Après coup de Mr Et-Tayeb Houdaifa. «Trop vite», de Jean-louis Servan Schreiber ; «Accélération», écrit par Harmut Rosa, «Le Grand Accélérateur», œuvre de Paul Virilio et «L'invention du monde», dernier essai de Patrick Poncet, ont un double dénominateur commun : ils sont parus en 2010 et ils se récrient contre la tyrannie du temps, qui nous rend impuissants à conduire notre vie ou de se laisser porter par elle. Si on voulait réinventer la vie, prônent en chœur les auteurs, il faudrait réapprendre la lenteur. Cet éloge de la lenteur devrait nous réjouir, nous Marocains, dont l'adagio, sinon le lento, est le tempo favori, au point d'avoir érigé la lenteur en suprême règle de conduite et de la hisser au rang de valeur impérissable. Il est significatif que notre langue, au travers d'un luxe de proverbes et de poncifs, nous mette en garde contre les écueils de la célérité. Rien ne sert de courir tant «l'année est longue» ; en se précipitant, «on se met fatalement en retard», ou pis, «on s'avance vers la mort»…Forts de cette sagesse, nous marchons dans la rue d'un pas de sénateur, au travail, nous lambinons, avant de prendre une décision, nous tergiversons longuement et, souvent, nous différons nos bonnes résolutions ou nos grands desseins. Il n'y a qu'au volant où nous ne vouons pas un culte à la lenteur. Nous ne résistons pas à la tentation de rouler à fond de train, malgré les risques encourus. Et, selon le premier bilan de l'entrée en vigueur du nouveau Code de la route, nous n'avons pas tangiblement changé de comportement au volant. Les Marocains sont bizarres.