«Nous sommes relativement optimistes sur l'avis qui sera émis par la Commission du commerce international». C'est en ces mots qu'Eneko Landaburu, l'ambassadeur de l'Union européenne (UE) à Rabat, nous a livré ses réactions, suite à «l'avis défavorable», donné hier par la Commission agriculture et développement rural du Parlement européen, relatif à l'accord agricole. À peine le prolongement de l'accord de pêche avec l'Union européenne ratifié, que les regards se rivaient déjà sur l'accord agricole. Cette attention portée à ce dossier a pris plus d'ampleur quand la commission agricole au sein de l'Union européenne a annoncé son rejet de ce projet (voir www.lesechos.ma), alors qu'au même moment, Akhannouch passait son grand oral devant une autre commission, celle du commerce international... un oral qui, finalement, laissait entrevoir beaucoup d'espoir quant à la concrétisation de l'accord. En effet, au terme de la séance, sur les neuf députés ayant pris la parole, six se prononçaient favorables à un tel accord, ce qui conforte la position de la partie nationale. Il reste maintenant à savoir ce que vaut le rejet du projet par la commission agricole ? «Pour l'instant, toute conclusion hâtive sur l'aboutissement de cet accord doit être évitée» ajoute Landaburu. À ce niveau, il y a lieu de préciser que le processus d'adoption des différents accords au sein de l'Union européenne ressemble à celui des projets de loi au Maroc. Il commence par la mise à disposition des différentes commissions concernées du projet avant qu'il ne soit soumis au vote. Or, dans le cas de l'accord agricole, c'est bel et bien la commission du commerce internationale, celle qui a justement reçu le ministre marocain, qui devrait voter le projet d'accord en séance plénière et non la commission agricole où le lobbying espagnol fait rage. D'ailleurs, des sources ministérielles nous expliquent que «c'est là la principale raison à ce rejet, les espagnols tentant de préserver leur secteur agricole». Ensuite, pour assurer la concrétisation de cet accord, Aziz Akhannouch n'a pas hésité lors de son grand oral à casser les arguments avancés par la commission agricole pour faire valoir l'intérêt de cet accord pour les deux parties, à commencer par la menace que pourrait représenter un tel accord pour les agriculteurs européens. Selon le ministre marocain, la part de marché des fruits et légumes en provenance du Maroc ne représenterait que 2,5% de la marchandise agricole présente sur les marchés européens. «Il faut également souligner que l'arrivée des produits marocains s'inscrit davantage dans une logique de complémentarité, que ce soit pour les produits ou même pour le calendrier de production et ne peut donc constituer une menace pour les marchés européens», s'est défendu le ministre de l'Agriculture. De plus, le projet d'accord, s'il est adopté, devrait permettre une entrée graduelle des produits marocains, ce qui permettrait d'atténuer un éventuel impact. Par ailleurs, le ministre marocain a rejeté d'un revers de la main l'argument avancé par la commission agricole prétendant que les petits agriculteurs, notamment ceux des régions du Sud, ne profiteraient pas d'un tel accord. Pour ce faire, un aperçu sur la politique agricole nationale, soulignant les objectifs assignés au «Plan Maroc Vert» et sa déclinaison en plans régionaux qui ont à leur tour été négociés avec l'ensemble des conseils régionaux du Royaume, a constitué la principale arme déployée par Akhannouch. Quoiqu'il en soit, si aujourd'hui les arguments avancés par la partie marocaine semblent tenir les deux bouts, la polémique entourant le rejet par la commission agricole de l'accord témoigne que le lobbying espagnol est plus que jamais décidé à saboter cet accord. Akhannouch réussira-t-il à le contrer ? Réponse à la rentrée prochaine avec le vote en plénière du projet. En attendant, le ministre de l'Agriculture devra passer un second oral, «prévu fin août au sein de cette Commission du commerce international», selon Landaburu. «Une audition au terme de laquelle cette commission émettra un avis pour l'assemblée plénière du Parlement européen, qui aura à statuer sur l'approbation de l'accord agricole», précise le diplomate, avant d'ajouter que «c'est donc l'ensemble du Parlement européen, lors d'une session prévue au mois d'octobre prochain, qui conclura le processus».