Devant tout patient souffrant d'une hypertension artérielle, d'un diabète, d'une anémie ou à¢gé de plus de 65 ans, le médecin doit penser à l'insuffisance rénale chronique. Face à une anémie, moins d'un spécialiste sur deux, qu'il soit endocrinologue, cardiologue ou interniste, évoque la possibilité d'une insuffisance rénale chronique (IRC), dont la seule alternative thérapeutique, en dehors de la greffe rénale, est la dialyse sinon c'est le décès. C'est une des principales conclusions d'une enquête menée par l'Association marocaine de lutte contre les maladies rénales «Reins», auprès d'un échantillon représentatif de médecins spécialistes. Le Pr Amal Bourquia, présidente de l'association, considère que «si le nombre de personnes souffrant d'une insuffisance rénale chronique terminale et traitées par dialyse avoisine les 9 000, il est fort probable qu'en amont de ce traitement de suppléance, environ un million de Marocains seraient atteints de maladies rénales chroniques, pour lesquels les médecins devraient être vigilants pour éviter qu'ils n'atteignent le stade où leur survie ne peut être assurée que par la dialyse». Par ailleurs, étant donné la pauvreté des symptômes indiquant une pathologie rénale, l'IRC est très méconnue des patients, lesquels prennent rarement l'initiative de consulter un néphrologue, renchérit cette spécialiste du rein. «De ce fait, sensibiliser sur les maladies rénales et leur dépistage précoce doit être une étape vitale du processus de prévention de ce problème majeur de santé publique», prévient le Pr Bourquia. Les premiers résultats de l'enquête, qui a été menée essentiellement auprès de médecins de Casablanca, a montré que 63% des praticiens questionnés estiment que leurs connaissances sur l'IRC est moyenne, dont 92% ont exprimé le besoin de bénéficier de formation médicale continue dans ce domaine. Pour les médecins sondés, l'hypertension artérielle et l'âge constituent les situations maladives qui exposent à un risque rénal. Ainsi, 85% de ces médecins proposent un dépistage systématique lorsque le patient est hypertendu, diabétique, anémique ou âgé de plus de 65 ans. Autre résultat intéressant de cette enquête : les deux tiers (63%) orientent le patient vers le néphrologue lorsqu'il découvre une IRC, tandis que le tiers restant démarre un traitement protecteur des reins. Autre renseignement, 57% des praticiens interrogés pointent du doigt le manque de feedback, du fait qu'ils perdent de vue le patient quand ils l'orientent vers le néphrologue. Par contre, les médecins qui se basent sur les anomalies des marqueurs biologiques, pour apprécier les fonctions rénales, ne représentent que 40%. Par ailleurs, cette enquête a mis en évidence les difficultés de diagnostiquer une insuffisance rénale chronique et de formaliser sa prise en charge en médecine spécialisée, puisqu'un médecin sur deux qualifie de ''très délicat'' le diagnostic et le traitement d'une insuffisance rénale. «La connaissance du potentiel évolutif de l'insuffisance rénale chronique par les médecins spécialistes et leurs patients est le meilleur garant pour assurer une bonne prise en charge thérapeutique», conclut le Pr Bourquia.