Le marché de la dette privée a été plus animé que les années précédentes en raison du renforcement des fonds propres des banques. Les rendements offerts aux investisseurs sont supérieurs à ceux des bons du Trésor pour un risque maîtrisé. Les volumes restent néanmoins faibles par rapport aux levées du Trésor et les investisseurs manquent de visibilité quant aux émissions futures. Le recours au financement obligataire des grands groupes cotés en Bourse est de plus en plus fréquent. En 2008, en effet, ce sont cinq établissements qui ont émis des obligations pour pas moins de 8,5 milliards de DH, contre 4,27 milliards l'année dernière et 3,88 milliards en 2006. Les opérations sont de plus en plus sophistiquées, allant de l'emprunt ordinaire (obligations simples) à l'emprunt subordonné (obligations plus risquées pour les détenteurs et classées en fonds propres complémentaires par les émetteurs) et même perpétuel (obligations à durée indéterminée). La principale raison de cet engouement est l'utilisation massive par les banques de cette source de financement. Si la Société Générale et la BMCI ont opté pour des augmentations de capital en numéraire afin de renforcer leurs fonds propres, BMCE Bank, Attijariwafa bank et Crédit du Maroc ont choisi d'émettre des obligations subordonnées pour y parvenir. Une technique utile : la subordination permet en effet d'assimiler l'emprunt à des fonds propres car il n'est remboursé en cas de liquidation qu'après désintéressement de tous les créanciers chirographaires. Les particuliers en profitent à travers les OPCVM, les caisses de retraite et les compagnies d'assurances BMCE Bank a lancé cette année deux emprunts d'un milliard de DH chacun, dont l'un a pour particularité une durée indéterminée pour le remboursement des obligations. Attijariwafa bank a également effectué deux opérations, l'une portant sur 1 milliard de DH d'obligations non cotées, avec une maturité de 5 ans, et l'autre constituée de quatre tranches cotées et non cotées pour un total de 2 milliards de DH sur 10 ans. Enfin, Crédit du Maroc a émis pour 600 MDH d'obligations cotées et pour 400 MDH d'obligations non cotées sur une durée de 10 ans. «Ces émissions ont été lancées par les banques principalement pour accroître leur capacité à distribuer des crédits et pour rester en conformité avec les ratios prudentiels de Bank Al-Maghrib», explique le directeur d'une salle de marchés de la place. D'autres besoins sont également financés par ces emprunts, notamment l'extension des réseaux d'agences et la croissance externe de ces établissements, notamment en Afrique. Outre ces banques, il faut compter le groupe Ona et le cimentier Holcim qui ont émis des obligations normales d'un total d'un milliard de DH pour le premier, en vue de financer des investissements dans ses différentes branches d'activité, et de 1,5 milliard pour le second, en vue d'accroître ses capacités de production de ciment. Pour les investisseurs, ces emprunts constituent un placement intéressant en raison des taux d'intérêt offerts. En témoigne le taux de souscription qui est de 100% dans toutes les opérations. En effet, les émetteurs proposent des rendements supérieurs à ceux des bons du Trésor de même maturité. Le surplus, appelé prime de risque ou prime d'émission, peut atteindre 125 points de base, suivant la maturité de l'emprunt et le risque financier que présente l'émetteur, ce qui peut faire grimper le taux d'intérêt proposé à plus de 5%. Et si ces émissions obligataires sont exclusivement réservées aux investisseurs institutionnels, les particuliers en profitent également à travers les OPCVM, les caisses de retraite et les compagnies d'assurance (plans d'épargne). Cela dit, même si le nombre de sociétés émettrices et les montants levés sont en croissance, l'argent brassé par le marché de la dette privée est encore loin de pouvoir rivaliser avec celui de la dette souveraine. En effet, le Trésor, malgré ses sorties moins récurrentes depuis 2007, reste le principal acteur du marché obligataire avec des levées hebdomadaires de plusieurs milliards de DH. Les emprunts privés ne constituent pour les investisseurs qu'une alternative pour diversifier leurs placements. Par ailleurs, pour l'établissement de leurs stratégies annuelles d'investissement, les institutionnels manquent de visibilité quant aux émissions obligataires futures.