Dans un mémorandum présenté au ministre de l'urbanisme, de l'habitat et de la politique de la ville, les promoteurs ont suggéré plusieurs mesures à court et moyen termes, en plus d'un dispositif d'accompagnement à caractère administratif et légal. Social, économique, moyen standing et rural, leurs requêtes concernent tous les segments du marché. Le secteur immobilier traverse une mauvaise passe depuis quelques années. Un délai de vacance plus allongé, un stock de produits finis toujours difficile à écouler, des mises en chantier moins significatives qu'avant. Depuis 2011, celles-ci sont en chute de 65% par rapport à 2016, à 166 200 unités. Le nombre d'unités produites a également fondu de 51% pour atteindre 135 600 en 2016. Toutefois, un léger infléchissement a été constaté en 2017, si l'on tient compte de ces deux indicateurs. Par rapport à 2016, le premier a progressé de 19%, à plus de 270 000 logements et le second de 2%, à un peu plus de 294 000 unités. Ce frémissement ne concerne pas tous les segments du marché ; il est circonscrit aux logements économiques et sociaux, notamment. L'immobilier est dans une situation ambivalente. D'un côté, la demande est atone et, de l'autre, l'offre actuelle et future n'est pas suffisante pour combler le déficit. Chaque année, 180 000 ménages additionnels expriment un besoin de logement, sachant qu'à fin 2015, plus de 1,5 million de ménages étaient à la recherche d'un logement, dont le tiers désirait acquérir un appartement. C'est dire l'importance de la réflexion sur les moyens de requinquer l'activité. C'est dans cet esprit que la Fédération nationale de la promotion immobilière (FNPI) a préparé des propositions, rassemblées dans un mémorandum, qu'elle a présentées au ministre de l'urbanisme, de l'habitat, et de la politique de la ville. Ce document que La Vie éco a pu consulter en exclusivité comprend des mesures d'urgence à court terme, et d'autres à moyen terme, en plus de mesures d'accompagnement à caractère administratif et légal. Sur le court terme, la FNPI s'est penchée notamment sur certaines dispositions liées à la régulation de l'activité de la promotion immobilière et à la relance des logements social et moyen conventionnés. Création du statut promoteur pour faire distinguer le professionnel de l'occasionnel La fédération propose de réglementer la promotion immobilière par la création d'un statut de promoteur et ce, dans l'objectif de délimiter les sphères de responsabilité, de répondre aux normes de qualité requises et de privilégier la transparence. Pour se distinguer d'un promoteur occasionnel, un professionnel doit répondre à des critères fondamentaux dont l'adhésion à une institution professionnelle, l'exercice au sein d'une société de promotion professionnelle et la disposition de ressources suffisantes pour financer son investissement immobilier. Ce statut peut être accordé en tenant compte de trois catégories de promoteurs proposés : les grands promoteurs (catégorie A) qui représentent les promoteurs structurés et qui participent activement à la production de l'habitat au Maroc, les promoteurs moyens (catégorie B) dont les ressources financières ne permettent pas la prise en charge d'opérations immobilières de grande envergure et les petites promoteurs (catégorieC). Il s'agit de professionnels (entrepreneurs, agents, marchands, conducteurs de travaux...) qui, à côté de leur activité principale, se livrent occasionnellement à une opération de promotion immobilière. Augmenter la densité ou la verticalité du produit pour les logements pour la classe moyenne La production de logements dédiés à la classe moyenne, objet d'une convention signée par le ministère et la FNPI, s'est avérée être un échec. Alors que le protocole d'accord visait la création de 20 000 logements à l'horizon 2016, à peine 310 unités ont été achevées et sont dans l'attente de certificat de conformité. Quelque 3 994 sont mises en chantier et 224 unités sont en stock. Entre autres raisons de cette déconvenue, le non-respect des engagements du ministère, aussi bien en termes d'optimisation des normes d'urbanisme que d'identification et de mobilisation du foncier adapté. D'autant que le comité de suivi et d'évaluation, instauré dans l'article 5 de la convention, n'a jamais tenu l'ombre d'une réunion. Compte tenu du manque d'adhésion des promoteurs à cette convention, il est vivement recommandé de revoir le modèle économique du produit. En ce sens, la profession propose la création de zones d'aménagement concerté, avec une révision des plans d'aménagement à la hausse de 35% en densité ou en verticalité. Pour la réussite de ce type de logement, il serait nécessaire de conclure une convention entre l'Etat et le promoteur immobilier qui porterait sur la réalisation de 250 logements au minimum sur une durée de 5 ans et de n'imposer aucun seuil minimal en termes de superficie, de sorte à offrir la possibilité d'inclure des studios. Reconvertir le stock d'invendus dans le logement à faible VIT en unités conventionnées pour le logement social Le segment social connaît un essoufflement ces dernières années. Non seulement en raison des produits qui ne sont plus adaptés aux besoins des acquéreurs potentiels, mais aussi à cause des réticences des banques à financer une catégorie de population jugée risquée. Pour relancer ce secteur, la FNPI avance la nécessité de développer le micro crédit logement pour financer surtout les constructions en milieu rural. De même, elle propose d'étendre les dispositifs régissant le logement à faible VIT (140 000 DH) au logement social, et ce, en abaissant le seuil d'unités conventionnées à 100, et de reconvertir le stock d'invendus dans le logement à faible VIT en unités conventionnées pour le logement social. La FNPI s'est aussi penchée sur le côté fiscal et propose une série d'exonérations, dont tous les impôts et taxes, des droits fonciers et des taxes de conservation foncière et du cadastre pour les opérations de l'habitat insalubre et la TVA pour les crédits bancaires, Fogarim notamment, destinés aux bénéficiaires des logements sociaux ou à faible VIT. A côté, les grandes opérations d'aménagement foncier de plus de 100 hectares devraient être exonérées de la TTNB pendant une période de 20 ans, ainsi que de la taxe sur les opérations de lotissement et de construction (voir encadré). A en croire la FNPI, cette mesure permettrait d'encourager le développement des villes nouvelles. Pour ces dernières, il est également recommandé de créer un fonds spécial pour la réalisation des équipements socio-administratifs. A moyen terme, la fédération s'est attaquée à certains sujets sensibles à l'instar du logement rural, du marché locatif et de leasing immobilier ainsi que les plans d'aménagement. Une approche par zoning à privilégier pour le logement rural Le développement des logements dans le milieu rural devra passer tout d'abord par l'élaboration d'une évaluation de la situation actuelle, avant l'instauration de programmes adaptés à chaque région, visant la restructuration des douars. Comme chaque zone a ses spécificités (contraintes géographiques, population…), une approche globale pays est à éviter. Ce faisant, c'est l'approche régionale qui l'emporte. En tout cas, le redressement du secteur dans le milieu rural devrait consister, entre autres, à concevoir des plans de villages structurés avec tous les équipements nécessaires. Les logements que la FNPI envisage sont des lots de terrain de 200 à 400 m2 sur lesquels seraient construites des maisons sommaires brutes de 60 m2 sans finition. Ce n'est nullement par manque d'intérêt à ce type de population, mais pour permettre aux habitants de garder de l'espace pour développer l'activité de l'élevage et étendre éventuellement les constructions. Un fonds de garantie dédié pour dynamiser le locatif Pour pallier les problèmes liés à l'application de la loi sur le locatif et principalement ceux liés à la non-exécution des décisions d'évacuation prononcées par les tribunaux, la FNPI a pensé à la création d'un fonds de garantie dédié au locatif. Il serait alimenté par le Fonds social de l'habitat ou toute autre ligne de financement et servirait à indemniser les investisseurs en cas de non-paiement des loyers et de difficultés liées aux jugements des tribunaux. Par ailleurs, la FNPI souhaite relancer l'investissement dans l'immobilier destiné au locatif. Pour cela, elle propose de revenir aux avantages fiscaux prévus avant 2014 et qui consistaient en une exonération des revenus locatifs sur une période de 3 ans. Pour rajouter sa touche et si adoption il y a, la profession estime nécessaire un rallongement de cette mesure à 5 ans. De plus, la FNPI suggère de mettre en place un taux préférentiel pour les acquisitions destinées au locatif. Resserrer les délais d'octroi des autorisations de construire Les mesures prônées par la FNPI concernent notamment les autorisations de construire et les permis d'habiter. Compte tenu des contraintes d'ordre administratif et purement procédural et qui ont pour effet d'impliquer un retard dans la mise en place des projets immobiliers, la fédération appelle à l'instauration de règles de bonne gouvernance. Cela aura pour conséquence d'améliorer le climat des affaires, mais aussi le classement mondial Doing Business en termes d'autorisations de construire qui place le Maroc à la 75e position. Il est proposé également de resserrer les délais pur l'octroi des permis d'habiter et d'habiliter l'architecte à cosigner avec le président de la commune l'autorisation de construire pour les projets allant jusqu'à R+3. Toutes ces mesures proposées par la fédération des promoteurs immobiliers seraient sans effet si l'Etat ne joue pas son rôle dans la mobilisation du foncier public, sachant que la demande annuelle sur le foncier urbain est estimée à plus de 4 000 hectares, si les banques ne contribuent pas à assouplir les conditions d'octroi des crédits en actionnant le levier taux d'intérêt et si l'agence de conservation foncière et le cadastre ne revoient pas leur politique de taxation du terrain foncier et du projet construit. Les promoteurs doivent aussi être conscients de leur devoir de construire des logements répondant aux attentes des acquéreurs, tant du point de vue qualitatif que de celui des prix. C'est seulement si ces conditions sont réunies que l'activité pourra réellement reprendre. [tabs][tab title ="Le boulet de la taxe sur les terrains non bâtis"]La Taxe sur les terrains non bâtis (TTNB) continue d'irriter les promoteurs. Ceux qui constituent une réserve foncière au cours de leur activité se trouvent ainsi pénalisés par le paiement de cette taxe qui peut se chiffrer en millions de DH. Pour les promoteurs investisseurs, la FNPI propose une exonération de cette taxe ou encore le réaménagement de la durée liée à son application en fonction de la superficie des terrains. La profession souhaite aussi une exonération de 15 ans pour les terrains dont la superficie est supérieure ou égale à 50 hectares, de 8 ans pour le foncier d'une superficie qui n'atteint pas 50 ha et de 5 ans au lieu de 3 ans pour les parcelles de moins de 5000 m2. Pour les villes nouvelles, il est recommandé une exonération pour une durée de 20 ans. L'exonération devrait toucher aussi les terrains situés dans les zones dépourvues de l'un des réseaux de distribution d'eau et d'électricité, ceux situés en périphérie ayant intégré le plan d'aménagement et qui demeurent non autorisables, ainsi que les lots de recasement non encore affectés.[/tab][/tabs]