Le Conseil de gouvernement vient d'approuver le projet de loi n°05-14 modifiant la loi n°33-06 relative à la titrisation des actifs. Le cadre juridique des sukuk commence à prendre forme au Maroc. En effet, le Conseil de gouvernement vient d'approuver le projet de loi n°05-14 modifiant la loi n°33-06 relative à la titrisation des actifs. Rappelons que ce projet présenté par le ministre délégué auprès du ministre de l'Economie et des finances chargé du Budget, modifie et compète sept articles de la loi 33.06, principalement en vue de les rendre plus en phase avec les dispositions du projet relatif aux établissements de crédit et organismes assimilés, qui réglemente la finance islamique et qui, pour rappel, a également été adopté par le même conseil jeudi. Subordonné à l'avis des Ouléma L'article 7-1 de la loi, lui, stipule que les caractéristiques techniques des certificats de sukuk destinés à être placés auprès d'investisseurs résidents ainsi que les modalités de leur émission sont fixées par voie réglementaire après avis conforme du «Conseil supérieur des Ouléma», qui remplace le «Comité charia pour la finance». Ainsi, toute émission de certificats de sukuk est dorénavant subordonnée à l'avis conforme du conseil des Ouléma. L'objectif visé par le législateur à travers cette loi consiste à faciliter le placement des certificats de sukuk au Maroc et à limiter le risque de contestations reposant sur des interprétations divergentes, qui pourraient naître de plusieurs sharia boards privés, comme cela est parfois le cas dans le cadre de sukuk internationaux. En revanche, signalons que lorsque les certificats de sukuk seront placés auprès d'investisseurs internationaux, un ou plusieurs sharia boards compétents pourront également être désignés conformément aux pratiques actuelles de marché. Pour mémoire, conformément à la dernière version des règles de l'Accounting and Auditing Organisation for Islamic Financial Institutions (AAOIFI), les certificats de sukuk sont définis comme étant des titres représentatifs d'un droit de jouissance indivis de chaque porteur sur des actifs éligibles, acquis ou devant être acquis ou des investissements réalisés ou devant être réalisés par l'émetteur de ces titres. Le Maroc a tout à gagner à activer ce chantier. En effet, le montant global de l'épargne échappant à la banque conventionnelle et qui devrait être mobilisé par les instruments de finance islamique, notamment les sukuk est estimé par les professionnels à 80 MMDH. 90% des émetteurs envisagent les Sukuk En parallèle, une demande croissante pour le financement à travers les instruments islamiques émane des acteurs économiques. En effet, selon une étude du Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM), près de 90% des émetteurs sur le marché marocain envisagent d'émettre des sukuk. Ce n'est pas pour rien que l'offre et la demande sont aussi présentes. Les instruments financiers islamiques présentent plusieurs avantages. Dans un contexte économique où l'assèchement des liquidités se fait de plus en plus sentir sur le marché monétaire, les instruments de financement islamique sont devenus les instruments par excellence de nombreuses banques commerciales et d'acteurs économiques (institutions et grandes entreprises) pour lever des capitaux ou financer leurs projets. Ces instruments permettent à l'Etat comme à l'entreprise une diversification des sources de financement. Ils assurent un développement de l'économie réelle, en raison de la tangibilité des sous-jacents auxquels sont adossés les financements, ce qui permettrait dans le cas du Maroc de relancer l'investissement. Il s'agit d'un financement non inflationniste, car il n'y a aucun recours aux taux d'intérêts. De plus, ils procurent une meilleure gestion des risques, grâce à la mutualisation des pertes. En définitive, grâce à leurs caractéristiques spécifiques, à savoir la transparence des contrats, la tangibilité des actifs, la disponibilité des liquidités, les instruments de financement islamiques ont réussi à mieux faire face à la crise financière internationale. Ces atouts leur ont permis d'afficher depuis quelques années un développement important, en particulier en ce qui concerne les émissions de sukuk. Alors qu'elles se chiffraient à 80 MMUSD sur le marché mondial en 2011, les émissions de sukuk ont pesé plus de 131 MMUSD en 2012.