Sommaire Portrait :Said C. Naciri. Sur les traces de Sergio Leone. Festival:La voix des artistes du monde Exposition : Rabat de toile en toile... Tendances :Quand Casa inspire... Télécharger le PDF Voir Paco de Lucia et mourir. C'est ce que diront la majorité des gens après avoir eu la chance de voir le maestro en live. Cette fois-ci, le triste sort en a voulu autrement. C'est Paco de Lucia qui est mort. Il s'éteint mercredi 26 février, suite à une crise cardiaque, à Cancun au Mexique. Le roi de la guitare flamenco avait tout juste 66 ans et le souvenir de son concert lors de la dernière édition du Festival des musiques sacrées de Fès l'année dernière est encore dans les mémoires. C'est lors de ce dernier qu'il avait réussi à ameuter un public large, des plus jeunes aux plus vieux, tous en admiration devant sa dextérité à la guitare. Originaire d'Algésiras, le triangle d'or musical que forment Séville, Jerez et Cadix, n'a qu'un seul nom à la bouche : Paco de Lucia. Tous les amateurs, les apprentis guitaristes, les professionnels, les rêveurs ou les mélomanes ont pour maître ce roi des six cordes qui a su apporter un nouveau souffle à la guitare flamenca. Avec des notes venues de l'au-delà, une sensibilité à fleur de peau, une technique hors du commun et un feeling que lui seul a, Paco de Lucia est le seul maître sur scène. Seul ou accompagné par ses acolytes guitaristes, chanteurs, bassistes, percussionnistes ou danseurs, il contrôle tout, voit tout, dirige tout, sans perdre sa concentration. Sa présence est parfois dérangeante, son omniprésence souvent effrayante mais au final, on ne regarde que lui et ses doigts qui se baladent sur les notes avec une facilité déconcertante. Il a su apporter à la culture flamenco une touche jazz et une influence d'ailleurs, même de la musique classique, qui ont inspiré plusieurs générations jusqu'à aujourd'hui. «La disparition du guitariste virtuose représente une perte irréparable pour le monde de la culture et pour l'Andalousie, a déclaré le maire d'Algésiras, José Ignacio Landaluce, selon le journal Libération. «Son héritage restera pour toujours, de même que la tendresse qu'il a toujours éprouvée pour sa terre. Bien qu'il nous ait quittés, sa musique, sa manière géniale d'interpréter, son caractère, resteront toujours parmi nous», a ajouté le maire de la ville qui a déclaré 3 jours de deuil en hommage à Paco de Lucia. Le génie est né très tôt puisque son père musicien et excellent guitariste l'initie à l'instrument, qui deviendra fétiche, à l'âge de 5 ans en lui imposant une discipline sans faille qui consiste à travailler 12 heures avec sa guitare par jour, et le guitariste s'inspire du talent de ses deux frères Ramón de Algeciras, reconnu comme guitariste de talent et Pepe de Lucía, qui mènera très tôt une carrière de chanteur de flamenco. Tout va très vite puisqu'à 12 ans seulement il gagne un grand prix de guitare, qui va lui permettre de faire une première tournée aux Etats-Unis, à l'âge de 14 ans avec la compagnie de danse José Greco. Devant le franc succès de ses performances et compte tenu du fait qu'il se démarque de loin de ses confrères, même du haut de ses 14 ans, il se voit proposer une carrière solo très vite. Il enregistre son premier album en 1965 et se produit au Teatro Real de Madrid pour un concert qui fait de son art et de son talent deux valeurs des plus reconnues. Sa créativité, sa touche personnelle et son sens de l'innovation dans le milieu du flamenco traditionnel, associés à une grande technique instrumentale lui ouvre d'autres horizons musicaux. Des horizons qu'il se permet grâce à plusieurs collaborations avec des artistes de renom aussi différents les uns que les autres. Celui qui faisait de la musique pour subvenir à ses besoins, peut se permettre de voir plus loin et d'innover puisqu'il n'en est plus à l'étape alimentaire désormais. Paco de Lucia peut créer davantage. Du jazz à la musique brésilienne en passant par la musique classique, il travaille avec l'orchestre philarmonique, John McLaughlin et Al Di Meola au sein du Guitar Trio et explore même des tubes de discothèque et la musique de film, comme la musique du film «The Hit de Stephen Frears» en 1984. Il n'oublie pas ses origines musicales et son univers de prédilection et collabore aux 10 albums du grand chanteur flamenco : Camarón de la Isla. La reconnaissance des grands est au rendez-vous et Paco de Lucia continue son ascension au sommet de la gloire. L'album «Solo quiero caminar» marque l'histoire du flamenco, d'après les professionnels du domaine. Aux côtés de son percussionniste brésilien, il intègre des sons rapportés du Pérou jamais utilisés auparavant. C'est comme cela que le cajon rentre dans le quotidien de la musique flamenca. D'idées en idées, d'improvisations en improvisions, Paco de Lucia fait beaucoup de bien à son art et son art l'en remerciera en 2004 lorsqu'il reçevra le prix «Prince des Asturies des arts», le prix le plus prestigieux d'Espagne. Le jury a estimé qu'il était «considéré comme le plus universel des artistes flamenco, son style a fait école parmi les plus jeunes générations et son art est devenu un des meilleurs ambassadeurs de la culture espagnole à travers le monde», et que «tout ce qui peut s'exprimer avec les six cordes d'une guitare peut sortir de ses mains, qui s'animent avec l'émouvante profondeur de la sensibilité». Entouré du chanteur Duquende, du danseur Farru, il enchaîne les tournées et affiche 80 concerts de 2010 à fin 2013. Il s'éteint le mercredi 26 février après avoir fêté plus de 50 ans de carrière au Mexique où il passait ses vacances, loin de son île de Palma de Majorque en Espagne où il avait trouvé refuge depuis quelques années. Le monde de la musique a perdu un génie, l'Espagne pleure un ambassadeur de la culture. Une grande perte d'une étoile partie trop vite, mais dont l'héritage musical demeure éternel. Adieu maestro, adieu Paco .... Lire la suite