivent. En outre, le taux de croissance annuel du chiffre d'affaires et des effectifs des entreprises investies par le capital investissement à fin 2012 est respectivement de 16,41 et 9%. L'impact économique du capital investissement est donc indéniable. On note également une évolution impressionnante de la RSE dès la prise de participation dans les entreprises investies, ainsi qu'une amélioration drastique de la gouvernance. 100% des sociétés investies sont auditées, 99% disposent d'outils de reporting, 98% ont mis en place des indicateurs de performance et une politique de définition et de suivi des budgets. «Le capital investissement est en croissance au Maroc. Il y a de nouveaux fonds qui arrivent. Il y a aussi une opportunité parce que le marché boursier au Maroc est en crise», nous confie Brahim El Jaï, PDG de Maroc Invest et Président de l'Association marocaines des investisseurs en Capital (AMIC); avant d'ajouter «les entreprises s'orientent de plus en plus vers le capital investissement car elles ont besoin d'avoir dans leur actionnariat des fonds qui les accompagnent financièrement et au-delà» et pour cause. Le rôle du capital investissement ne se limite pas uniquement à un appui financier, il s'agit également d'un accélérateur de développement et d'un partenaire en création de valeur. Le capital investissement est donc bien parti pour prendre une place de choix dans le financement de l'économie marocaine. C'est même là l'unique condition pour disposer d'entreprises performantes sur le plan commercial, financier, de l'étique et de la bonne gouvernance. Quelles sont donc les entreprises qui susciteront l'intérêt du capital investissement ? Pour le PDG de Maroc Invest, les secteurs de la construction et des matériaux de construction présentent de bonnes opportunités. «Même s'ils sont en crise aujourd'hui, ce sont des secteurs qui vont continuer à croître dans l'avenir», souligne Brahim El Jaï. Pour ce dernier, le secteur des services présente également un bon potentiel pour les investisseurs. La numérisation est en train de prendre une grande ampleur au Maroc. Le secteur du e-commerce mérite toute l'attention. «Nous avons de belles entreprises dans le secteur des nouvelles technologies et il reste également des choses à faire dans le secteur de l'agroalimentaire», ajoute El Jaï. Dans une interview accordée au journal Les ECO, Hassan Laaziri, Administrateur Directeur Général de CDG Capital Private Equity, explique de son côté que les secteurs qui offrent un fort potentiel de rentabilité sont principalement ceux considérés comme les nouveaux Métiers Mondiaux du Maroc (Offshoring, agro-industrie, automobile...) et plus généralement tout secteur à vocation exportatrice. «Parallèlement au potentiel de chaque secteur, nous accordons une grande importance à la qualité du management des sociétés ciblées dans chaque secteur. La compétence et l'expérience du management des projets investis sont à l'origine de la majorité des sucess stories de l'industrie du capital investissement», précise Laaziri. En manque d'un cadre réglementaire Concernant les régions phare pour le capital investissement, le Maroc occupe la première place pour la simple raison qu'il présente beaucoup d'opportunités, selon les professionnels. «Le Maroc est aussi le marché le plus sophistiqué de la région. Celui où il y a le plus d'outils complémentaires au capital investissement, notamment le LBO, en raison de la réactivité des banques», explique le président de l'AMIC avant d'arguer, «notre petit point faible reste le cadre réglementaire que nous sommes en train de travailler». Au niveau continental, «les régions les plus attractives sont l'Afrique du Nord et l'Afrique de l'Ouest», dévoile de son côté l'Administrateur Directeur Général de CDG Capital Private Equity. S'agissant de l'Afrique de l'Ouest, la région dispose d'un potentiel de croissance important qui a poussé les principaux groupes bancaires marocains à y implanter progressivement leurs opérations. «Cette présence régionale des banques constitue une opportunité pour les opérateurs du capital investissement qui sont à la recherche de compléments de financements pour certains investissements directs et ont besoin de relais d'information fiables sur les opportunités d'investissement», précise Laaziri. Par ailleurs, les opérateurs marocains du capital investissement devraient profiter de l'appétit de certains groupes industriels nationaux pour l'Afrique de l'Ouest, pour co-investir et accompagner les entrepreneurs marocains dans leurs projets d'expansion dans cette région. Ainsi, les secteurs qui reviennent souvent dans le palmarès des secteurs investis par le capital Investissement sont, l'agro-industrie, l'infrastructure, le transport et les nouvelles technologies. On peut en conclure que les secteurs qui sont appuyés par des stratégies publiques de développement (Plan Maroc Vert, Vision 2020 du Tourisme, Maroc Numéric, etc) sont les plus investis par ces sociétés. Brahim El Jaï, PDG de MarocInvest du groupe AfricInvest-TunInvest et Président de l'Association marocaine des investisseurs en Capital (AMIC). «Le Maroc est le marché le plus sophistiqué de la région» Le capital investissement est en croissance au Maroc. L'association marocaine des investisseurs en capital travaille à la mise en place de nouvelle loi visant à créer un véritable cadre juridique et fiscal pour le private equity. Les ECO : Comment se comporte le capital investissement au Maroc ? Brahim El Jaï : Le capital investissement est en croissance au Maroc. Il y a de nouveaux fonds qui arrivent. Nous-mêmes, nous avons levé des fonds et d'autres l'ont fait aussi. Il y a aussi une opportunité parce que le marché boursier au Maroc est en crise. Les gens s'orientent donc vers le capital investissement. Les entreprises ont besoin d'avoir dans leur actionnariat des fonds qui les accompagnent financièrement et au-delà. Aujourd'hui, quand on introduit une société en Bourse, on se rend compte après qu'il y a encore du travail à faire au niveau de celle-ci. Quels sont les secteurs qui sont investis par votre groupe ? Nous sommes dans la mode avec Marwa, dans la pièce automobile, dans la logistique, la pharmacie, la monétique, la distribution informatique, le bois et l'agroalimentaire. La stratégie d'investissement est présentée par le gestionnaire. Elle est ensuite validée par les investisseurs. Notre stratégie traduit une vision des opportunités qu'offre le marché marocain que nous percevons. Quels sont les autres pays dans lesquels vous êtes présent ? Nous sommes sur l'Afrique du Nord et l'Afrique subsaharienne. Nous avons trois bureaux en Afrique du Nord notamment à Casablanca, Alger et Tunis où se trouve le siège du groupe. Nous avons également trois autres bureaux en Afrique subsaharienne. Il s'agit d'un premier bureau à Abidjan, d'un second à Lagos pour les opérations au Niger et régions et un dernier bureau à Nairobi. Quelle est la part des investissements qui est dédiée par votre groupe au Maroc ? Pour notre groupe, le Maroc va représenter en fin d'année une centaine de millions d'euros. Ce dernier concentre, en effet, une part importante de nos investissements qui se situe entre 20 et 25%. Cela fait 13 ans que nous investissons au Maroc. D'ailleurs, il a été la première expérience internationale du groupe. Ce n'est pas un hasard. Le royaume présente beaucoup d'opportunités pour les investisseurs. Les secteurs de la construction et des matériaux de construction présentent de bonnes opportunités. Même s'ils sont en crise aujourd'hui, ce sont des secteurs qui vont continuer à croître dans l'avenir. Le secteur des services présente également un bon potentiel pour les investisseurs. La numérisation est en train de prendre une grande ampleur au Maroc. Le secteur du e-commerce mérite toute l'attention. Nous avons de belles entreprises dans le secteur des nouvelles technologies. Il reste également des choses à faire dans le secteur de l'agroalimentaire. Le secteur pharmaceutique a fait ses preuves. Généralement quand nous regardons les différents secteurs au Maroc, nous trouvons de bonnes entreprises dans chaque secteur. L'essentiel est de choisir le bon cheval et de l'accompagner pour qu'il aille plus vite et plus loin. Comment se comporte le secteur marocain du capital investissement par rapport aux autres pays de la région ? Le Maroc est le marché le plus sophistiqué de la région. Celui où il y a le plus d'outils complémentaires au capital investissement, notamment le LBO, qui n'existe pas dans d'autres pays de la région. Cette situation est due au faite que les banques au Maroc sont très réactives. Ces dernières sont de véritables partenaires du capital investissement. Notre petit point faible reste le cadre réglementaire que nous sommes en train de travailler. Les autorités sont aujourd'hui conscientes de l'importance du capital investissement. C'est pour cette raison que cette loi a été soutenue au niveau des instances administratives et nous espérons qu'elle sera bientôt votée. Que fait l'AMIC pour accompagner les sociétés du capital investissement ? Sur le volet légal, l'AMIC essaie de pousser la mise en place de la nouvelle loi qui va créer un véritable cadre juridique et fiscal pour le private equity. Un cadre qui peut se comparer à ce qui se fait dans d'autres pays. Nous faisons également beaucoup de communication pour vulgariser le capital investissement auprès des chefs d'entreprise. Nous faisons des démarches auprès des banquiers pour dire que nous ne sommes pas du tout des concurrents, mais au contraire des instruments complémentaires. La banque reste le premier partenaire financier de l'entreprise. Le capital investissement, lui, apporte de la sécurité, de la transparence et du management. Nous avons finalement aujourd'hui un accueil très positif de la part des banquiers. L'AMIC fait également en sorte que la profession reste visible. Nous participons donc à des événements au niveaux national et international pour promouvoir le secteur du capital investissement et attirer de nouveaux capitaux. Enfin, l'AMIC intervient dans la formation des professionnels du secteur du capital investissement, mais pas seulement car certaines formations s'adressent également à un public certes spécialisé mais plus large, tels que les directeurs financiers, les analystes, les juristes... Quelles sont donc les perspectives du secteur ? 2013 se présente plutôt bien. Mais cela est un travail qui a débuté il y a quelques années et à la suite duquel nous récoltons aujourd'hui les fruits. Nous restons également très optimistes pour les secteurs du capital investissement pour les années à venir.