C'est aujourd'hui que le Conseil de Bank Al-Maghrib tient sa 2e réunion de l'année. Un rendez vous trimestriel très attendu par la communauté financière car c'est généralement l'occasion pour Abdellatif Jouahri, gouverneur de la Banque centrale de livrer son analyse de la situation macroéconomique du pays et de donner le ton de la politique monétaire qui sera adoptée au cours des prochains mois. Il s'agit surtout d'annoncer le maintien ou pas du même niveau du taux directeur qui est aujourd'hui à 3%. Plusieurs facteurs participent à cette décision, dont notamment la croissance, l'inflation et la stabilité macroéconomique. Aujourd'hui ces indicateurs semblent afficher une certaine résilience qui ne nécessiterait pas un changement majeur dans la voie déjà empruntée par Bank Al-Maghrib. L'inflation par exemple demeure globalement maîtrisée et n'affiche pas une importante évolution. Au cours du mois d'avril dernier, l'indice de l'inflation sous-jacente (IPCX) de Bank Al-Maghrib a enregistré une augmentation de 0,1%. En glissement annuel, l'inflation s'est établie à 2,4% en avril après 2,2% en mars, ramenant sa moyenne à 2,3% sur les quatre premiers mois de l'année. Pour sa part, l'inflation sous-jacente, en glissement annuel, ressort donc à 1,6%. Au cours du 1er Conseil de BAM tenu en mars dernier (cf:www.lesecos.ma, édition du 28 mars 2013), le Wali avait indiqué que l'inflation à l'horizon des six prochains trimestres devrait rester globalement en ligne avec l'objectif de stabilité des prix à moyen terme. Concrètement, elle devrait se situer autour de 2,2% en 2013, de 1,6% au deuxième trimestre 2014 et de 2% en moyenne à terme. Cela, à condition que les prix à la pompe et les prix de soutien aux différents produits subventionnés «ne bougent pas». Sur un autre volet, la Banque centrale tablait jusque-là sur un taux de croissance agricole en 2013 de 5%, compte tenu d'une production agricole prévue de 80 millions de quintaux tirée principalement par la récolte céréalière, et qui sera largemenent dépassée pour la campagne 2012-2013 (97 millions de quintaux). Par contre, pour ce qui est non-agricole, la croissance se situera autour de 4%. Par rapport à la balance des risques, Bank Al-Maghrib avait indiqué en mars dernier qu'il n'existait pas de pression sur le plan interne de la sphère réelle. Il n'y a pas de pression sur les prix également en ce qui concerne la sphère financière. Résultat, la balance des risques est jusque-là équilibrée et le restera dans l'hypothèse du maintien des prix des produits subventionnés. Cela dit, c'est au niveau des déficits jumeaux où le bât blesse ! Jouahri n'a pas mis de gants pour exprimer la réalité des choses lors du 1er conseil de l'année 2013, «le Maroc doit se réinsérer sur la bonne trajectoire !». Pour lui, il s'agit de modifier le tir pour ne pas tomber dans les mêmes «dérapages» qu'en 2012, d'autant plus que le Maroc s'est engagé vis-à-vis du FMI à respecter certains équilibres macroéconomiques, tels que le maintien des réserves de change à 4 mois d'importation ou encore un déficit de 3% en 2016. Selon le Wali, il ne faut surtout pas qu'on en arrive au programme d'ajustement structurel (PAS). L'alerte n'émanait pas du vide, loin s'en faut. Le déficit budgétaire qui est ressorti à 7,6% hors recette de privatisation pour l'année 2012 pourrait être le point de rupture si le Maroc ne se ressaisit et ne se réinsère dans la trajectoire pour laquelle il s'est engagé vis-à-vis du FMI. Le déficit budgétaire prévu par BAM pour 2013 est dans ce sens de l'ordre de 5,5% en décalage avec celui de la loi des finances, qui avait prévu un déficit de 4,8%, compte tenu d'une compensation budgétisée de l'ordre de 40 MMDH. Les prévisions de BAM tiennent compte des chiffres de 2012 pour annoncer que ce déficit sera dépassé. La situation n'est pas rose non plus du côté de la balance des paiements. Le déficit du compte courant serait, selon BAM et en tenant compte des derniers chiffres, au-delà de 7%. Conséquence, il serait nécessaire de maintenir les réserves de changes autour de 4 mois d'importations. Sur le plan du crédit, Bank Al-Maghrib affichait un certain optimiste quant à la reprise du rythme d'accroissement des prêts bancaires en tablant sur un niveau de 5 à 6%. Or, le crédit ne progresse que de 3,9% (chiffres du mois d'avril 2013) contre 6,8% à la même période une année auparavant.