La filiale du groupe allemand Delivery Hero a annoncé, lundi, qu'elle va changer le modèle salarial pour ses 5.000 livreurs en Espagne, abandonnant donc leur statut de travailleurs autonomes. Au Maroc ces derniers gardent encore le statut d'auto-entrepreneurs. Suivez La Vie éco sur Telegram Après plus de trois ans de bras de fer avec les autorités, la plateforme espagnole spécialisée dans la livraison Glovo a dû se plier aux règles du code du travail pour pouvoir continuer d'exercer ses activités en Espagne et non plus traiter ses coursiers comme des indépendants. Ainsi, la filiale du groupe allemand Delivery Hero a annoncé, lundi, qu'elle va changer le modèle salarial pour ses 5.000 livreurs en Espagne, abandonnant donc leur statut de travailleurs autonomes. Cette transition marque un changement stratégique majeur pour l'entreprise, qui a affirmé, dans un communiqué, son « engagement ferme envers l'Espagne, son marché d'origine et principal débouché ». C'est la première fois que la multinationale va reconnaître à ces travailleurs le droit d'avoir un salaire, des vacances payées, des cotisations sociales et une protection en cas de maladie ou d'accident. Notons qu'au Maroc leur modèle économique consiste en le recours à des livreurs, non-salariés, qui doivent disposer d'un statut d'auto-entrepreneur et sont donc payés comme prestataires. Toujours est-il, selon la multinationale, ce « changement de modèle opérationnel » qui vient d'avoir lieu en Espagne pourrait entraîner un impact estimé à 100 millions d'euros sur le revenu brut d'exploitation pour l'exercice 2025. Cette décision de Delivery Hero de passage au salariat concerne l'ensemble des villes espagnoles où Glovo opère, soit plus de 900 localités, et tous les segments de l'application. L'entreprise, qui n'a pas précisé la date exacte de mise en œuvre ni les modalités d'ouverture des discussions avec les partenaires sociaux, a assuré que cette nouvelle organisation ne compromettrait ni la disponibilité des livreurs, garantie « à tout moment de la journée », ni les délais de livraison. Glovo procède tout de même au changement demandé pour s'adapter aux règles de la loi en introduisant une « présomption de salariat » pour tous les coursiers utilisant les applications de livraison. Autrement dit, le groupe adapte son modèle pour continuer d'opérer dans le pays ibérique comme une entreprise de location de services, et donc comme un employeur. La plateforme technologique, fondée en 2015 à Barcelone, souhaite inclure d'autres acteurs du secteur dans cette démarche en vue de promouvoir des « processus de transition similaires » et de parvenir à des accords collectifs. L'entreprise a pris cette décision après avoir été sous les feux des critiques pendant des années en raison de son recours au statut d'auto-entrepreneur, ce qui a conduit une juge de Barcelone à enquêter sur une possible violation des droits de ses travailleurs. Tout a commencé en septembre 2020, quand la Cour suprême espagnole a établi l'existence d'un contrat de travail entre un livreur et la plateforme Glovo. Le gouvernement espagnol a transformé cette jurisprudence en législation avec l'adoption par décret de la « loi Rider », deux mois après avoir trouvé un accord avec les organisations patronales et syndicales du secteur. Ce texte impose aux plateformes de livraison à domicile d'employer leurs livreurs en tant que salariés et non comme travailleurs indépendants. Avec cette réforme, l'Espagne devient le premier pays européen à garantir à ces livreurs les protections et droits conférés par le Code du travail comme salariés et non comme travailleurs indépendant, un statut sur lequel les plateformes de livraison ont fondé leur modèle avant d'être remis en cause dans un nombre croissant de pays ces dernières années.