Par bonheur, malgré l'alarmisme de certaines parties prenantes du secteur touristique, l'on ne peut pas parler de crise, pour le secteur. Cependant, certaines destinations comme Marrakech souffrent effectivement d'une forte dépendance au marché français, aujourd'hui source d'inquiétude. La résilience, par laquelle passe le salut du secteur, ne peut émaner que d'une diversification à tous les niveaux. Décryptage. Les professionnels du tourisme, notamment ceux opérant à Marrakech, ont l'air de broyer du noir. Mais de là à parler de crise, c'est aller un peu vite en besogne. En effet, si le fleuron du tourisme national est impacté par les désistements et annulations, principalement de la part des Français, d'autres marchés se portent bien, et les arrivées de touristes hors France n'ont pas été impactées par le climat électrique qui règne depuis les attentats de Paris. À l'image de l'Espagne, d'autres marchés enregistrent des croissances respectables. «Nous avons de plus en plus de touristes brésiliens par exemple, et cette tendance n'est près de s'arrêter», nous confie un opérateur du secteur. Il faut dire que Marrakech dispose de tous les prérequis pour séduire un très large éventail de marchés émetteurs. Le fait est que la ville ocre souffre gravement de ce paradoxe, puisqu'elle est en même temps l'une des destinations les plus dépendantes d'un marché unique, le français en l'occurrence. La diversification des marchés est aujourd'hui un chantier prioritaire pour le tourisme marocain, comme le souligne d'ailleurs le patron de la promotion touristique nationale. «Il est primordial de diversifier les marchés émetteurs de touristes vers le Maroc. Des efforts sont menés dans ce sens à destination de la Chine, de la Russie ou encore du Brésil», insistait Abderrafie Zouiten, directeur général de l'Office national marocain de promotion touristique (ONMT), lors de sa participation au salon international du tourisme de Madrid FITUR. La diversification sous toutes ses formes Toutefois, il faut souligner que la diversification ne se limite pas à la multiplication des pays et territoires qui émettent des touristes vers le Maroc. En effet, il faut garder à l'esprit la diversification des «familles de touristes» au sein d'un même marché. Un même marché recense des touristes potentiels aux habitudes de consommation et aux modes de voyages très différents. Dans cette optique, l'on peut citer l'exemple mis en avant par Zouiten au sujet du marché espagnol. Cette forme de diversification cible en l'occurrence la clientèle familiale, particulièrement pour encourager les Espagnols à visiter le Maroc en traversant le détroit en voiture, et ainsi poursuivre leurs voyages sur les routes marocaines. Dans ce sens, l'ONMT va lancer un spot publicitaire sur les chaînes de télévision espagnoles mettant en avant ce mode de voyage, ciblant particulièrement les enfants qui s'avèrent être les premiers prescripteurs des voyages familiaux. Cette opération de promotion contribuera également à rompre avec les clichés ancrés dans les esprits, notamment au sujet de la qualité des routes et autoroutes marocaines, même si le problème de la sécurité routière n'est malheureusement pas qu'un cliché (cf. leseco.ma). Il ne s'agit là que d'un seul exemple de diversification de la clientèle parmi tant d'autres. C'est dire s'il subsiste des pistes à développer, tant de la part des organes gouvernementaux que des opérateurs privés. En attendant de pouvoir améliorer la résilience du tourisme nationale grâce à ces différents canaux de diversification, l'on peut être heureux de continuer à échapper à la crise. Abderrafie Zouiten Dg de l'Office national marocain du tourisme Les ECO : Quels sont aujourd'hui les marchés prioritaires dans la promotion touristique menée par l'ONMT ? Abderrafie Zouiten : Il y a évidemment les marchés traditionnels, dont l'Espagne où nous nous trouvons, sur lesquels il faut maintenir les efforts. Il faut notamment porter le niveau du marché espagnol au moins au même niveau que le marché français et capitaliser sur le nombre important de résidents allemands et anglais en Espagne, mais il est également primordial de diversifier les marchés émetteurs de touristes vers le Maroc. Des efforts sont menés dans ce sens sur la Chine, la Russie ou encore le Brésil. Quel intérêt particulier pour le marché chinois ? La Chine est devenue aujourd'hui le premier émetteur de touristes en volume au niveau international, mais pas seulement en nombre de touristes. Les touristes chinois sont ceux qui dépensent le plus pendant leurs voyages. En plus, leurs habitudes de consommation pendant leurs voyages sont axées sur le shopping, ce qui augmente encore plus leurs dépenses de voyage. Si nous arrivons à capter ne serait-ce qu'une petite proportion de touristes chinois, les retombées seront particulièrement bénéfiques. Qu'en est-il des efforts de promotion sur le web ? Nous donnons beaucoup d'importance à Internet dans notre stratégie de promotion. Dans ce sens, nous avons conclu de nombreux partenariats avec les agences de voyages en ligne. Des contrats sont également signés avec les sites prescripteurs pour augmenter la visibilité de la destination Maroc grâce à un bon référencement.