Sous le thème «La cuisine du lien», le Festival de Fès d'art culinaire a dressé, du 28 au 30 avril, une table somptueuse autour de laquelle chantaient les saveurs des cuisines du monde. Consistant et délicieux. Enla matinée dominicale du 30 avril, le Festival de Fès d'art culinaire installe ses derniers fourneaux. Une cuisinière s'impatiente, elle est venue apprendre aux amateurs la science de la warqa, appelée ailleurs feuille de brick, mais se refuse à officier devant une assistance clairsemée. Pour une fois, le Palais El Mokri, majestueux site du festival, ne fait pas le plein. La faute en incombe au repas pantagruélique servi la veille à l'hôtel «Les Mérinides». Beaucoup de festivaliers ont attrapé la gueule de bois après cette orgie de succulente chère. Indulgente, Fatéma Hall, grande prêtresse de cette messe gastronomique, ne se formalise pas de cette défection momentanée. Elle est sur un nuage et ne tient pas à en redescendre quoi qu'il advienne. On ne saurait lui en faire grief, tant cette troisième édition qu'elle a mitonnée avec gourmandise est réjouissante à plus d'un titre. Mariage heureux des gastronomies Au premier chef, si l'on ose dire, la qualité des maà®tres-queux conviés à la table. Le dessus du panier, assurément : Pascal Barbot, élu en 2005 cuisinier de l'année au guide Gault et Millau ; Antoine Heerah, un ancien de chez Passard (3 étoiles Michelin à Paris); Jacques Pourcel, créateur du fameux restaurant «Le Jardin des sens» à Montpellier ; Patrick Martin, deux fois médaillé d'or de l'Académie culinaire de France ; Jacques Chibois qui supervise cinq restaurants à Cannes, dont le «Royal Gray», connu de tous les gourmets. Sans compter une brochette de cuisinières anonymes et pourtant pétries d'un talent étincelant. C'est celles-ci que les visiteurs, le plus souvent, assiègent pour déguster des mets apprêtés avec amour et virtuosité. Ah, ce zaâlouk de fèves qui fond dans la bouche ou encore cette salade cuite de khoubbiza (mauve), épicée à souhait, qui comble d'aise les palais exigeants ! Le menu de cette édition est un bel exercice gourmand et dépaysant. Cuisines française, mauricienne, catalane, grecque côtoient la gastronomie marocaine, véritable morceau de choix. Et pour prouver que les cuisines ne sont pas des univers clos, le festival se plaà®t parfois à les allier. C'est ainsi qu'un plat grec s'orne d'exquis vermicelles «cousus main» par une cuisinière marocaine. C'est ainsi que le grand chef Antoine Heerah et une cuisinière marocaine offrent une conjugaison intelligente de deux terroirs, le Maroc et l'Ile Maurice. Exemple de dialogue harmonieux des cuisines, démontrant que le thème choisi, «La cuisine du lien», n'est pas un effet d'annonce. Le Festival de Fès d'art culinaire a trouvé la bonne recette. On s'en pourlèche les babines.