À la présidence de Ferrari depuis 23 ans, Luca di Montezemolo cède son fauteuil à Sergio Marchionne, patron de la maison-mère, Fiat Chrysler Automobiles (FCA). Celui-ci promet succès et éternelle italianité pour la marque «au cheval cabré». Tout a basculé le week-end du 6 et 7 septembre. Au terme d'un grand Prix plutôt chaotique pour la Scuderia, Luca Cordero di Montezemolo s'est vu mettre la pression suite aux propos tenus par Sergio Marchionne, l'administrateur du groupe Fiat qui, rappelons-le au passage, détient 90% du capital de Ferrari. Président de la prestigieuse marque au «cavallino rampante» (pour «cheval cabré») depuis 1991, Montezemolo a été critiqué pour les piètres performances sportives de son écurie. Pointé du doigt (verbalement), l'homme a en quelque sorte été mis dos au mur par le patron de Fiat qui a, entre autres, lancé dans la presse : «Les résultats économiques de Montezemolo sont très bons mais dans le cas de Ferrari, un dirigeant doit aussi être évalué sur les résultats sportifs». La guerre des mots Dans les couloirs de la firme turinoise, comme dans les locaux de Maranello, tout le monde sait que, depuis des mois que le courant ne passait plus vraiment entre les deux hommes. Les choses se sont même envenimées ces dernières semaines et les dissensions ont monté d'un ton jusqu'à faire sortir Marchionne de ses gonds à l'issue du dernier GP d'Italie. Celui-ci a sèchement taclé le patron de la Scuderia, comme le souligne un journal italien, rapportant qu'il (Marchionne) aurait notamment déclaré : «cela fait six ans que nous ne gagnons plus. Nous avons les meilleurs pilotes du monde (NDLR : Fernando Alonso et Kimi Räikkönen), nous ne pouvons pas nous permettre de partir de la 4e et de la 6e lignes». Pire encore, l'administrateur délégué de Fiat avait, ce même dimanche, jugé «inacceptable» la performance décevante de la Scuderia en Formule 1. Des mots qui ont trouvé écho auprès de l'intéressé, qui n'aura pas attendu plus de 48 heures pour présenter sa démission. Plusieurs points de divergence Bien avant ce «clash», il y avait bien des dissensions entre les deux hommes. En cause, l'orientation stratégique de Ferrari. À l'inverse de Montezemolo qui estime que Ferrari doit plafonner ses ventes autour de 7.000 bolides par an pour conserver son caractère exclusif, Marchionne estime que la marque au cheval cabré doit, certes, rester un label d'exception, mais tout en relevant le niveau de son plafonnement commercial, histoire de répondre à une demande croissante. Par ailleurs, le grand stratège du groupe Fiat cherche à y intégrer davantage Ferrari et d'une façon assez synergique afin de réaliser une belle percée dans le haut de gamme, à travers les autres marques premium, Alfa Romeo en tête. Malgré tout cela, les deux hommes étaient d'apparence sereins et même espiègles lors d'une conférence de presse tenue la semaine dernière au siège de Ferrari à Maranello. L'occasion pour Marchionne d'évoquer l'avenir du plus prestigieux des constructeurs sportifs. Evacuant toute idée d'«américanisation» de Ferrari en cas de synergie poussée au sein du groupe FCA, l'homme au pullover bleu a notamment martelé : «Ferrari est née et mourra italienne». Puis d'ajouter : «l'idée qu'elle puisse être produite ailleurs qu'ici (à Maranello) est obscène». De quoi rassurer des millions de Ferraristes...Quant à Montezemolo, il ne pouvait qu'être tout sourire. D'une part, suite à ces propos et du fait que la marque qu'il présidait reste entre de bonnes mains. Puis d'autre part et surtout parce que l'ancien n°1 de Ferrari repart avec une indemnité de 27 millions d'euros. Un joli parachute doré qui ne l'empêchera pas de continuer à travailler, mais pour des firmes autres qu'automobiles. Du moins, pas avant mars 2017, comme le stipule une clause de non-concurrence qu'il a ratifié. Certains le disent déjà à la tête d'Alitalia... On verra bien.