Le marché des épices, des fruits secs et des légumineuses est approvisionné à hauteur de 80 à 90% par la contrebande. Ce phénomène s'est aggravé ces dernières années. Les professionnels demandent de restructurer ce secteur et de combattre l'informel. Le secteur des épices, fruits secs et légumineuses vit des moments difficiles. La contrebande approvisionne aujourd'hui le marché à hauteur de 90%, rongeant ainsi les opérateurs de ce marché qui ne savent plus à quel saint se vouer. Les importations régulières de produits comme le poivre, le coco râpé, la noix de cajou, les clous de girofle, les raisins secs où les abricots séchés s'amenuisent de plus en plus. Si le Maroc importait 30.000 tonnes par an depuis 1980-2010, actuellement il en est à 3.000-4.000 tonnes. Des chiffres qui en disent long sur l'avenir de ce secteur. «Depuis quelques années, la contrebande était minime, elle était imprévisible et gérable. Actuellement, ce phénomène s'aggrave à cause de l'indulgence des autorités, surtout depuis le printemps arabe», se plaint Omar Raji, membre actif de l'Association interprofessionnelle marocaine des exportateurs et importateurs de céréales, légumineuses et épices (AIMEXICLE). Les membres de cette association pointent également du doigt une fiscalité «injuste» conjuguée à des droits de douane «élevés», donnant ainsi l'occasion à un développement plus prononcé de la contrebande. «Si nous prenons le cas du poivre qui n'est d'ailleurs pas produit localement, en plus des droits de douane qui sont passés dans le PLF 2014 de 30% à 2,5%, nous supportons 20% de TVA, faisant ainsi que le prix de revient pour un seul kilo de poivre se situe à 98,5DH/kg, alors que sur le marché parallèle, ce prix est de 85 DH», précise-t-il. Même son de cloche auprès d'Asâad Ouazzani, président-directeur général de Sactal et vice-président de l'AIMEXICLE. Ce dernier dresse un tableau noir de la situation du marché. «Nous sommes quasiment à l'arrêt. Si nous continuons à travailler, c'est grâce uniquement aux accords bilatéraux entre le Maroc et quelques pays. Les produits comme les dattes et le fenouil d'Egypte sont exemptés de TVA et de droits de douane. Nous comptons aussi sur l'Aïd al-Adha où les professionnels réalisent annuellement 30% de leur chiffre d'affaires, cette année 2014, nous nous limitons à 2% seulement», s'alarme-t-il. Les produits issus de la contrebande inondent le marché à des prix imbattables. Selon les opérateurs, pas moins de 2.000 tonnes de marchandises de contrebande entrent chaque jour au Maroc. Les contrebandiers ont développé des réseaux de distribution de marchandises à travers tout le Maroc, ils ont des dépôts dans toutes les villes. Fès n'est plus la plaque tournante actuellement, c'est Kénitra, Salé, Bab Sebta, Derb Mila et Garage Allal à Casablanca, la zone économique Massar à Marrakech et le souk Inezgane qui raflent la vedette. Rien qu'à Bab Sebta, l'association a dénombré au moins 3.000 passeurs qui font 2 aller/retour à pied, par jour, soit 6.000 personnes transportant au moins 30kg chacun, pour un total de 180 tonnes de marchandises. En plus de 2.000 véhicules qui traversent chaque jour la frontière avec au moins 200kg de marchandises pour un total de 400 tonnes. Bref, la situation devient intenable au point que même la participation à des salons professionnels internationaux n'est plus fructueuse.«Nos prix ne sont plus concurrentiels. Nous avons sensibilisé le gouvernement, le ministère de l'Agriculture et de la pêche maritime et la Douane, mais sans résultats. Seul un contrat-programme pour notre secteur d'activité permettra de le structurer. Nous demandons également de réduire la TVA à 10%, de combattre l'informel et qu'il y ait plus de contrôles, surtout au niveau sanitaire», conclut Omar Raji.