Le détail des statistiques des abonnés à la téléphonie mobile a toujours été marqué du sceau de la confidentialité. Au-delà des chiffres communiqués par les opérateurs au régulateur du marché et qui sont publiés chaque trimestre, il est en effet difficile de vérifier si ces abonnés sont toujours « actifs » ou s'il s'agit de puces téléphoniques vendues «en vrac». Pour en finir avec cet état de fait, l'Agence nationale de réglementation des télécommunications (ANRT) entend opérer un «toilettage». Elle vient, en effet, de lancer un appel d'offres pour «la vérification du système de gestion du parc d'abonnés mobile GSM et 3G» chez les trois opérateurs du marché (Itissalat Al Maghrib, Méditélécom et Wana Corporate). Le régulateur veut s'assurer ainsi de l'existence d'une «identification précise» de tout détenteur d'une carte SIM, telle que prévue dans les cahiers des charges des opérateurs. En effet, ces derniers sont obligés de veiller à ce que tout client, abonné ou détenteur de carte prépayée, soit identifiable sur la base de trois éléments (nom, prénom, adresse et carte CIN). Cette identification doit être faite au moment de la souscription de l'abonnement ou de la délivrance de la carte prépayée. Sur le terrain, les opérateurs font, souvent, l'impasse sur cette «exigence», selon des observateurs, notamment lors des campagnes de promotion : des milliers de puces de téléphones sont écoulées sur le marché à travers les grossistes, parfois gratuitement, sans respecter la procédure exigée par l'ANRT. Les ventes de ces puces sont comptabilisées dans les statistiques fournies au régulateur, qui les publie et leur accorde un cachet officiel. Eplucher les bases de données Les opérateurs télécoms devraient ainsi, au terme de l'étude que prépare l'ANRT, ouvrir leurs «cavernes internes» aux enquêteurs du régulateur pour «vérifier le contenu des bases de données des clients de chaque opérateur», lit-on dans un document de l'Agence. Dans un premier temps, il s'agira de prendre connaissance et reconstituer les procédures d'identification des abonnés mobile aussi bien pour les ventes directes que celles indirectes. Ensuite, on passera à l'évaluation de ces procédures. À ce niveau, le régulateur entend reconstituer toute la chaîne de distribution à travers une évaluation des relations contractuelles et/ou opérationnelles existantes entre les opérateurs et leurs distributeurs. Sur la base de ces analyses, les experts formuleront des recommandations et des améliorations des procédures existantes et proposeront des plans d'action devant permettre aux opérateurs de se conformer à la réglementation en vigueur en cas de constatation de manquement. Le cabinet adjudicataire de l'appel d'offres devrait proposer, par la suite, un outil d'analyse permettant de déterminer aussi bien le niveau de fiabilité d'identification des abonnés que les cas de doublons. En somme, l'étude s'étalera sur deux volets complémentaires. Le premier porte sur la vérification du respect de l'obligation concernant l'identification des clients. Le second est plutôt un volet «fonctionnel et technique». Il aura trait au contrôle et à l'appréciation des équipements permettant le calcul, l'identification et l'archivage du parc d'abonnés mobile (postpayé et prépayé) chez les opérateurs. Opération complexe Pour permettre au cabinet chargé de l'étude de mener à bien ses missions, l'ANRT lui donnera accès aux systèmes de gestion du parc des abonnés mobile de chaque opérateur. Sur le terrain, l'opération est nettement plus complexe. Il s'agira en effet d'initier une multitude de tests de contrôles techniques. Les vérifications toucheront ainsi le processus de saisie, d'actualisation et d'archivage des informations relatives aux abonnés mobile, le mode opératoire du système de gestion... Le système de distribution de chaque opérateur devrait être passé au peigne fin. Le régulateur vérifiera ainsi la fiabilité de toute la chaîne de distribution en matière d'identification des abonnés (vente directe et indirecte), l'applicabilité de la procédure arrêtée par chaque opérateur vis-à-vis des distributeurs et revendeurs qui ne respecteraient pas les conditions d'identification et, au final, un contrôle du contenu du système de gestion du parc des abonnés mobile. Qu'est-ce à dire ? Réponse du régulateur : il faudra s'assurer de la concordance des informations contractuelles avec les informations contenues dans le système de gestion client de l'opérateur par type d'abonnés. Outre cela, il s'agira d'auditer la fiabilité du système d'information utilisé pour l'exhaustivité du parc d'abonnés de chaque opérateur. Et pour en finir avec les « puces inactives », on procèdera à l'appréciation de la corrélation entre le cycle de vie du numéro mobile et sa réutilisation ou réaffectation. La dernière mission des enquêteurs sera de proposer un outil d'analyse permettant de déterminer le niveau d'identification des abonnés. L'ANRT devra formuler à terme des recommandations opérationnelles d'amélioration à mettre en place chez les opérateurs.