Il faut différencier avant tout entre l'erreur et la faute. Quand il y a dérapages sur les valeurs et l'organisation de l'entreprise, il ne faut pas hésiter à punir sévèrement. On sanctionne une faute et non une personne. OMAR BENAINI Consultant associé chez LMS ORH Même si la décision émane en dernier lieu du dirigeant suprême, il est préférable qu'elle soit concertée. La vie de l'entreprise ne se passe pas toujours en douceur. Il arrive aux salariés de déraper.En tout cas, le pouvoir disciplinaire fait partie des prérogatives de l'employeur. A ce titre, et dans le respect du Code du travail,il peut édicter des règles qui, en cas de non-respect,donneront lieu à des sanctions. Les explications de Omar Benaini, consultant associé à LMS ORH. La Vie éco : Quels rapports les managers entretiennent avec la sanction ? Omar Benaini : D'après des études que nous avonsmenées sur la thématique du management des entreprisesmarocaines, nous avons constaté que le rapport avec la sanction figure parmi les problématiquesmajeures desmanagers. Une sanction doit être généralement prise avec beaucoup de nuances, car il ne faut pas oublier qu'elle peut influer négativement sur le comportement du supposé fautif si elle est disproportionnée ou jugée injuste par celui-ci. Pour éviter ces problèmes, il faut au préalable commencer par fixer des règles communes partagées par l'ensemble des salariés et qui incluent des dispositions relatives à la discipline. Parce que, souvent, dans les entreprises, il y a de l'ambiguà ̄té sur ce qui est toléré ou ce qui est interdit. Du coup, certains se font taper sur les doigts parce qu'ils n'ont pas su décoder les règles. Autre point important : les managers ne font pas la distinction entre la familiarité, la convivialité et la fermeté. C'est-à -dire qu'ils n'assument pas jusqu'au bout leurs décisions quand il s'agit de sanctionner. Si les règles sont claires dès le départ, il est certain que l'on commettra moins d'erreurs. On ne peut non plus nier le droit à l'erreur.Dans certains cas, on peut fermer les yeux sur une faute, sans oublier de rappeler à l'ordre quand il le faut.Dans tous les cas, on doit toujours savoir qu'on sanctionne l'erreur et non la personne. Ce n'est pas toujours facile.Aussi, il faut rester vigilant sur la décision à prendre. Comment doit-on envisager la sanction ? Il existe deux formes de sanctions. Il y a d'abord les sanctions juridiques sur lesquelles le Code du travail est explicite.Cela va de l'avertissement au licenciement pour faute grave (sans préavis ni indemnité) ou lourde (ni préavis, ni indemnité, ni congés payés) en passant par le blâme, la mise à pied, la rétrogradation et lamutation.Dans certains cas, une simple observation verbale ne peut être considérée comme une sanction disciplinaire. Les vraies fautes restent celles qui sont commises consciemment, celles qui sont préméditées ou qui ont des répercussions sur le travail des autres. Il n'y a pas de discussion pour ce qui concerne le vol, la fraude ou l'ivresse… Mais les sanctions ne suffisent pas. Il y a aussi les sanctionsmanagériales : c'est-à -dire que le manager doit faire preuve de pédagogie pour pousser le collaborateur à mieux se comporter. Une sorte de sanctionmiroir? Absolument ! Exemple : si une personne met du temps harcèlementmosur un dossier ou un rapport, il faut luimontrer que son erreur déstabilise toute une équipe. Et donc, il faut identifier avec la personne les raisons de la transgression et, par conséquent, lui expliquer aussi les raisons de la sanction. L'important est de le faire en respectant la dignité des gens, ne pas stigmatiser tout le temps, laisser la possibilité de rebondir. Quand faut-il forcément recourir à une sanction écrite ? Il faut différencier avant tout l'erreur de la faute.Une erreur répétitive devient aussitôt une faute. Il faut aussi aller progressivement dans la sanction. Avertissement, blâme, mise à pied…Chaque type de sanction est prononcé selon la gravité de la faute. La loi est assez claire.Mais, à mon avis, il faut avant tout privilégier la communication. Il ne faut pas que cela émane uniquement de la hiérarchie, les collaborateurs ont leur mot à dire.On doit se corrigermutuellement. Une sanction écrite est nécessaire quand l'erreur est répétitive ou intentionnelle. Quand la faute touche les valeurs et l'organisation de l'entreprise, il ne faut pas hésiter à punir sévèrement.Culturellement, l'écrit a un poids. C'est dans ces cas qu'il faut montrer l'exemplarité.De ce fait, l'efficacité d'une sanction a un sens pour le collectif. Trop de sanctions peut-il être assimilé à un harcèlement moral ou à un excès de zèle des managers ? Cela dénote souvent un manque de confiance. C'est aussi une arme à double tranchant. Une sanction peut arranger les choses comme elle peut les détruire.Ne pas sanctionner de manière juste et exemplaire peut avoir un effet boule de neige.C'est pourquoi la manière de diriger est importante. Trop de sanctions prouve aussi que le manager n'a pas réussi dans son rôle de meneur d'hommes. Il faut aussi savoir pardonner. L'entreprise n'est pas un tribunal, c'est un lieu d'apprentissage et d'épanouissement oà1 l'on corrige même ce qui est tordu, oà1 on aide les faibles et même les tricheurs à redevenir normaux.Sauf pour les cas désespérés, dont on se sépare. La sanction peut-elle être considérée comme un outil efficace ? Oui, si les règles de travail sont bien définies et les procédures claires et reconnues par l'ensemble du personnel. Elle est également efficace si elle est juste et équitable. Dans ces cas, elle incite les collaborateurs à effectuer correctement leur travail. C'est pourquoi il faut prendre le temps d'écouter et d'expliquer les motifs avant de prononcer la sanction.Même si la décision émane en dernier lieu du dirigeant suprême, il est préférable qu'elle soit concertée. En fin de compte, la sanction doit être un outil et non un frein.