La Coalition pour une monarchie parlementaire maintenant s'attaque aux questions sérieuses. La conférence-débat « La gauche et les mouvements islamistes : Débat sur les libertés et la démocratie », organisée à Rabat le 16 août 2011, a tenu ses promesses. Une question d'actualité, qui a pu réunir des intervenants de différentes tendances politiques et idéologiques. Un dialogue franc et sans tabous. Compte rendu. La chaleur du mois d'août n'a pas empêché quelques centaines de personnes, pour la plupart des jeunes, de venir chercher des réponses à la question fatidique : y-a-t-il un avenir démocratique avec les islamistes ? Mohamed Sassi, membre du bureau politique du PSU (Parti socialiste unifié) est catégorique : « nous ne pouvons travailler avec les islamistes tant qu'ils n'adhèrent pas à la définition universelle de la démocratie ». L'islam comme une plateforme ? D'autant plus que le PSU interdit à ses membres toute collaboration avec les islamistes. Pour Mohamed Sassi, son parti serait prêt à travailler avec les mouvances islamistes, dès qu'elles renonceront à « la conception théocratique du pouvoir ». Toutefois, le cadre du PSU nuance ses propos en abordant le Parti Al Oumma et Al Badil Al Hadari, qui sont aussi membres de la Coalition pour une monarchie parlementaire maintenant. Mohamed Manar, membre du Cercle politique d'Al Adl Wa Al Ihsane (Justice et bienfaisance), insiste sur le fait que « les craintes liées à l'exercice démocratique sont aussi présentes chez les islamistes ». Ces craintes, selon lui, seraient mesurées dans la pratique. « Toute démocratie a un référentiel culturel, tranche-t-il avant d'argumenter : la mise en application de la démocratie dans sa notion occidentale va conduire au renoncement à notre culture musulmane (…) nous proposons donc l'islam comme plateforme cultuelle ». Le membre de la Jamaâ du cheikh Yassine nuance : « notre démocratie ne doit pas nous faire sortir de notre islam, et notre islam ne doit nous faire sortir de la démocratie ». Les islamistes et la gauche marocaine doivent se réunir pour créer un rapport de force qui pourra aboutir aux revendications populaires, assure l'intervenant. Pour lui, le Mouvement du 20 février a démontré que les deux parties peuvent travailler ensemble sur le terrain, une aubaine sur laquelle, il faut capitaliser. La religion, un moteur… En prenant la parole, Mostafa Lmouatassime, Secrétaire général du parti (dissous) Al Badil Al Hadari, rappelle que Driss Basri a entretenu l'épouvantail islamiste, dès le début des années 90, tout juste avec la préparation du gouvernement d'alternance. « Nous avions alors appelé à de nouvelles alliances pour la démocratie ». Lmouatassime donne comme exemple « la théologie de la libération » en Amérique Latine, où la religion a joué un rôle central dans la démocratisation. « Un exemple qui prouve que la religion peut être un moteur et non un obstacle », pense l'ex-détenu de l'affaire Belliraj. Mustapha El Khalfi, membre du Secrétariat général du PJD, est moins clair. « On doit dépasser le dialogue conditionné et éviter de perdre du temps sur les définitions des uns et des autres ». Pour le directeur du journal Attajdid, « la laïcité n'est pas une alternative à la religion dans l'espace public, mais une réponse parmi d'autres ». Sur la bonne voie ! Khadija Riadi présidente de l'AMDH (Association marocaine des droits de l'Homme) a, quant à elle, donné les conditions nécessaires et inaliénables pour une véritable démocratie : « Le respect et la reconnaissance des droite de l'Homme, en se basant sur la Déclaration universelle, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ». La laïcité pour la présidente de l'AMDH, est une condition de la démocratie, malgré son insuffisance. Pour Youssef Belal, membre du Bureau politique du PPS, « le rapprochement avec les islamistes est une réalité depuis le 20 février ». Il considère qu'il était temps de dépasser « une tendance existante dans la gauche, qui préfère le makhzen aux islamistes ». Belal plaide pour une lecture politique et non idéologique du rapprochement entre les deux camps. La priorité est d'accéder à la démocratie et dm combattre l'absolutisme. Le militant amazigh Ahmed Assid juge que le Maroc est victime de plusieurs années de despotisme. L'absolutisme s'est ancré dans les mentalités. Pour lui, « la démocratie n'est pas la dictature de la majorité ». Avant de penser aux questions techniques (suffrage universel), il faut se mettre d'accord sur « les valeurs et les principes qui garantiront le respect de l'autre ». La démocratie est « un patrimoine universel et non pas occidental, puisque l'islam a lui-même contribué à la l'édification de l'exercice démocratique », remarque le militant amazigh avant de conclure : « si les islamistes reconnaissent la diversité des référentiels, on est déjà sur la bonne voie ». Vidéo: intervention de Ahmed Assid.