Les 8 grandes banques commerciales ont vu leur coût du risque croître de 38% au premier semestre 2014. Les provisions pour créances en souffrance absorbent 37% du résultat brut d'exploitation contre 21% il y a 4 ans. Le bénéfice du secteur croît tout de même de 10,3% grà¢ce à des revenus de commissions et d'intérêts toujours plus rémunérateurs. Confrontées depuis 2010 à une montée continue de leurs créances en souffrance, les banques semblent avoir appris à composer avec ce facteur pour en minimiser l'impact sur leurs profits. C'est ce qui ressort de la dernière salve de communications financières au titre du premier semestre 2014, marqué par une sensible hausse du coût du risque quasi généralisée. Les 8 grandes banques commerciales (les six cotées auxquelles s'ajoutent la Société Générale et le Crédit Agricole du Maroc) ont en effet vu leurs dotations aux provisions pour créances en souffrance augmenter de 38%, à près de 6 milliards de DH. Ce volume représente près de 37% du résultat brut d'exploitation, ce qui revient à dire que les banques mobilisent plus du tiers de leur bénéfice d'exploitation pour se prémunir contre les risques d'impayés. Une part conséquente qui interpelle, d'autant plus lorsque l'on sait qu'il y a encore 4 ans elle était contenue à 21%. L'on peut toujours argumenter que la politique de provisionnement, adoptée au regard de la réglementation de Bank Al-Maghrib et des normes de consolidation IFRS, s'inscrit dans une optique de prudence, d'où un niveau de couverture très large qui ne reflète pas forcément le niveau du risque. Mais il apparaît aussi que malgré le renforcement des dispositifs de recouvrement, de l'assainissement des bilans et d'une appréciation plus fine des dossiers de financement, les banques ont encore du mal à stabiliser la qualité du crédit tant des entreprises que des particuliers. Le cas le plus préoccupant est celui de la BMCI dont les efforts de provisionnement ont doublé, à près de 400 MDH. Attijariwafa bank et la BCP ne font pas mieux avec des augmentations de coût du risque de 61,4 et 84,4%, à 1,6 et 1,8 milliard de DH respectivement. Dans le même ordre, le CAM a constaté des provisions en augmentation de 50%, à 300 MDH. Plus inspirée dans la gestion de ses crédits à risque, BMCE Bank subit une augmentation relativement maîtrisée de 20,5%, à 1,05 milliard de DH. Au final, seuls CIH Bank, Crédit du Maroc et Société Générale parviennent à infléchir leur coût du risque sur les 6 premiers mois de l'année. Le premier, qui demeure un cas particulier à l'échelle du secteur, profite de l'impact positif du recouvrement récurrent ainsi que des reprises induites par les récupérations sur les dossiers historiques pour constater une reprise nette de 81 MDH contre une dotation de 30 MDH au premier semestre 2013. Les deux autres banques à capitaux français font baisser leur coût du risque de 1,30% et 25%, à 234 et 600 MDH respectivement. Une embellie obtenue au prix d'un recul des réalisations commerciales, en particulier pour Société Générale. Le coefficient d'exploitation s'améliore En dépit de ces efforts qui rognent les profits, la capacité des banques à réaliser des bénéfices demeure donc intacte. Le résultat net des 8 établissements, établi au premier semestre à 5,6 milliards de DH, est en effet en croissance de 10,3%. Cette hausse globale recouvre des progressions individuelles remarquables. BMCE Bank et Société Générale enregistrent les croissances bénéficiaires les plus importantes : 52% et près de 68%, à 901,5 MDH et 228 MDH. Suivent la BCP, CIH Bank et le CAM avec des hausses de profit net non moins honorables de 13%, 9,1% et 8,6%, à 1,1 milliard, 268 millions et 201 MDH. Au final, la montée du coût du risque ne pèse que sur les profits d'Attijariwafa bank, Crédit du Maroc et surtout BMCI. La filiale de SNI n'enregistre en effet qu'une hausse de 1,8% de son profit net, à 2,3 milliards de DH. Crédit du Maroc affiche un bénéfice en quasi-stagnation à 182,5 MDH, tandis que la filiale de BNP Paribas voit son profit net fondre de 36%, à 257 MDH. L'amélioration du bénéfice net agrégé des banques dans un contexte de hausse du coût du risque s'explique par leur prédisposition toujours plus affirmée à tirer des revenus plantureux de leur activité commerciale. Pourtant, ils ne totalisent sur la première moitié de l'année qu'une croissance de 3,6% des dépôts, à 837,4 milliards de DH, tandis que leurs crédits distribués n'augmentent que de près de 1,6%, à 856 milliards de DH. Des hausses qui, il faut en convenir, restent bien modestes en comparaison avec les années fastes. Il n'empêche que les revenus des intérêts et commissions qui en résultent ont progressé de façon appréciable. Le produit net bancaire (PNB) totalise 30 milliards de DH, en croissance de 9,2%. Ce volume a aussi bénéficié du coup de pouce des opérations de marché qui ont été plus rémunératrices pour la quasi-totalité des banques au premier semestre 2014 du fait notamment de la baisse des taux obligataires qui a fait profiter les établissement de plus-value sur leurs portefeuilles investis en bons du Trésor. Avec des hausses respectives de leur PNB de 15% et 15,5%, à 7,5 milliards de DH et 5,6 milliards de DH, la BCP et BMCE Bank démontrent la plus forte capacité à tirer toujours plus de revenus de leurs efforts commerciaux. Attijariwafa bank, pour sa part, est en léger retrait avec une hausse de 7,2% «seulement», principalement du fait du recul des produits de commissions que le management de la banque explique par la poursuite d'une opération de nettoyage de comptes lancée depuis l'année dernière. La croissance externe et la gestion toujours plus rigoureuse de l'exploitation complètent la recette éprouvée des banques pour amortir le choc de la montée du coût du risque. Sur le second point, quasiment toutes affichent un gain de productivité qui apparaît à travers l'amélioration de leur coefficient d'exploitation. BMCE Bank, historiquement la moins bien placée sur cet indicateur, progresse de 5,6 points, à 53,1%. Attijariwafa bank demeure toujours la championne en la matière avec un coefficient de 42,2%, en contraction de plus d'un point. Notons aussi que Crédit du Maroc n'a pas hésité à fermer des agences pour maîtriser son coefficient au premier semestre, rapportent des analystes.