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Il faut savoir écouter son corps pour rester performant
Publié dans La Vie éco le 18 - 11 - 2005

Service public continu, contrainte technique et choix organisationnel de l'entreprise justifient des horaires de travail inhabituels.
Le changement de rythme peut avoir des conséquences négatives
sur la santé et le moral.
Qu'y a-t-il de commun entre une hôtesse de l'air et un médecin des urgences ? Rien, sinon que les deux sont très souvent appelés à travailler à des moments où les autres personnes, employées dans des entreprises dont l'organisation est fondée sur des horaires classiques, se reposent ou s'occupent de leurs affaires personnelles. Ce type de travail peut engendrer des problèmes sur le plan physique et familial. Pour Youness Mouhib, directeur de Positif conseil, qui explique au préalable le cadre de ces types d'activités, tout est question d'organisation personnelle.
La Vie éco : Peut-on parler de métiers atypiques ?
Youness Mouhib : Globalement, on peut répertorier trois catégories de métiers atypiques, dont le souci commun est d'assurer une activité permanente 24 h/24, voire 7 j/7.
La première catégorie a principalement pour rôle d'assurer un service à la population. On peut citer notamment les métiers liés aux secteurs de la santé (médecins, infirmiers, secouristes…) et la sécurité (police, gendarmerie, toute autorité qui a un devoir d'astreinte). Cela suppose une disponibilité permanente pour tous ces corps de métier. On peut également intégrer les pompiers, qui assurent un service public continu.
Les métiers opérant dans le secteur des transports ne sont pas en reste, que ce soit au niveau terrestre, aérien ou maritime. Il en va également ainsi de certains petits commerces, dont l'activité ne s'exerce que la nuit.
La deuxième catégorie concerne les métiers sujets à des contraintes technologiques, notamment les sites qui travaillent en «feu continu», et ce afin d'assurer une productivité permanente. Tous les acteurs de la chaîne de production sont concernés (managers, directeurs d'exploitation, chefs de production, ouvriers…).
Enfin, la troisième catégorie concerne, quant à elle, les organisations qui ont opté pour une présence continuelle. C'est un choix organisationnel délibéré, et ce pour une meilleure optimisation en termes de productivité et de temps. Ce sont des organisations qui évoluent et qui choisissent de travailler en équipes tournantes.
Globalement, ce sont ces principales raisons qui poussent les métiers à s'organiser de cette façon.
Cette atypie se limite-t-elle à l'aspect temporel, c'est-à-dire au fait de travailler durant des heures «anormales»?
Pas forcément ! Les spécificités que l'on observe dans la pratique de certains métiers dépendent en grande partie de la nature du métier lui-même. On peut citer les métiers artistiques, qui ont une forme d'atypie au niveau organisationnel tout à fait particulière. La fonction de diplomate présente, elle aussi, une certaine atypie dans la mesure où ce dernier se déplace en permanence là où le devoir l'appelle.
Selon vous, y a-t-il un engouement pour ces métiers ?
Pas vraiment. Généralement, on choisit ces métiers pour des raisons de contrainte : soit parce qu'on ne sait pas faire autre chose, ou parce que c'est la seule opportunité qui se présente. En revanche, certains métiers peuvent représenter un véritable tremplin pour d'autres postes importants. C'est par exemple le cas pour cet ingénieur qui a opté pour le travail de nuit dans une unité de production. Le fait de travailler de nuit a fait de lui le véritable «boss» dans l'entreprise alors que, hiérarchiquement parlant, son statut ne le lui permettait pas. En fait, on lui a délégué les rênes de l'entreprise parce qu'il avait le grade le plus élevé pendant la nuit. Quelque part, cela lui a permis d'exercer ses talents et de prétendre à d'autres évolutions possibles. Certaines personnes préfèrent ce type de travail parce que cela correspond davantage à leur style de vie.
Quel est l'impact de ce style de vie sur les individus ?
Les conséquences sur les personnes sont à deux niveaux : physique et social.
D'un point de vue physique, le fait d'alterner entre le jour et la nuit agit sur le rythme biologique, qui est mis à rude épreuve. Il n'est pas étonnant de constater des perturbations du point de vue santé. Ce problème peut être moindre pour les personnes qui ont une activité régulière. La personne qui travaille constamment la nuit peut, au fur et à mesure, créer son propre rythme. En revanche, la problématique est beaucoup plus dure pour ceux qui ont un planning variable, c'est-à-dire qui travaillent une semaine de nuit, une semaine de jour… De ce fait, ils sont constamment ballottés entre le jour et la nuit. A long terme, une telle façon de travailler est usante pour l'organisme.
Cela dit, il y a des exceptions. Car tout dépend du métabolisme des individus. Certains peuvent aligner des heures de travail sans pour autant ressentir une quelconque fatigue. Le besoin en sommeil n'est pas identique pour tout le monde. Par exemple, dans les pays anglo-saxons, les gens sont habitués à exercer plusieurs métiers à la fois. On quitte un boulot pour en retrouver un autre. Généralement, l'un pour gagner sa vie, l'autre pour le plaisir ou pour le bénévolat.
Et sur le plan social ?
Bien évidemment, l'impact sur ce volet est tout aussi négatif. A commencer par le fait de mener une vie décalée par rapport à sa famille : c'est le lot du mari qui rentre le matin pour se reposer alors que sa femme s'apprête à sortir pour travailler. Sans oublier le manque de disponibilité pour les enfants. Bref, l'incompatibilité entre la vie professionnelle et la vie familiale devient évidente. A la longue, cela finit par rendre vulnérable la cellule familiale.
Par la force des choses, certains cadres ou employés sont forcés à rester célibataires. A défaut de rencontrer l'âme sœur, ils «épousent» le travail.
Personnellement, êtes-vous un adepte du travail de nuit ?
Dans la vie courante, on distingue les vespéraux (du soir) et les matinaux. Initialement, j'étais un fervent vespéral. Plus maintenant. Aujourd'hui, je m'adapte en fonction de mon rythme biologique. Je peux carrément travailler à 4 heures du matin si le besoin se fait sentir. L'essentiel est de ne pas combattre la fatigue. D'ailleurs, des études scientifiques ont montré que tous les individus n'ont pas forcément les mêmes rythmes biologiques (les moments de force et de faiblesse). Il faut juste savoir détecter ses moments de force pour adapter son organisation à ces rythmes.
youness mouhib Directeur de Positif Conseil
Dans les pays anglo-saxons, les gens sont habitués à exercer plusieurs métiers à la fois. En général, l'un pour gagner sa vie, l'autre pour le plaisir ou pour le bénévolat.


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