Brahim El Jaï PDG de Maroc Invest Une caravance sera bientôt organisée par l'Association marocaine des investisseurs en capital (AMIC) pour sensibiliser les entreprises aux avantages d'une participation à un fonds de capital investissement. D'ailleurs, dans les deux prochaines années, le montant investi au Maroc se situerait entre 1,5 et 2 MMDH. Les ECO : En quoi consiste l'activité de Maroc Invest au Maroc ? Brahim El Jaï : Nous sommes présents depuis l'an 2000. Nous avons démarré avec un fonds baptisé Maghreb Private Equity Fund, qui était le premier fond de private equity pour le Maghreb. Ce fonds était principalement destiné au Maroc, 70% au secteur privé marocain contre 15% en Algérie et 15% en Tunisie. Aujourd'hui, Maroc Invest compte une participation dans onze entreprises. Maroc Invest a d'ailleurs été le précurseur dans les opérations d'acquisitions majoritaires. Nous avons réalisé cette opération avec S2M. Ce fonds ayant bien fonctionné, nous avons décidé d'aller plus loin sur le continent en nous lançant en Afrique subsaharienne avec un premier fonds baptisé Afric Invest. Comment sont organisés les différents fonds de l'association ? Le montant investi au Maroc avoisine aujourd'hui le milliard de DH . Il devrait, après investissement des fonds locatifs, se situer entre les 1,5 milliard de DH et 2 milliards de DH dans les deux prochaines années. Pour le Maroc, en 2012, un fonds s'est ajouté à la liste. PME croissance fait partie des fonds publics privés. L'idée était de promouvoir des fonds publics-privés. Nous avons alors participé à l'appel d'offres pour monter et gérer un des deux fonds. PME croissance est aujourd'hui d'une taille de 452 MDH. Il est constitué de bailleurs de fonds locaux, internationaux et de l'Etat marocain et est destiné aux entreprises qui réalisent moins de 100 MDH de CA. Quel bilan faites-vous aujourd'hui des activités du fonds PME croissance ? Ce fonds a démarré il y a une année. Nous avons finalisé deux investissements et deux autres qui sont en cours de décaissement. Il faut rappeler que ce fonds est exclusivement destiné aux PME, tandis que le fonds MPEF3, d'une taille de 120 millions d'euros est destiné aux entreprises de tailles intermédiaires. Pour résumer, je pense que nous avons aujourd'hui une offre qui couvre une majeure partie du tissu économique PME marocain. Quelle approche adoptez-vous ? Notre approche est une approche généraliste. Nous nous intéressons à tous les secteurs, à l'exception des secteurs spéculatifs, avec notamment le secteur immobilier, qui est exclu de nos activités. Nous avons réalisé jusqu'à présent deux introductions en Bourse, celle de Matel PC devenue Disway et celle de S2M. Nous avons aussi une troisième structure qui n'est pas encore décidée pour aller en Bourse, mais qui a tout à fait les capacités de coller au profil d'entreprises qui y sont introduites. Nous avons fait des sorties stratégiques, et ce, avec des opérateurs étrangers et avec des opérateurs intéressés par la reprise de projets au Maroc. Nous avons aussi contribué à l'intégration des dirigeants dans le capital des entreprises. Nous avons, à chaque refus d'opération d'acquisition majoritaire, mis en place un plan qui permet aux principaux dirigeants de devenir des actionnaires significatifs des entreprises dans lesquelles ils travaillent. S2M en est un bon exemple puisque ses dirigeants ont pu acquérir 25% des parts. Quels sont les critères de sélection qui doivent être remplis par les entreprises désirant faire appel à Maroc Invest ? Il y a plusieurs critères. Le premier est l'équipe dirigeante. Si nous considérons que l'équipe dirigeante présente la capacité et le degré de motivation pour développer l'entreprise, nous nous y intéressons. Il faut également que cette entreprise intervienne sur un marché qui présente un potentiel de croissance. Parfois, nous avons souvent buté sur des cas d'entreprises qui ont atteint la saturation en termes de développement. Toujours en termes de critères, celui de la transparence n'est pas un pré-requis impératif. Si l'entreprise ne présente pas forcément un modèle de transparence et présente la volonté de le mettre en place, nous envisageons de l'accompagner dans ce processus. Pour ce faire, nous assurons avec elle un travail de mise à niveau. Sur le volet technique, comment s'opère la collaboration entre le fonds et l'entreprise ? En ce qui concerne les coûts. Cela ne coûte rien au chef d'entreprise jusqu'à un certain niveau. Des équipes en interne étudient le contexte, font le montage d'un dossier initial. Une fois l'opportunité validée, nous démarrons les pourparlers sur les conditions d'entrée. Après accord, ce dernier est formalisé dans une lettre d'intention. Jusqu'à ce stade, il n'y a absolument pas de coût. Après signature, le processus d'investissement comprend un audit réalisé dans l'entreprise. Dans ce cas, nous essayons de trouver une formule de partage des frais ou une formule dans laquelle l'ensemble des frais sont pris en charge par le fonds, avec ensuite une facturation réalisée ultérieurement. Si nous considérons qu'il existe des zones de risques sur l'investissement, nous essayons de trouver un accord avec le chef d'entreprise de façon à partager une partie des frais d'audit. Y a-t-il du répondant auprès des PME ? Il y a deux catégories de chefs d'entreprise. La nouvelle génération d'entrepreneurs souvent est intéressée par le private equity et le capital investissement. Auprès de l'ancienne génération, il y a tout de même une réticence avec une légère évolution. Les banques encouragent aujourd'hui les entrepreneurs à aller vers le capital investissement dans la mesure où ceci peut les sécuriser parce qu'il y a un nouvel entrant qui apporte de nouveaux fonds et solidifie les comptes de l'entreprise. Quelles sont les contraintes d'évolution de cette activité ? Les attentes en matière d'évolution de la part des entrepreneurs sont encore relativement élevées par rapport aux réalités économiques. Je dois dire qu'aujourd'hui, il est plus facile de faire de meilleures affaires en France qu'au Maroc. La crise est plus violente en Europe et les opérations de valorisation d'entreprises sont plus nombreuses. Tandis qu'au Maroc, les entreprises ont une capacité de résistante bien plus importante. Ceci sans oublier également l'aspect culturel qui fait que l'indépendance économique que recherche l'entrepreneur est encore bien ancrée. Nous continuons de faire des efforts au niveau de l'association par le biais notamment d'une caravane qui sera bientôt organisée. Il est vrai qu'il y a un clivage entre Casablanca et le reste du royaume. Le potentiel des PME régionales est indéniable et nous devons déployer un effort de sensibilisation, notamment vis-à-vis des contraintes que la participation d'un fonds implique.