Les agences de développement touristique n'étant pas créées, la gouvernance des contrats est confiée à des commissions régionales sous la tutelle des walis. Une région peut englober plusieurs territoires, et vice versa. La signature des contrats programme régionaux (CPR) dans le cadre de la Vision 2020 pour le tourisme fait grincer des dents de nombreux professionnels même s'ils affichent une adhésion de façade. C'est que le ministre du tourisme, Lahcen Haddad, s'active pour que chacun des 8 territoires ou destinations touristiques identifiés par la Vision 2020 ait son contrat programme avec des objectifs fixés à partir des potentialités naturelles de chaque région, des pistes de financement pour la construction d'infrastructures et d'une offre touristique spécifique pour accueillir les touristes dont le nombre potentiel est aussi déterminé pour chaque destination, toujours à l'horizon 2020. La gouvernance et l'exécution de ces contrats programme seront assurées par «une commission régionale sous la présidence du wali de la région et composée des représentants des autorités locales, des élus et des professionnels». C'est en tout cas ce qui apparaît à travers les quatre CPR déjà signés. Ainsi, et sans attendre la mise en place des agences de développement touristiques (ADT), instruments de décentralisation de la décision par excellence, le ministre du tourisme et son équipe ont commencé leur tournée à travers les régions du Royaume par la signature, le 26 avril dernier, à Khouribga, du CPR de la région Chaouia Ouardigha, suivi le 15 mai de la signature du CPR de la région de Tanger-Tétouan (territoire Cap Nord) et le même jour, à Kénitra, de celui de la région Gharb-Chrarda-Béni Hssen. Vendredi 17 mai, ce fut au tour de la région de Souss-Massa-Drâa de voir son CPR signé à Agadir. D'après le planning établi par le ministère du tourisme, ce sont 8 autres régions qui devront signer leur contrat programme, entre autres, Marrakech, le 27 mai, et Tadla Azilal, le 15 juin. Mutualisation des ressources Pour une meilleure compréhension du processus, le ministère de tutelle précise que «la construction des ces territoires touristiques qui vont englober une ou plusieurs régions (administratives) requiert la mutualisation des atouts et ressources entre régions dans le cadre de feuilles de route clarifiant les engagements de différents acteurs autour des projets à mettre en œuvre au niveau local». Inversement, une seule région peut englober plus d'un territoire touristique. Ainsi, si la région Tanger-Tétouan correspond au territoire touristique dit «Cap Nord», la région de Souss Massa Drâa couvre deux territoires, soit «Souss Sahara Atlantique» et «Atlas et Vallées». Ce qui, selon certains observateurs, ne va pas faciliter la mise en œuvre des programmes. Par ailleurs, les professionnels reconnaissent que ces CPR contiennent des projets intéressants qui peuvent avoir des retombées positives sur certaines régions, et particulièrement celles dont le potentiel touristique n'est pas mis en valeur, mais restent très sceptiques sur les moyens de financement des projets d'infrastructures pour améliorer l'offre et sur les moyens à mettre en œuvre pour assurer une bonne gouvernance au niveau de ces territoires. En tout cas, il va falloir mobiliser beaucoup de milliards de dirhams pour réaliser ce dessein, comme en témoignent les contenus des quatre CPR signés. Le secteur privé en première ligne Le contrat programme de Khouribga contient 92 projets dont 5 structurants pour la région. Il s'agit, explique le communiqué du ministère publié à l'occasion, d'un Resort et de 3 clubs dans le cadre du programme Biladi pour encourager le tourisme interne et d'un parc d'attractions. Ces projets et bien d'autres nécessitent un investissement estimé à 8,9 milliards de DH. Quand on sait à quel rythme les projets du programme Biladi sont exécutés, on peut comprendre le scepticisme de ces professionnels. Concrètement, et pour l'heure, les actions annoncées s'articulent autour de la promotion pour attirer les investisseurs nationaux et internationaux dans la région de Chaouia Ouardigha et du soutien à la mise à niveau des hôtels de la région à travers le programme Renovotel (500 MDH) et du programme Syaha avec l'ANPME (420 MDH) pour améliorer la compétitivité des PME touristiques. Dans la région Tanger-Tétouan, le développement se basera sur 127 projets, dont 25 structurants de dimension internationale, qui devront mobiliser 14,4 milliards de DH dont 90% (12,98 milliards) seront portés par le secteur privé. L'ambition de la région est d'attirer 3,1 millions de touristes en 2020 avec une capacité additionnelle de 26 247 lits. D'après les prévisions, 80% des touristes viendront des marchés français, britannique, espagnol et des Pays-Bas, grâce à 212 fréquences aériennes hebdomadaires prévues vers ce territoire. Quant à la région Gharb-Chrarda-Beni Hssen, elle va bénéficier des retombées de 23 projets, dont 2 structurants et 21 projets complémentaires, qui requièrent un investissement global de 1,4 milliard de DH. Ces projets sont inscrits dans 5 programmes touristiques, dont la station Biladi de Mehdia et le club Biladi de Moulay Bouselham. La région devra bénéficier de 10 000 lits supplémentaires pour accueillir 217 000 touristes en 2020. Enfin, la région de Souss-Massa-Drâa, riche en sites touristiques diversifiés, doit mobiliser un investissement global de 27,5 milliards de DH pour la réalisation de 56 projets, dont 12 de dimension internationale. La région ambitionne de mettre sur le marché 30 000 lits supplémentaires pour accueillir près de 2,2 millions de touristes et tripler, dit-on, ses recettes touristiques. Pour ce faire, la région mise sur 464 fréquences aériennes hebdomadaire à partir de la France, la Russie, l'Allemagne et du Royaume-Uni. Les CPR des autres régions qui vont être signés dans les prochaines semaines doivent obéir au même schéma.