Alors que les hommages rendus à feue Fatima Mernissi se poursuivent, la création d'une chaire en son nom a été annoncée par l'Université Mohammed V à Rabat en partenariat avec HEM. Il s'est passé exactement cinquante quatre jours depuis l'annonce de la disparition de Fatima Mernissi. La pasionaria du féminisme musulman, icône de la cause des femmes et de la démocratie et maintes fois désignée parmi les cent femmes les plus influentes du monde arabo-musulman, s'en est allée à l'âge de 75 ans. Depuis, les hommages se succèdent et les témoignages se multiplient, donnant lieu à des réflexions autour de l'œuvre magistrale de la sociologue. Des mots et des larmes La disparition de Fatima Mernissi n'est pas passée dans l'indifférence. Et c'est peu dire que l'émotion a régné lors des rencontres organisées en hommage à l'intellectuelle. Universités, librairies et instituts culturels se sont réparti l'énorme tâche de faire le bilan d'une vie de savoir et de pensée. De Rabat, jusqu'au Caire, en passant par Madrid, où un hommage lui a été rendu à l'initiative du Forum interculturel hispano-arabe, des témoignages émouvants ont souligné des pans de sa vie et de son combat. La Fondation ONA a commémoré, dans ses deux sièges, le départ de la défunte en présence d'intellectuels ayant évolué auprès d'elle ou sous son aile. «Fatima Mernissi a toujours encouragé les autres à chercher et à écrire. En rentrant au Maroc, elle était déjà connue à l'internationale. Elle n'avait rien à prouver», commente son éditrice, Layla Chaouni. C'est à la Villa des Arts de Rabat que se sont réunis les intellectuels Asmaa Mrabet, Driss Ksikes, Nouzha Guessouss, Driss Guerraoui, Dr Farid Merini et Amine Benhallam, jeune étudiant de Mernissi, et fondateur de Fatema Mernissi Youth Think Tank. Que de proches amis de la défunte, dont les témoignages ont été accompagnés de lectures de textes de feue Mernissi par des étudiants. Une chaire pour elle La Villa des Arts de Casablanca, quant à elle, a reçu Khadija Alaoui pour représenter le réseau des femmes journalistes qui a souvent compté sur le soutien de la sociologue, ainsi que la militante Fatna Bouih, Dr Farid Merini, et le jeune Amine Benhallam. Pour immortaliser de la plus belle manière l'œuvre de la pasionaria marocaine et perpétuer la recherche autour de la réflexion qu'elle a entamée au sujet du féminisme musulman depuis les années 1980, une chaire au nom de Fatima Mernissi vient de voir le jour à l'initiative de l'Université Mohammed V à Rabat et HEM. Hébergée par la Faculté des lettres et sciences humaines et le CESEM, la chaire aura pour mission de créer des groupes de réflexion et ateliers d'écriture pluridisciplinaires. Il s'agit aussi de faciliter l'octroi de bourses doctorales et postdoctorales, ainsi que la publication d'ouvrages sur des thèmes suscitant le débat public. La nouvelle a été fort appréciée par l'ensemble des intellectuels qui reconnaissent en Fatima Mernissi une pionnière en sociologie qui a publié, depuis les années 1980, de nombreux ouvrages toujours d'actualité. À ce propos, Layla Chaouni, des éditions Lefennec, a entamé la réédition de toute l'œuvre de Mernissi. «Nous avons également l'intention de traduire Tcharmil, livre paru en 2015 et que Fatima Mernissi a dirigé au sujet du phénomène de violence chez les jeunes». Dans ce dernier travail, Fatima Mernissi a invité un nombre de spécialistes et intellectuels à s'exprimer au sujet du phénomène de «Tcharmil». L'ouvrage comporte les signatures du Pr Jallal Taoufiq, Khadijah Alaoui, Abderrahim Al Atri, Reda Dalil, Fatna Elbouih, Ahmed Ghayat, Youssef Madad et Hanane El Ouadrhiri.