A partir de 5,5% pour un prêt immobilier et autour de 8% pour un crédit conso, voire jusqu'à 6% pour un financement auto. Pour les entreprises, le crédit à l'équipement démarre à 5,9% et les crédits de trésorerie se négocient à partir de 5,2%. C'est une véritable épée de Damoclès qui pèse sur les taux des crédits. En raison de conditions de refinancement de plus en plus tendues, les banques pourraient être amenées à augmenter progressivement le coût de leur financement autant aux particuliers qu'aux professionnels. En effet, ces établissements peinent à collecter suffisamment de ressources pour faire face à leurs besoins à court terme afin de financer l'économie. Les dépôts bancaires auront quasiment stagné l'année passée alors qu'il y a encore 5 ans ils affichaient une progression à deux chiffres. Certes, la progression de l'encours des crédits a également baissé. Aux dernières estimations, son évolution au cours de l'année 2011 s'établit aux alentours des 10% et l'on est loin des 30% de l'année 2008 par exemple. Mais il reste que le gap entre progression des ressources et celles des emplois est considérable. A cela s'ajoute le fait que la baisse de 11,2% sur l'année écoulée des réserves en devises (-11,2%) détenues par les banques en propre ou auprès de Bank Al-Maghrib (BAM), tout comme la hausse de 9,3% en 2011 du volume de pièces et billets de banque en circulation (hors du circuit bancaire), ait été un facteur aggravant. On pourrait croire qu'une moindre sollicitation des ressources des banques ferait qu'une remontée des taux créditeurs ne se justifierait pas. Seulement, sur les dernières années, le secteur bancaire s'est empêtré dans une situation très compliquée provoquée par des problèmes de trésorerie. Ceux-ci se reflètent, d'une part, par un besoin net de liquidité du système bancaire qui a pointé à 38 milliards de DH à fin 2011 contre 4,2 milliards de DH une année auparavant, et, d'autre part, par un coefficient d'emploi (crédits à l'économie rapportés aux ressources clientèle) qui dépasse les 106% actuellement. Mais, concrètement, quel effet tout cela a-t-il eu sur les crédits aux professionnels et aux particuliers ? Quels sont les taux pratiqués actuellement pour ces financements et comment ont-ils évolué ? Crédit immobilier : faible hausse, mais conditions plus strictes Pour les crédits immobiliers accordés aux particuliers d'abord, les taux se situent aujourd'hui dans une fourchette de 5,5% HT (valable pour les crédits à taux variable) à 6,5% (constaté sur les formules fixes). A priori, il en ressort que les minimums de taux se sont relativement appréciés par rapport à la période faste dont a bénéficié le secteur de l'immobilier en 2006-2007 qui a connu un minimum de 5,07%. Mais pas tant que cela, à y voir de plus près, car il y a 4 ans les banques bénéficiaient de conditions de liquidités bien plus favorables qui profitaient de manière mécanique aux taux plancher des crédits immobiliers. En fait, en 4 ans, en dépit des conditions de refinancement de plus en plus tendues, les banques n'auront opéré qu'une seule augmentation officieusement concertée au niveau du Groupement professionnel des banques (GPBM), fin 2009, de quelques points de base, pour consolider leurs marges bénéficiaires sur les financements de crédits immobiliers. Mais, depuis, les taux des crédits immobiliers se sont stabilisés, et les enquêtes trimestrielles de BAM laissent même apparaître une légère baisse intervenue courant 2011. Cela dit, en comparaison avec les années porteuses du marché de l'immobilier, les conditions de financement sont devenues bien plus strictes. En effet, aujourd'hui, chez tous les établissements de la place, les durées de crédits ne dépassent pas 25 ans et les quotités de financement atteignent exceptionnellement les 105% de la valeur du bien (les 5% en plus couvrant l'assurance-vie ou les frais d'acquisition). Autrement dit, on est bien loin des formules de crédits qui couraient sur 40 ans pour les jeunes actifs avec des financements atteignant 125% du prix du bien, proposées au plus haut de l'immobilier. Mais dans l'ensemble, il demeure que les banques pratiquent une politique volontaire en termes de conditions de financement pour les crédits à l'habitat, et cela se comprend. «Avec le ralentissement des transactions sur le marché de l'immobilier, le volume de dossiers à financer s'amenuise, ce qui accroît d'autant plus la concurrence entre les banques pour proposer les financements les plus avantageux et drainer de la clientèle», éclaire un professionnel. Ce qui porte à croire que les banques devraient plutôt maintenir à moyen terme un statu quo sur les taux des crédits immobiliers ou du moins qu'elles devraient s'abstenir d'augmenter le coût de ces financements en vue d'accroître leur marge. En revanche, elles seraient contraintes de répercuter des augmentations de taux si les taux plancher venaient à croître sensiblement. Et c'est précisément ce qui se profile pour les crédits à taux variable. Selon les analystes du CIH, ceux-ci pourraient monter à 7, voire à 8% sur les années à venir, en raison de la nouvelle indexation des crédits à taux variable sur le taux du marché interbancaire, au lieu des bons du trésor à long terme, entrée en vigueur en 2010. Mais cette donnée semble déjà avoir été intégrée par les emprunteurs, à savoir que plus de 80% des crédits à l'habitat consistent aujourd'hui en formules à taux fixe. Crédit conso : la forte concurrence a fait baisser les taux Dans un marché très concurrentiel, les taux du crédit à la consommation connaissent également une évolution maîtrisée. Les taux actuels pour les prêts non affectés démarrent à 8%. Pour les financements auto, subissant actuellement une forte concurrence, les sociétés de la place descendent même jusqu'à 6%, soit à peu de choses près leur coût de refinancement. Ces taux très avantageux sont du moins accessibles à travers des offres promotionnelles (voir encadré). Mais dans l'ensemble, sur la durée, les taux du crédit à la consommation ont tendanciellement été en baisse. Rappelons en effet qu'à fin 2006, ils atteignaient 8,66% en moyenne selon les relevés de BAM, contre 7,30% vers la fin 2011. Et pour la suite ? La concurrence qui fait rage dans le secteur est appelée à durer surtout avec un effectif de sociétés de crédit à la consommation agréées au Maroc dépassant la vingtaine. Crédit d'équipement : taux en hausse pour l'immobilier et le tourisme S'agissant des crédits aux professionnels, les taux de crédits à l'équipement qui financent l'investissement démarrent à 5,9% actuellement, d'après les données collectées auprès des banques. Selon les professionnels, ces taux n'ont en fait connu aucune hausse en 2011, ce que d'ailleurs tendent à confirmer les enquêtes trimestrielles de BAM qui font même ressortir une baisse de taux moyen à 6% au troisième trimestre 2011 contre 6,15%, le trimestre d'avant. Si l'on en croit les mêmes statistiques de la Banque centrale, la détente sur les taux des crédits à l'équipement a cours en fait depuis fin 2008, date à laquelle ces taux avaient approché les 7%. Dans un contexte de hausse des créances en souffrance des banques, une telle tendance des taux a de quoi étonner. «Le coût du risque a en effet augmenté ces derniers mois pour certaines entreprises, mais grâce au système de notation interne, cela n'a fait croître que les taux d'intérêt de ces seules entreprises, ce qui n'empêche pas une baisse des taux en termes moyens», indique un responsable au sein d'une banque. Et s'agissant des profils à risque, opérant notamment dans l'immobilier et le tourisme mais aussi l'industrie, en plus de voir leurs taux augmenter, ceux-ci doivent aussi faire face à plus d'exigences en termes de garanties. «Les banques exigent plus de cautions bancaires et personnelles qu'auparavant», explique un opérateur dans l'immobilier. Pour les groupes étrangers, les banques interviennent même dans le choix des établissements internationaux devant donner leur caution. Crédit de trésorerie : moins chers qu'en 2008 S'agissant enfin des crédits de trésorerie, leurs taux actuels démarrent à 5,2%. En 2011, le coût de ces financements a eu tendance à croître selon les professionnels et les données de BAM, ce qui porte à croire que le risque sur les clients est plus important en raison d'un recouvrement plus lent. Cependant, sur la durée, ces financements ont vu leur coût baisser puisqu'à fin 2008 le coût de ces financements démarrait à plus de 6%.