Elu le 29 septembre à la tête de la Fédération des industries du cuir, Azzedine Jettou fait le point sur le secteur. Performances, stratégie sectorielle et développement de partenariat avec des opérateurs étrangers. Quelle est la situation actuelle du secteur qui a été, à l'instar des autres industries, sérieusement impacté par la crise sanitaire ? Le secteur du cuir, à l'instar des autres secteurs industriels, a connu une régression, à la fois au niveau de la production et des exportations de plus de 30% durant la période sanitaire. Cette situation a commencé à s'améliorer à partir du deuxième semestre de 2021. Et selon les dernières statistiques du mois d'août, le secteur a connu une amélioration de ses exportations, qui est essentiellement portée par la filière de la chaussure, qui a enregistré, durant les huit premiers mois de l'année, une hausse de 30,3%, soit 514 MDH en plus. Ses exportations sont passées de 1,6 MMDH pour la même période de 2021 à 2,210 MMDH. Cette reprise est-elle le résultat des mesures mises en place dans le cadre de votre Plan de relance sectoriel ? En effet, la Fedic a mis en place, en étroite collaboration avec le ministère de tutelle et la CGEM, un plan de relance, en réponse à la crise sanitaire. Ce plan s'articulait autour de plusieurs axes, dont les plus importants sont le «Made In Morocco», la préférence nationale et l'incitation aux investissements dans le secteur. Les résultats ont été satisfaisants. En effet, le relèvement des taux de douane d'importation a permis de donner un coup de fouet aux fabricants du marché local. La mise en œuvre de la banque de projets par le ministère de tutelle a eu comme conséquence également la réalisation des dizaines d'investissements ciblés dans le secteur du cuir. Je peux vous dire que le secteur aujourd'hui s'est bien relevé et son attractivité s'est nettement améliorée. La production de l'industrie du cuir est essentiellement destinée à l'export. Qu'en est-il du développement de votre offre sur le marché local ? Oui, la production reste destinée principalement à l'export. Et les industriels marocains du cuir sont de plus en plus compétitifs, compte tenu des coûts logistiques et du changement de la carte mondiale du sourcing. Cependant, notre stratégie sectorielle accorde une grande importance au développement du marché local et poussant vers une offre adaptée aux besoins et au pouvoir d'achat des consommateurs. D'ailleurs, une partie significative des derniers investissements réalisés est destinée au marché local. Il y a certainement des mesures prioritaires prévues par le nouveau bureau de la FEDIC… Je viens d'être élu, la semaine dernière, à la tête de la Fédération. Le bureau constitué ne s'est pas encore réuni, mais je peux déjà dire que la question de la formation professionnelle, de l'achèvement des zones industrielles amorcées (Ain Cheggag et Casa city Shoes), de la promotion internationale, de la mise à niveau des tanneries et de l'amont en général et de la promotion de l'investissement national et étranger dans le secteur du cuir, figureront parmi les axes prioritaires du présent mandat. Pourrait-on avoir des détails ? Comme évoqué plus haut, l'achèvement des deux zones de Ain Cheggag et de Casa city Shoes permettra de créer plus de 15 000 emplois stables et la réalisation d'un investissement privé de plus de 700 MDH. Autre projet de développement auquel nous réfléchissons est la création d'une bourse du cuir à Ain Cheggag. Cette structure permettra d'organiser les échanges de peaux brutes tout en assurant les exigences de qualité requises en la matière. La formation professionnelle est un axe de développement majeur. En effet, la refonte du système ainsi que l'implication des professionnels représentent des facteurs clés de succès pour les projets d'investissements nationaux et étrangers futurs. Justement, y-a-t-il des projets de partenariats avec des opérateurs étrangers ? Aujourd'hui, nous considérons que l'investissement étranger apportera un nouveau souffle à notre industrie et permettra, à terme, d'améliorer la compétitivité et l'attractivité de nos écosystèmes du cuir. Dans le secteur, nous comptons des opérateurs portugais, italiens, espagnols et turcs. On peut ainsi citer Décathlon, LC Waikiki, FLO, Defacto qui produisent déjà ou qui sont en cours d'implantation. Et il est prévu de créer 5 000 emplois directs dans le secteur. Par ailleurs, nous avons beaucoup de demandes de la part de groupes chinois qui envisagent de créer des unités industrielles destinées à l'exportation, à partir du Maroc, vers les marchés européen et africain. La qualification de notre main-d'œuvre est un des principaux points d'attrait. Quelles sont les perspectives pour ce secteur ? Compte tenu du contexte mondial marqué par une forte inflation en raison de la guerre en Ukraine, nos plans d'action vont s'adapter à cette situation exceptionnelle. En effet, la cherté des matières premières et le prix élevé du transport international ont fortement impacté la compétitivité de nos produits sur le marché mondial. Mais un mal pour un bien, l'Europe est en train de revoir ses sources d'approvisionnement et se rapproche de plus en plus du Maroc. Une opportunité pour notre secteur. Donc nous sommes optimistes.