En cas de faillite, un fonds de garantie indemnise les clients à hauteur de 200 000 DH par investisseur. D'un montant de 27,4 MDH à fin 2011, le fonds de garantie peut ne pas suffire pour couvrir tous les engagements d'un intermédiaire en faillite. Et si une société de bourse de la place faisait faillite ? Bien que peu probable, ce cas de figure mérite d'être étudié étant donné le contexte actuel du marché boursier. En effet, depuis la fin des cinq glorieuses (2004-2008), période durant laquelle les intermédiaires boursiers ont engrangé des bénéfices conséquents suite à la succession des introductions en bourse et à l'arrivée massive d'investisseurs sur le marché, qu'ils soient particuliers ou institutionnels, nationaux ou étrangers, la place casablancaise est entrée dans une phase d'atonie et d'incertitude qui a été déclenchée par la crise internationale de 2008. Les cours boursiers n'ont pas cessé de chuter par la suite, mais le plus grave est que le volume des transactions a fondu comme neige au soleil (-50% en 2012 par rapport à 2010) et les introductions en Bourse sont devenues de plus en plus rares. Conséquence, les sociétés de bourse ont durement pâti de ce retournement de tendance. Ayant pour principale activité l'intermédiation boursière (à côté du conseil, de la tenue de compte, de la gestion de portefeuille..), ces intermédiaires ont vu leur chiffre d'affaires s'effondrer, car constitué essentiellement de commissions sur transactions, et, de ce fait, leurs bénéfices ont lourdement chuté. D'ailleurs, au titre de l'année 2011, le bénéfice net agrégé des 17 sociétés de bourse de la place s'est replié de près de 60% pour atteindre 56,7 MDH. Et l'année 2012 devrait se solder par une baisse plus prononcée que celle de 2011, selon les pronostics de certains opérateurs. Ceci dit, toutes les sociétés de Bourse ne sont pas affectées au même degré par le marasme actuel du marché boursier. Celles de petite taille, qui ne sont généralement pas adossées à des groupes bancaires, sont les plus impactées, à l'instar d'Eurobourse, d'Integra Bourse, d'Alma finance et de MSIN qui affichent des déficits nets au titre de 2011. Et si l'une d'elles ne peut plus restituer les avoirs de ses clients ? Qu'adviendra-t-il des épargnants qui ont des titres et des espèces déposés chez ces opérateurs ? D'abord, il faut savoir que pour prévenir ce type de situation, un fonds de garantie a été institué par le dahir n°1-93-211 relatif à la Bourse des valeurs. Entré en vigueur en juin 2001, il n'a jusqu'à présent jamais été utilisé pour faire face à la faillite d'une société de bourse. En fait, chaque intermédiaire est tenu de contribuer à une fréquence semestrielle à ce fonds de garantie, selon la position en titres et en espèces de ses clients. La cotisation pour les espèces est limitée à 0,2% de la moyenne semestrielle des positions de fin de journée des espèces conservées par chaque société de bourse pour le compte de ses clients. Pour les titres, la cotisation est calculée sur la base de la moyenne semestrielle des positions de fin de trimestre des titres conservés de tous les clients de chaque société de bourse, à hauteur de 0,04% si le solde atteint 10 MDH, de 0,03% s'il est compris entre 10 et 100 MDH, de 0,02% s'il varie de 100 MDH à 1 milliard de DH, et de 0,01% pour les soldes de plus de 1 milliard de DH. Cela étant, l'évaluation des titres s'effectue au dernier cours pour les titres cotés et à la valeur nominale pour les titres non cotés. Le montant des cotisations est placé dans un compte spécifique auprès du Trésor qui s'occupe du placement et de la gestion, et ce, selon une convention signée entre la Trésorerie générale du Royaume et le CDVM. Il est placé essentiellement dans des actifs de courte durée, à rendement garanti, et les revenus dégagés du placement sont réintégrés dans le fonds de garantie. Il ya lieu de noter que seules les sociétés de bourse dépositaires contribuent à ce fonds. En revanche, l'ensemble des intermédiaires boursiers et de leurs clients bénéficie de l'indemnisation en cas de faillite. L'intervention du fonds de garantie ne peut être effective que si le CDVM constate la mise en liquidation de la société de bourse. Cette décision est prononcée par le tribunal de commerce à l'initiative de la société de bourse en question dans le cas où, par exemple, elle n'arrive plus à faire face à ses engagements suite à un effritement de ses fonds propres, ou à la demande du CDVM s'il constate un non-respect récurrent de certains ratios prudentiels, notamment en matière de fonds propres (voir encadré). Soulignons que les sociétés de bourse sont juridiquement constituées en tant que sociétés anonymes et sont donc régies par les procédures de difficultés d'entreprises du code de commerce en cas cessation de paiement. L'indemnité est plafonnée à 30 MDH par société de bourse En revanche, le fonds de garantie n'intervient aucunement si une société décide de mettre fin à son activité ou de fusionner avec une autre, puisque la mise en liquidation n'est pas effective dans ce cas. C'est le cas par exemple de la Somacovam, filiale de Wafabank qui a dû arrêter son activité consécutivement à la fusion de la banque avec la BCM. En cas de non-respect des règles prudentielles, le CDVM, qui est informé d'une manière régulière grâce à des reportings obligatoires effectués par les contrôleurs internes des sociétés de bourse, procède à des missions d'inspection et peut ordonner l'arrêt de toute activité si les dépassements sont fréquents et flagrants. Ces missions portent sur la vérification des ordres de transactions et des avis d'opéré des opérations ayant induit l'infraction à l'une des règles prudentielles. Suite à cela, le CDVM arrête la situation des avoirs des clients de la société de bourse ainsi que les avoirs propres de cette dernière. La société de bourse est obligée par la suite d'informer les clients de sa situation afin qu'ils puissent réclamer leur droit à l'indemnisation, et ce, à travers la publication d'un communiqué dans un journal d'annonces légales. L'information de la clientèle doit parallèlement s'effectuer via l'insertion d'un avis au bulletin de la cote publié par la société gestionnaire de la Bourse de Casablanca. Pour les demandes d'indemnisation des clients, elles doivent être déposées auprès du CDVM dans un délai de trois mois à compter de la publication de l'avis et du communiqué. Commence enfin le processus d'indemnisation. A ce propos, tous les clients sont traités sur un pied d'égalité. Aucun client n'est privilégié par rapport à un autre, aussi important soit-il. L'indemnisation couvre les titres et les espèces détenus par les clients de la société de bourse défaillante. Elle est toutefois plafonnée à 200 000 DH par client, quel que soit le niveau de ses avoirs perdus, et à 30 MDH par société de bourse. Or, à fin 2011, le fonds de garantie ne totalisait qu'un montant de 27,4 MDH, ce qui n'atteint même pas le plafond fixé pour l'indemnisation en cas de faillite d'une seule société de bourse. Au cas où les disponibilités du fonds de garantie ne couvrent pas la totalité des avoirs en titres et espèces de la clientèle, l'indemnisation s'effectue d'une manière proportionnelle aux avoirs de chaque client. Notons par ailleurs que si le client d'une société de Bourse défaillante ne perd pas tous ses titres, il a la possibilité de les transférer à une autre société de Bourse de son choix comme il peut couper sa position et récupérer la contre-valeur de son portefeuille en numéraire. Au final, et après que chaque client ait reçu son indemnisation, le CDVM retire l'agrément à la société de bourse et cette dernière est dissoute. Ce scénario, bien que possible techniquement, reste improbable aux yeux des opérateurs du marché. D'autant plus que le cadre légal, notamment après l'élaboration de la circulaire unique du CDVM, a été renforcé. En effet, le régulateur a mis en place une «muraille de Chine» entre le compte propre de l'intermédiaire boursier et celui des clients. La société de bourse ne peut utiliser les avoirs de ses clients, pour son propre compte, qu'après autorisation préalable de leur part. L'objectif de cette ségrégation étant d'éviter que la société de bourse n'utilise abusivement les avoirs de ses clients pour réaliser des opérations de contrepartie.