Selon une enquête menée par l'agence de presse Reuters, l'ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la Révolution islamique iranienne, contrôle un empire économique d'environ 95 milliards de dollars… Une somme qui dépasse les revenus annuels pétroliers de l'Iran qui ont atteint, en 2012, 67,4 milliards de dollars. Setad, un empire économique aux activités opaques Au centre de l'enquête de Reuters, les relations entretenues entre Khamenei et Setad, une organisation peu connue, mais qui possède des parts dans pratiquement chaque secteur de l'économie nationale, de la finance au pétrole en passant par les télécommunications. S'il est difficile d'évaluer avec précision le montant total de ses avoirs en raison de l'opacité de ses comptes, Reuters évalue cet empire économique colossal à 95 milliards de dollars répartis entre les biens immobiliers (52 milliards de dollars) et des parts (43 milliards). Pour la petite histoire, le nom complet de l'entreprise est "Setad Ejraiye Farmane Hazrate Emam", soit "Siège pour l'exécution des ordres de l'imam". Un nom qui fait référence à une décision de l'ayatollah Ruhollah Khomeneini, fondateur de la République islamique, qui en 1989 avait ordonné la création d'une entité pour gérer et vendre les propriétés abandonnées suite aux années de chaos qui ont suivi la révolution de 1979. A l'origine, Setad devait aider les pauvres et les anciens combattants, et d'après l'un de ses cofondateurs cité dans l'enquête, n'était censée exister que pendant deux ans… Le secret de la longévité de Ali Khamenei ? Sauf que vint cinq ans plus tard, Setad s'est transformée en vaste machine économique aux activités opaques et tentaculaires."Aucun organe de supervision ne peut remettre en cause ses biens", déclare Naghi Mahmoudi, un avocat iranien qui a quitté l'Iran en 2010 et vit aujourd'hui en Allemagne. Cette organisation aurait bâti un véritable empire au détriment de milliers d'iraniens en leur confisquant systématiquement leurs biens immobiliers et en affirmant, parfois à tort, devant les tribunaux que ces propriétés étaient abandonnées. Désormais et sur ordre de la justice iranienne, Setad détiendrait au nom du guide suprême un monopole sur la saisie de propriétés. « Pour le seul mois de mai 2013, près de 300 biens ont ainsi été mis aux enchères par Setad, pour des millions de dollars. » explique les enquêteurs de Reuters. Si rien ne prouve que le guide suprême puise dans les fonds de Setad pour s'enrichir personnellement, il y a fort à parier que cette organisation est à l'une des clés de sa longévité au pouvoir (24 ans). Selon les enquêteurs, Setad donnerait au guide suprême les moyens financiers d'opérer indépendamment du parlement et du budget national, le mettant ainsi à l'abri des luttes de pouvoir qui agitent en interne la République islamique. En juin dernier, le département américain du Trésor a imposé des sanctions contre Setad et certaines de ses holdings, qualifiant l'organisation de "vaste réseau de sociétés-écrans masquant des actifs pour le compte (…) des dirigeants iraniens".