L'artiste peintre Aziza El Kadiri expose ses récentes œuvres sur le thème «Affection et harmonie» à Nobl'ys Gallery, à Rabat, depuis le 31 janvier jusqu'au 16 février. L'occasion de présenter son premier recueil de poésie : «Ma liberté». Comme une évidence, Aziza El Kadiri peint et écrit avec affection, harmonie et liberté. La sociologue et enseignante donne pendant plusieurs années et se sent l'envie d'évacuer des envies, des angoisses, des rêves, un idéal à travers la peinture et la poésie. Elle expose ses œuvres depuis le 31 janvier, à Nobl'ys Gallery à Rabat. «Bien avant la peinture, je ressentais que je pouvais créer quelque chose. La peinture est venu à ce moment, à un moment très difficile parce que c'est après la perte d'êtres chers. Une sorte de soupape pour dépasser des problèmes d'angoisse. Je suis donc allée à la recherche de la peinture alors que j'ai été happée par l'écriture, c'est elle qui est venue me chercher. Je ne sais pas comment ! Au début, je pensais que je pouvais écrire un roman sur ma vie par exemple, mais je n'ai jamais pensé à la poésie bien que j'aie baigné dans une ambiance de grands poètes français depuis toujours», explique l'artiste, titulaire d'un DEA à l'université des sciences humaines de Strasbourg, mais rattrapée très vite par sa passion pour l'art il y a 4 ans. Une passion qui a toujours sommeillé en elle et qui devient un besoin une sortie d'exécutoire, après la perte d'êtres chers. «Il fallait que quelque chose sorte. Après la disparition d'un frère et d'un neveu, j'ai ressenti le besoin de m'exprimer. La peinture m'a sauvée», continue Aziza El Kadiri, qui a toujours écouté son cœur, imprégnée par l'amour d'une famille nombreuse qui l'a toujours guidée dans ses choix de vie. «J'ai eu une vie heureuse, bien entourée avec des parents extraordinaires et 7 frères et sœurs. J'ai perdu mon père à 5 ans et c'est ma mère qui nous a éduqués et j'ai eu la chance d'avoir deux grands frères qui m'ont pris en charge, soutenue, encadrée...Il a toujours fallu plaire : à ma mère, mes frères, mes maîtres, mes professeurs, mon mari et à mes enfants. À un moment, on se dit qu'il faut se libérer et être soi-même. Libre de dire oui ou de dire non. Ma liberté c'est d'être moi-même». Et c'est tout à fait à l'image de son travail sur les couleurs et l'abstraction. Cette passionnée de couleurs et de lumière vit la vie à pleine dents. C'est une femme qui s'assume: «Je ne comprends pas les femmes qui disent qu'elles n'ont pas le temps. Ce n'est pas vrai. On a toujours le temps de faire ce que l'on aime. Je suis dans un bureau d'études psychologiques, je donne des cours, j'écris, je fais ma peinture tout en m'occupant de ma maison et de mes enfants. L'essentiel, c'est d'aller à la recherche de son bonheur. Il faut aller chercher les choses, acquérir des choses toutes simples : sortir dans le jardin, trouver les jambes pour se lever le matin, toucher la joue d'un enfant, regarder un tableau, des bonheurs simples, car il y a de très belles choses dans la vie...Il ne faut pas se compliquer l'existence. Il faut mettre de côté les gens compliqués, ne pas cesser de donner et de partager l'amour, l'affection...C'est quelque chose de très présent dans mon écriture. J'ai reçu beaucoup d'amour et j'essaie de le transmettre», confie celle qui ne cesse de donner et qui se voit recevoir en guise de récompense à un travail acharné et plein de passion, le prix 2013 de peinture par l'Académie européenne des arts. C'est à ce moment là, encouragée par l'académie, que la peintre lit son premier poème devant son public. Un déclic qui va la lancer sur un recueil de vie, de tranche de moments passés où la famille est omniprésente, où on la suit dans ses voyages, dans son intimité, dans ses pensées les plus profondes. «Dans la poésie, je ne fais pas référence à la rythmique, à la métrique. Je suis libre. À mon avis, lorsque l'on veut exprimer des sentiments, il ne faut pas calculer. Aussi bien dans la peinture que dans l'écriture, j'accouche de ce que je ressens, en toute liberté». Une façon à elle de se mettre à nu, car Aziza El Kadiri est entière et cela se voit. «Devant une toile ou un papier pour écrire, je me mets à nu. Je rends hommage à la toile parce qu'elle est la seule à me connaître vraiment...Elle subit les états d'âme. La poésie, c'est la même chose, elle est chantante. Elle a cette force extraordinaire, car vous pouvez vous mettre à nu de façon très subtile par la sensibilité, en passant des messages de façon douce». Ces messages sont clairs. Ils sont interprétés de manière différente par tout un chacun à travers la peinture, mais l'écriture fait passer le message et les mots transcendent. Celle qui a mis un an à écrire son recueil s'est arrêtée en pleine création pour sortir les mots. Sur toile, elle utilise les courbes de la femme, du cheval et de la guitare, preuve que la volupté, la noblesse et la musique sont des thèmes qui lui sont chers. La liberté du cheval également, toujours au nombre de 8 fait référence à la famille et aux 8 frères et sœurs. Des courbes lumineuses et colorées qui plongent dans un univers à mi-chemin entre le rêve et le réel, entre l'idéal et la réalité, entre la fascination et l'harmonie. Cette fascination, elle la puise également dans ses voyages, et un en particulier. «Il y a eu un avant la Chine et un après la Chine. J'ai été fascinée et émerveillée, j'ai vu beaucoup de choses dans le regard des Chinois, c'est un grand peuple. Cette fascination est ressortie sans vraiment m'en rendre compte. En peignant, je retrouvais la grande muraille, des ponts, des jardins, des fleurs, beaucoup de subtilité. Cette muraille et cette grandeur. C'est un peuple de génie», se souvient l'artiste avec nostalgie, qui dédie un poème à ce peuple dont elle admire le regard. C'est comme cela que Aziza El Kadiri se promène à travers les couleurs et les mots en chantant et en disant tout le vrai qu'elle porte et qu'elle pense. De ses enfants et petits-enfants, de son enfance à elle, en passant par son métier, ses rencontres ou ses traditions, elle surfe sur sa liberté de pensée. «Transcender le réel, trouver quelque chose de supérieur. La peinture est venue me faire oublier ma condition humaine et me faire retourner vers une autre jeunesse. Je pense donc je suis, je pense donc je vis et toute cette écriture, je voudrais la laisser en héritage à mes enfants et à mes petits-enfants». C'est un héritage harmonieux et paisible qu'elle expose depuis le 31 janvier jusqu'au 16 févier à Nobl'ys Gallery à Rabat, afin de crier haut et fort à qui veut l'entendre : «Vivez votre vie si courte, ce n'est pas un mirage. Voyagez loin avant le grand voyage. Travaillez, cultivez votre jardin et ne soyez pas trop sage. Gagnez en maturité mais vivez votre âge» afin de suivre une philosophie de vie qui serait synonyme de «libérer, fasciner, harmoniser»...