«Je tente d'offrir par la danse, un regard sur cette dualité de la société marocaine. Une dualité qui, pour certains, relève d'une réelle hypocrisie sociale». D'emblée, Taoufiq Izeddiou plante le décor. Lui, c'est le co-fondateur, avec deux danseurs marocains, Bouchra Ouizgen et Saïd Aït El Moumen, de la compagnie de danse contemporaine Anania (égoïste) qui a vu le jour en 2002. Créée par Izeddiou et interprétée par Ahlam Ettamri, Marjorie Moy, Judith Manantenasoa et Hassania Himmi, «Aâtaba» est la dernière création chorégraphique de la troupe Annania. Une troupe surbookée Après une représentation au festival «On Marche» dans la cité ocre, un passage en mars dernier au Théâtre Dionysos en France, une présence remarquable au festival Maqamat à Beyrouth et une grande tournée en Afrique de l'est en septembre dernier, la troupe s'est produite en octobre dernier dans le cadre du festival Moussem à Bruxelles. La tournée européenne d'Anania se poursuit puisque «Aâtaba» sera présentée du 5 au 11 décembre prochain, à l'occasion du Festival Dancing On the Edge aux Pays Bas. Une œuvre contemporaine Quelle identité pour ce dernier né chorégraphique? C'est toujours dans le souci d'une dualité, voire d'une pluralité de genres, sans tomber dans l'imitation de l'Occident, ni dans l'exotisme de l'Orient, que «Aâtaba» forge son identité. A fortiori, pour éviter que les savoirs chorégraphiques ne se heurtent et ne se confrontent, elles sont quatre danseuses marocaines et une française. Une chanteuse orientale boucle le panel. C'est aux sonorités d'une bande son composée d'enregistrement de boîtes de nuit, de voix de chefs africains ou arabes, du son d'une corde amplifiée et de « bendirs», que les belles interprètes testent une ligne obscure. Cette entrée dans des endroits de nuit, généralement souterrains, permet de libérer un peu de la pression sociale. «C'est franchir le seuil des traditions», s'émeut le co-organisateur des rencontres chorégraphiques de Marrakech. Avec «Aâtaba», Taoufiq Izeddiou puise dans les influences de la société, pour créer une œuvre contemporaine marocaine.