C'est l'objectif pour le moins ambitieux que se sont fixé les gouvernements marocain et allemand hier à Casablanca, lors du Forum d'affaires maroco-allemand. En 2013, le Maroc n'a capté que 6% des IDE allemands en Afrique du Nord. Les différences culturelles et l'écueil des normes restent des barrières à dépasser d'urgence. Au minimum doubler les échanges, et ce en 5 ans au maximum. Rien que ça! C'est l'objectif que se sont fixé les deux gouvernements marocain et allemand hier à Casablanca lors du Forum d'affaires maroco-allemand. Il est vrai que les échanges commerciaux et d'investissement entre les deux pays demeurent à des niveaux très modestes: à peine 4,11% des échanges commerciaux des deux pays sont réalisés en commun, avec une baisse enregistrée lors de la dernière année. Même constat de faiblesse concernant les investissements directs. 118 millions d'euros seulement ont été investis par les opérateurs allemands en 2013, soit l'infime part de 6% de l'ensemble des investissements allemands en Afrique du Nord. En somme, «il faut relancer le partenariat économique entre les deux pays», insiste Moulay Hafid Elalamy (photo), ministre du Commerce, de l'industrie, de l'investissement et de l'économie numérique, en s'adressant à son homologue Uwe Beckmeyer, secrétaire d'Etat au ministère allemand des affaires Economiques et de l'énergie. Timing Ainsi, deux années après la première session de la commission économique mixte qui s'est tenue à Berlin, les décideurs industriels d'Allemagne et du Maroc se sont à nouveau réunis à Casablanca. C'était là l'occasion pour Moulay Hafid Elalamy de «motiver» les investisseurs allemands, et de les convaincre de concrétiser leurs idées de projets industriels. Ce dernier a d'ailleurs saisi l'opportunité pour rappeler la liberté dont jouissent les investisseurs et entrepreneurs étrangers au Maroc, notamment la liberté de possession et de rapatriement des capitaux. Il faut dire que les opportunités ne manquent pas, et que le timing est particulièrement propice aux bonnes affaires, de part et d'autre. En effet, il y a quelques semaines déjà, le ministre marocain a tenté de mobiliser les opérateurs nationaux autour de sa stratégie qui, selon lui, doit voir l'essentiel des initiatives mises sur les rails au cours des deux prochaines années. «Nous avons une fenêtre de tir limitée qui est ouverte et qui durera encore deux ans au maximum, après quoi, les pays concurrents se relèveront de plus belle. C'est maintenant et tout de suite qu'il faut se mettre en ordre de bataille pour concrétiser nos ambitions», insistait Elalamy. Et d'ajouter hier aux participants: «j'invite les groupes allemands à s'associer à ce mouvement de progrès inscrit dans la durée, et à saisir les multiples opportunités d'affaires qui sont mis en exergue, dans des secteurs porteurs tels que l'automobile, l'aéronautique, les énergies renouvelables et la logistique, dans le cadre d'un partenariat pragmatique, ouvert sur l'avenir et porteur de compétitivité partagée». Des normes mais «sans réserve» Pour l'officiel allemand, la multiplication de l'effort de développement mené par le Maroc est visible et reconnu. «La volonté de développement au Maroc n'est pas passée inaperçue en Allemagne et plus de 50 représentants de l'économie et de l'industrie allemandes sont aujourd'hui à Casablanca pour examiner les possibilités d'affaires», annonce l'officiel allemand. Au vu des échanges qui se sont déroulés entre hommes d'affaires et décideurs des deux pays, il semble que la dimension culturelle est décisive pour concrétiser les opportunités. En effet, d'une part, les investisseurs allemands sont pour le moins «agacés» par la domination française sur le marché marocain, et de l'autre, la fameuse «réserve allemande» semble quelques fois refroidir les ardeurs des businessmen marocains. Une intervention allemande a d'ailleurs été remarquable dans ce sens. «Nous devons surmonter la réserve allemande, qui ne doit pas avoir lieu aujourd'hui! Des millions d'euros ont été mobilisés par le gouvernement fédéral pour la promotion des partenariats économiques et il faut que cet effort soit suivi de résultats», lance Charles Huber, député fédéral au Bundestag à ses compatriotes participants. Demeure toutefois une variable fondamentale sur laquelle les exportations marocaines vers l'Allemagne buttent quasi-systématiquement: celle des normes. Ce point est en effet la faiblesse patente du produit marocain sur le marché européen, et encore plus sur le marché allemand, dont certaines règles et normes sont plus strictes que celles dictées par l'Union européenne. La mise à niveau et l'harmonisation des normes marocaines est plus urgente que jamais.