Ils sont 476, dont seulement 290 sont opérationnels n Dans six ans, 50 % partiront à la retraite. Le Maroc dispose désormais d'une (nouvelle) législation du travail, mais a-t-il les moyens humains, c'est-à-dire des inspecteurs du travail, en nombre suffisant pour l'appliquer ? Ce n'est pas si sûr, lorsqu'on sait que l'effectif global de cette profession au Maroc s'élève à 476, dont seulement 290 sont opérationnels. Selon les standards internationaux, il faut un inspecteur pour 250 entreprises. Au Maroc, ce ratio est ridiculement bas : un inspecteur pour, tenez-vous bien, 800 entreprises ! Quant au secteur agricole, il n'est presque pas couvert : 30 inspecteurs sur toute l'étendue du territoire, sachant que l'agriculture est l'activité principale du Maroc. Selon le président de l'Association marocaine des inspecteurs du travail (AMIT), Mohammed Mân, ce métier risque tout simplement de disparaître. M. Mân explique sa crainte par le fait que, depuis longtemps, les recrutements sont quasi-nuls, alors que d'ici à 2010, 50 % de l'effectif actuel aura atteint l'âge de la retraite. A ce déficit en nombre, qui fait que seulement 24 % des entreprises structurées sont couvertes par les visites des inspecteurs – ce taux tombe à 11 % si l'on tient compte du secteur informel -, s'ajoute le problème de l'inexistence de statut juridique spécifique à cette catégorie de fonctionnaires. L'AMIT, créée depuis 1993, a bien élaboré un projet de statut, et celui-ci a bien été visé par la tutelle, à savoir le ministère du Travail, mais le texte est bloqué au ministère des Finances, selon nos informations. «Nous sommes conscients de la nécessité de doter cette profession d'un statut particulier, et le travail à notre niveau est fait. C'est aux Finances qu'il faut poser la question de savoir pourquoi le dossier n'a pas abouti», confie un responsable au ministère du Travail. 76 % des entreprises structurées ne sont pas couvertes par les visites des inspecteurs du travail L'explication qui a souvent été donnée à l'AMIT, pour justifier ce retard, est que, dans la mesure où une réforme du statut des administrateurs et assimilés est en cours, les inspecteurs du travail n'ont qu'à attendre que cette réforme aboutisse pour bénéficier des avantages de ce nouveau statut. Or, le métier d'inspecteur du travail, explique l'AMIT, a ses spécificités qui ne sont pas celles de l'administrateur et que l'Organisation internationale du travail (l'OIT) a d'ailleurs bien mises en évidence dans ses différents instruments. En effet, les conventions internationales ratifiées par le Maroc insistent sur la nécessité de doter le corps des inspecteurs d'un statut particulier, qui leur garantisse des conditions de travail favorables, la stabilité dans l'emploi et la protection contre toute influence extérieure. Le nouveau Code du travail, il faut le redire ici, est avant tout construit autour d'une préoccupation qui semble aujourd'hui faire l'unanimité : protéger tout à la fois les intérêts des salariés et de l'entreprise, ce qui suppose la recherche constante des voies et moyens permettant d'éviter le déclenchement des conflits et, surtout, leur «judiciarisation». A cet égard, le rôle de l'inspecteur du travail est primordial et, d'ailleurs, le nouveau code consacre près d'une trentaine d'articles à cette institution. L'article 551, par exemple, stipule que tout litige du travail pouvant conduire à un conflit collectif doit, au préalable, faire l'objet d'une tentative de conciliation devant l'inspection du travail