La possibilité de renvoi du chef du gouvernement supprimé dans l'actuelle Constitution. Le Roi peut toujours déclarer l'Etat d'exception, mais non sans contraintes. Unanimement, on a vu dans l'obligation pour le Roi de choisir le chef du gouvernement au sein du parti arrivé en tête un signe de renforcement de la démocratie. Mais ce n'est pas le seul changement dans la Constitution. Le renvoi du gouvernement semble désormais impossible. En effet, si l'article 24 de la Constitution de 1996 précise bien que le Roi «met fin aux fonctions du gouvernement, soit à son initiative, soit du fait de la démission du gouvernement». L'article 47 de la nouvelle loi fondamentale stipule, lui, que «le Roi peut, à son initiative, et après consultation du chef du gouvernement, mettre fin aux fonctions d'un ou de plusieurs membres du gouvernement». Il s'agit d'un ou de plusieurs ministres, et non de renvoyer le gouvernement dans sa totalité. «On en voit bien la justification : celui qui a été choisi par les urnes doit bénéficier d'une garantie de maintien au pouvoir assez longtemps pour faire ses preuves, sauf à être victime du vote d'une motion de censure», fait observer un juriste. Est-ce à dire que le Roi ne peut pas démettre, dans l'absolu, le chef du gouvernement ? Rien dans les textes n'apporte de réponse. Si juridiquement rien ne l'interdit, politiquement, l'initiative est quelque peu délicate. Dans la même logique, les rapports entre le Roi et le pouvoir législatif ont quelque peu changé. Les articles qui traitent de la dissolution du Parlement sont, certes, restés les mêmes, le changement se situe au niveau de la procédure. Dans l'ancien texte, le Roi peut faire recours à l'arbitrage populaire. En effet, le Roi peut demander une nouvelle lecture au Parlement, si une loi ne lui plaît pas. Si le Parlement refuse, le Roi la soumet à un referendum, autrement dit à l'arbitrage du peuple. «Si ce dernier rejette la loi, cela veut dire que le Parlement ne le représente plus», explique Abderrahmane Baniyahia, professeur de droit constitutionnel. Cela alors que le Parlement est censé représenter la volonté populaire. Cette procédure contenue dans l'article 69 de l'ancienne Constitution ne figure plus dans le nouveau texte. L'article 95 se limite à énoncer que «le Roi peut demander aux deux Chambres du Parlement qu'il soit procédé à une nouvelle lecture de tout projet ou proposition de loi. (…). Cette nouvelle lecture ne peut être refusée». On retrouve pratiquement le même raisonnement dans l'article 59 qui traite de l'Etat d'exception. Un va-et-vient entre les lois fondamentales de 1996 et celle de 2011 le montre clairement. Ainsi, «des événements susceptibles de mettre en cause le fonctionnement régulier» devient «des événements qui entravent le fonctionnement régulier…», il est ajouté une obligation de consulter le chef du gouvernement. De même, «le retour au fonctionnement normal des institutions» devient «le retour, dans le moindre délai, au fonctionnement normal des institutions» ; «l'Etat d'exception n'entraîne pas la dissolution du Parlement» est remplacé par «le Parlement ne peut être dissous pendant l'exercice des pouvoirs exceptionnels». Il est également prévu que «les libertés et droits fondamentaux prévus par la présente Constitution demeurent garantis». Après, «il est mis fin à l'Etat d'exception dans les mêmes conditions de sa proclamation», il est précisé «dès que les conditions qui l'ont justifié n'existent plus». On le voit, il s'agit de toute évidence de mettre une limite à une utilisation trop hâtive de cet article lourd de menace pour le parlementarisme.