La croissance a toujours tourné autour de 7% par an. L'exercice 2010 aura été décevant pour l'industrie pharmaceutique qui se retrouve confrontée à une première dans l'histoire du Maroc post-indépendance : aussi bien la consommation que le volume d'affaires réalisé stagnent. Ainsi, fin novembre, le chiffre d'affaires du secteur n'a progressé que de 1,2% par rapport à la même période de l'année précédente, à 8 milliards de DH, d'après les statistiques arrêtées par l'Association marocaine de l'industrie pharmaceutique (Amip). Cette maigre progression risque même de se voir rognée au terme de l'exercice écoulé. Selon Abdelhak Sedrati, président de l'Amip, «le mois de décembre est traditionnellement un mois de baisse de la consommation, particulièrement au cours de la dernière semaine où l'on pense plus à la fête qu'au médecin». Au final donc, les ventes en valeur devraient afficher une progression nulle. Un signe d'autant plus inquiétant qu'à cette stagnation du chiffre d'affaires du secteur correspond la même stagnation en volumes vendus. A fin novembre, les Marocains avaient consommé entre boîtes, flacons et ampoules injectables 286 millions d'unités, soit quasiment le même niveau que l'année précédente. Or, le marché, depuis plusieurs années, connaît une croissance régulière de 7% par an aussi bien en volume qu'en valeur. Dans le détail, sur les onze premiers mois de 2010, les plus grosses ventes en valeur ont été réalisées sur le Doliprane avec 143,2 MDH pour un volume de 16,4 millions de boîtes. Suivent Augmentin avec 115,6 MDH et les laits pour enfants Nursie et Nan avec respectivement 75,7 et 69,8 millions. Les antibiotiques Amoxyl et Néomox ont totalisé un chiffre d'affaires de 65,1 et 58,8 MDH. Arrivent ensuite Ventoline et Oeds avec 55,3 et 46,9 MDH. Par unités vendues, le classement est, bien entendu, totalement différent (voir graphe) . Que se passe-t-il dans le secteur ? Les industriels avouent ne pas avoir d'explications précises et avancent toutefois plusieurs facteurs dont la conjugaison aurait été déterminante. La baisse du prix de certains médicaments contrebalancée par l'arrivée de nouveaux produits chers Parmi ces facteurs, il y a l'effet à retardement de la crise de 2008-2009. Ainsi, pour Abdelhak Sedrati, président de l'Amip, plusieurs secteurs, dont principalement le bâtiment et le textile, ont subi les effets d'une mauvaise conjoncture durant les deux dernières années. Ce qui a entamé le pouvoir d'achat et limité par conséquent la consommation de plusieurs produits dont les médicaments. Autre cause, l'Assurance maladie obligatoire (Amo) mise en place, il y a quatre années maintenant et pourtant élargie aux soins ambulatoires depuis début 2010, n'a pas non plus stimulé la vente de médicaments, contrairement aux prévisions. «Il n'y a pas une utilisation optimale de cette couverture médicale», se désole le président de l'Amip. Un autre élément qui a pu jouer est qu'en raison de la grippe AH1N1 qui avait suscité une grande peur, les ventes de médicaments contre le rhume, la grippe, la fièvre et les bronchites avaient été importantes durant l'année 2009. La demande moins significative de ces produits au cours de la même période de 2010 pourrait donc avoir donc influé sur le résultat final. Enfin, les deux baisses du prix de certains médicaments, décidées au cours de l'exercice 2010, peuvent aussi justifier la petite évolution du chiffre d'affaires du secteur. Sauf que l'on aurait pu s'attendre à une hausse des quantités consommées et il n'en est rien. De plus, explique M. Sedrati, les baisses de prix de certains produits ont été contrebalancées par l'arrivée sur le marché de nouveaux médicaments chers. Globalement, la consommation de médicament reste une question de pouvoir d'achat. Selon l'Amip, le niveau d'activité durant l'année 2010 confirme l'exiguïté du marché local. Ainsi, le chiffre d'affaires réalisé par le secteur privé ne dépasse pas 300 DH par habitant et par an. Et la solution ? En attendant une optimisation de l'utilisation du régime de l'assurance maladie, seule à même de pousser les ventes de manière significative, certains professionnels du secteur jouent la carte de l'international par le développement des exportations qui représentent 10% du chiffre d'affaires global du secteur mais aussi par la recherche et l'enregistrement de brevets à l'international. Par exemple, un laboratoire comme Laprophan dispose aujourd'hui de quatre brevets enregistrés dans des pays de l'Union Européenne et d'autres, à l'instar de Sothema, investissent directement à l'étranger.