2015 doit être l'année des restructurations dans le secteur, mais également des grands opérateurs immobiliers en termes de restructuration de la dette et de stratégies immobilières. Détails. L'année 2014 a été difficile pour le secteur de l'immobilier, induisant une augmentation importante des stocks de produits finis invendus des promoteurs et des craintes autour de leur solvabilité. L'année dernière a en effet été marquée par une baisse de 10% de la production de l'habitat, une diminution de 5% des mises en chantiers et une régression de 5,4% de la consommation nationale du ciment, mais également un resserrement des crédits immobiliers, en particulier des crédits aux promoteurs immobiliers (-5,6%) dont l'encours limite sa hausse à 2,7%. Les difficultés rencontrées par le secteur immobilier se recentrent autour de trois facteurs majeurs.«Il s'agit de la solvabilisation de la demande par des fonds de garantie tels que Fogarim et Fogaloge, la non distribution des crédits garantis par certaines banques et le retard dans le remboursement de la TVA», a déclaré Youssef Benmansour, président de la FNPI aux ECO. En tout cas, cette situation a eu pour effet un ralentissement de l'activité du secteur reconnu par la majorité des promoteurs immobiliers. Aussi, les promoteurs cotés ont été sévèrement sanctionnés en Bourse avec une chute depuis début 2014 des cours d'Alliances de 47% contre -16% pour Addoha et -15% pour Dar Saada depuis son introduction en Bourse. La situation alarmante du secteur a même conduit la FNPI à une «réunion de crise» avec le gouvernement en date du 20 février courant pour mettre en œuvre des mesures de relance de la croissance du secteur immobilier. Il a été ainsi décidé la mise en place de nombreux process visant entre autres à assurer le financement du secteur, la promotion de la demande, le renforcement de l'offre d'habitat, l'encouragement des investissements immobiliers et la promotion du secteur locatif immobilier, mais également le renforcement de l'implication des promoteurs immobiliers dans la réalisation des projets d'habitat destinés à la classe moyenne. 2015 serait donc l'année des restructurations dans le secteur, mais également des grands opérateurs immobiliers en termes de stratégie immobilières et plus exactement sur les produits de leurs projets immobiliers. Et parmi les aspects qu'ils seront amenés à revoir figure l'écoulement de leurs stocks sur tous les types de produits afin d'essayer de rassurer le marché immobilier. D'ailleurs, certains promoteurs comme Addoha voire Alliances ont revu leurs business plans pour se concentrer sur le désendettement et la réduction des stocks afin d'éviter un scénario catastrophe. Addoha et son plan «Génération cash» L'inflexion stratégique adoptée par Addoha en début d'année survient en réponse à une importante augmentation de ses stocks de produits finis invendus à près de 17.000 unités fin 2014 contre une norme historique de près de 6.000 unités. Cette situation a notamment résulté d'une politique de production intensive sur ces dernières années, axée sur le maintien du volume des ventes et de livraisons annuelles à près de 25.000 unités et ceci alors même que les taux de commercialisation de certains projets/tranches restaient relativement faibles, particulièrement en dehors de l'axe Casablanca-Rabat. Le nouvelle orientation stratégique qui a été baptisée «Plan génération cash» du groupe consiste désormais en deux axes principaux : Il s'agit tout d'abord de redimensionner à la baisse la taille du groupe en termes de ventes et livraisons annuelles autour de 17.000 à 18.000 unités en réduisant drastiquement sa production (de 25.000 unités historiquement à un rythme annuel moyen de 13.000 unités entre 2015 et 2017) et en axant ses efforts commerciaux sur l'écoulement du stock actuel d'unités invendues. Le groupe compte également optimiser sa capacité de génération de cash flows en abaissant les investissements dans l'acquisition de foncier et ses créances clients. Cette nouvelle politique a déjà été actionnée puisque le groupe immobilier a décidé de ne pas reconduire une tombée de billets de trésorerie de 110MDH qui arrivait à échéance le 19 février et de la rembourser intégralement. Le plan cash management semble donc bien fonctionner puisque, selon des sources bancaires, son encours a baissé et sa trésorerie s'est améliorée. Quand à son stock de logements, il est également en baisse, selon des sources au sein du groupe. Les analystes eux estiment que le plan stratégique 2014-2017 du groupe Addoha induit un profond changement dans le profil de la valeur, qui selon les experts de CFG Group, sera perçue comme une pure valeur de rendement sur les 3 à 4 prochaines années. D'ailleurs, ces derniers estiment que la forte correction subie par le titre depuis cette annonce est injustifiée d'un point de vue fondamental, la valeur traitant actuellement avec une importante décote par rapport à sa valeur intrinsèque qu'ils estiment à 45DH. Alliances, sortie de crise en 4 étapes Le groupe Alliances, qui a publié un profit warning, il y a quelques jours, est également conscient de la nécessité d'aligner son business model à la nouvelle donne conjoncturelle. Le groupe compte procèder à une gestion dynamique de son portefeuille de projets pour s'adapter à la demande et au marché. La stratégie d'Alliances, telle qu'elle a été présentée aux ECO par son management, s'articule ainsi autour de 4 axes importants. «D'abord, nous arrêtons les acquisitions du foncier car nous disposons d'une réserve de 1.500 ha qui équivaut à 8 ou 10 années d'exploitation», nous a confié Younes Sebti, directeur financier et du contrôle de gestion du groupe. Alliances prévoit dans sa stratégie le désinvestissement des actifs non stratégiques. Parmi les actifs qui seront cédés figure le foncier non prioritaire. «Il s'agira du foncier sur lequel nous comptions démarrer des projets dans un horizon de 4 à 5 ans», nous explique le directeur financier du groupe. Ce dernier compte ainsi écouler sur le marché des biens fonciers estimés à 1MMDH lors de leur acquisition à Casablanca, à Mehdia et Marrakech. Alliances compte également mettre le paquet sur le recouvrement. Alliances a pu, grâce à l'effort d'encaissement de créances, récolter près de 2,45MMDH, en hausse de 25% par rapport à 2013», nous a précisé Sebti. Le groupe compte également poursuivre sa politique de désendettement. Les revenus des ventes de biens fonciers permettront d'ailleurs de régler de prochaines échéances du programme de billets de trésorerie d'un cours de 1,48MMDH. Aussi, «nous ne sommes pas dans une logique de levée de la nouvelle dette obligataire et nous allons diminuer nos émissions de billets de trésorerie. Aussi, nous privilégierons le désendettement mécanique par projet», précise le cadre. À cet égard, le pôle résidentiel et golfique, qui n'a démarré ses chantiers qu'en 2010, commencera à générer du cash cette année. Il s'agit notamment de Sindibad, Dar Salam et Clos des pins, trois grands projets dont le démarrage des livraisons est en 2015. De même, Alliances poursuivra la livraison des projets Yakoub El Mansour et les Allées marines. En outre, le pôle habitat social et intermédiaire devrait continuer sur sa lancée, comme nous l'assure le management du groupe. Résidence Dar Saada, pur effet de contagion L'environnement difficile dans lequel évoluent les promoteurs immobiliers a entraîné dans son sillage Résidences Dar Saâda en raison de la méfiance du marché vis-à-vis du secteur. Le très faible taux de sursouscription de la tranche des particuliers dans le cadre de l'IPO de la société n'a rien arrangé à la situation. Ces deux éléments ont ainsi pesé sur le cours dans les semaines ayant suivi la cotation du titre qui a perdu près -15% de sa valeur. À cet égard, seule la publication de résultats annuels 2014 conformes aux business plan communiqué lors de l'IPO est susceptible d'être un catalyseur dans l'évolution du cours de RDS, dans la mesure où celle-ci viendra rassurer les investisseurs sur la capacité de la société à respecter ses prévisions. D'ailleurs, rappelons à ce titre que Résidence Dar Saada a atteint l'ensemble des objectifs fixés dans le business plan 2012-2014 publié lors de l'émission obligataire de 750 MDH en juin 2012. Une hypothèse qui est confirmée par les experts. «Nous estimons ainsi que ce potentiel de hausse significative du cours de RDS devrait progressivement se matérialiser, à mesure qu'une relation de confiance entre le management, la société et les investisseurs s'installera», soulignent les analystes de CFG Group. Ces derniers sont confortés dans leur confiance par la capacité de rebond du cours de la valeur vers un cours cible de 280 DH.