2010, 2012 puis 2014... Retardée à maintes reprises, la fin des bidonvilles à Casablanca est prévue pour 2018. Nabil Benabdellah annonce son plan de bataille pour lutter contre l'habitat insalubre dans la métropole. Les délais de la réalisation du programme : «Ville sans bidonvilles» (VSB) n'en finissent pas d'être prolongés. «Sur les 270.000 familles recensées en 2004, 240.000 ont été relogées au Maroc. 52 villes ont été déclarées VSB sur les 52 visées par ce programme», détaille Nabil Benabdellah, ministre de l'Habitat et de la politique de la ville lors d'une rencontre organisée par les cadres du Parti du progrès et du socialisme (PPS), le 11 février à Casablanca. Témara, Kénitra et Casablanca concentrent l'essentiel des ménages qui restent à reloger. La ville blanche constitue un «cas problématique» de ce programme. VSB devait atteindre ces objectifs en 2014, Benabdellah annonce une prolongation supplémentaire de quatre ans. Trois programmes Le programme VSB a démarré à Casablanca en 2006. Quelque 106.670 familles sont concernées par trois opérations de relogement. La première touche les bidonvilles «historiques» avec le relogement de 60.750 familles pour un montant d'investissement de 6,7MMDH. 100% des 1.942 familles du bidonville de Bachkou ont bénéficié d'un relogement, ainsi que les 11.185 habitants des bidonvilles de Sidi Moumen (Skouila, Thomas et Zaraba). À Carrière centrale, le taux de réalisation est de 90% des 6.211 familles comptabilisées. Le recasement des 5.743 habitants du bidonville de Erhamna à Sidi Moumen a été reporté au programme complémentaire couvrant 2014-2018.Le deuxième programme régional lancé en 2011 visait le relogement de 45.920 familles pour un investissement public de 4,8MMDH. Le taux de réalisation de cette partie est faible. 55,6% de ces familles attendent leur relogement. Pour l'heure, 14.928 ont bénéficié d'un relogement. 25.070 attendent toujours dans le cadre de ce même programme. 5.922 sont reportées pour le programme complémentaire. Ce dernier concerne au total 11.665 familles restantes des programmes 2006 et 2011 avec un investissement de 2,4MMDH. «Les études pour ce troisième programme sont en cours. 6.600 familles ont déjà bénéficié d'un foncier pour leur relogement. Pour le reste, nous sommes toujours à la recherche du foncier», annonce Benabdellah. Le ministre issu du PPS n'a pas manqué de défendre le programme VSB : «Je vous laisse imaginer nos villes sans un programme comme VSB ainsi que les programmes de logement social et de mise à niveau urbaine. Sans ces différentes actions, nous aurions aujourd'hui des villes dominées par l'habitat anarchique». Le danger du menaçant ruine À l'occasion de cette rencontre, le ministre de l'Habitat et de la politique de la ville a présenté les autres différents programmes et réalisations de son département en matière de lutte contre l'habitat insalubre dans la région du Grand Casablanca. En plus de l'éradication des bidonvilles, les constructions menaçant ruine et la réhabilitation du tissu urbain sont les deux priorités pour ce département dans la métropole. S'agissant des constructions menaçant ruine, le ministre a insisté sur le fait que l'intervention de l'actuel gouvernement avait pour but «d'éviter de nouveaux drames». Et de prévenir : «Face à un tissu urbain vieillissant, il faut s'attendre à de nouveaux effondrements». Un premier accord a été signé en 2012 en partenariat entre son département et les partenaires concernés, d'un montant de 1.759 MDH, dont 306MDH mobilisés par le ministère. Cet accord porte sur le relogement de 9.250 familles, elles bénéficient de soutien pour l'acquisition d'un logement social à 250.000DH. Là encore les résultats sont en deçà des attentes. Le premier programme piloté conjointement par Idmaj Sakan, une société de développement local, réserve 5.200 appartements. Pour le moment, 1.000 familles ont bénéficié de ces logements. Les 4.000 appartements restants sont en cours d'acquisition. Le deuxième programme couvre le projet de l'Avenue royale, piloté par la Sonadac. Deux ans après, 50% des 4.000 appartements ont été livrés aux bénéficiaires. Pour le cas de ce programme, il fait l'objet d'une résistance de la part des bénéficiaires qui estiment que les conditions proposées par la Sonadac sont «exorbitantes» pour ces familles à revenus modestes.Les familles non recensées en 1989 doivent contribuer à hauteur de 200.000DH pour l'acquisition dudit logement. Ce programme dure depuis vingt six ans. Sur le plan national, le nombre d'habitats menaçant ruine est estimé à 43.000 logements, 20.000 unités sont actuellement traitées dans le cadre de conventions, dont 50% à Casablanca seulement. Quartiers sans équipement Le troisième axe d'actions du département de l'Habitat à Casablanca touche la mise à niveau urbaine des quartiers «anarchiques». Avec un taux d'urbanisation de 92% contre 57% au niveau national, Casablanca concentre de nombreux maux de l'urbanisme marocain. Ainsi, 23% des Casablancais n'ont pas accès aux réseaux de l'eau potable, de l'électricité et de l'assainissement. «Le développement de nouveaux quartiers s'est fait sans planification urbaine. Nous nous sommes retrouvés avec des maisons en dur qui ne disposent pas d'équipements collectifs», souligne Benabdellah. Ces programmes de mise à niveau urbaine concernent la restructuration et l'intégration de 90 quartiers sous équipés au profit de quelque 98.000 familles pour un investissement global de plus de 2,7 MMDH. Mkanssa Nord, Mkanssa Sud, Lahraouine et Sidi Ahmed Belahcen sont ces nouveaux territoires de la ville. Les zones ciblées se trouvent au sud comme à l'est de Casablanca.Pour rappel, cet axe s'inscrit dans le cadre du programme de développement de la ville de Casablanca pour 2030. Benabdellah contrôle le logement social Benabdellah annonce la mise en place d'opérations de contrôle et d'audit sur les prix du logement social, en partenariat avec la Direction des impôts. «La qualité des logements sociaux n'est pas toujours au rendez-vous. Nous travaillons dans le but de mettre fin à ces pratiques», a annoncé Nabil Benabdellah, ministre de l'Habitat et de la politique de al ville, lors de sa rencontre de communication avec les cadres du Parti du progrès et du socialisme à Casablanca. Son département compte également mieux contrôler les prix de ce segment de l'immobilier. Le ministère mène actuellement des opérations de contrôle et d'audit pour faire face à certaines pratiques de nature à contourner le prix fixé légalement pour le logement social. En coordination avec la Direction des impôts, il mène depuis des mois «des opérations de contrôle et d'audit pour faire face aux pratiques de certains promoteurs immobiliers qui appliquent des prix de vente dépassant le montant légalement fixé pour le logement social, à savoir 250.000 DH». Il a assuré que le ministère est disposé à intervenir s'il est établi qu'il y a eu des cas de corruption au niveau des prix du logement social, dont l'objectif est d'encourager les catégories à revenu limité à acquérir un habitat et de lutter contre les bidonvilles, soulignant que ce genre de pratiques est inacceptable dans la mesure où il s'agit d'une violation de la loi, outre les dommages causés à la clientèle de cette offre immobilière. Concernant le renforcement de l'offre de l'habitat, notamment au profit des catégories à revenu limité, le ministre a noté qu'à fin janvier 2015, son département a autorisé quelque 122 projets de logement social à Casablanca totalisant 137.756 unités, dont 110.625 unités en cours de construction. Sur le plan national, «500.000 unités ont été livrées ou en cours de livraison entre 2010 et 2015», précise Benabdellah. Pour le logement à bas coût (140.000 DH), Benabdellah regrette «que ce produit n'ait pas connu un grand engouement à cause du manque à gagner des promoteurs». À Casablanca, 1.198 unités ont été achevées, tandis que 3.369 autres sont en cours de construction.