Taieb Fassi Fihri, ministre des Affaires étrangères, vient de faire une tournée aux USA où il a annoncé la couleur des réformes constitutionnelles prévues. Le ministre a été l'invité du think tank américain Brookings Institution, le 23 mars 2011, où il a expliqué que les départements de la Défense et les Affaires étrangères resteront entre les mains du roi. Compte rendu. Lors de sa présentation, Martin Indyk, vice-président et directeur des Affaires étrangères de l'Institution, et qu'on murmure très proche du régime marocain, a fait un bref rappel du parcours de Taieb Fassi Fihri, qu'il a qualifié d'« ami personnel et ami des USA ». En prenant la parole, Taieb Fassi Fihri avait raison de s'excuser pour son anglais. Il a essayé d'expliquer, comme il pouvait, que le Maroc est sur la voie des réformes depuis plus de 10 ans. Selon lui, chaque pays a ses propres spécificités. Au Maroc, le combat continue pour la lutte contre la pauvreté, la corruption et l'indépendance de la justice. « Le roi a proposé une régionalisation avancée bien avant l'explosion des révolutions. Car nous, au Maroc, sommes convaincus que la démocratie commence au niveau local », insiste Taieb Fassi Fihri. La justice au Maroc, selon lui, est une administration mais après un an, elle sera un pouvoir complètement indépendant. «Après la réforme constitutionnelle, la justice sera rendue au nom du roi mais elle sera totalement indépendante des pouvoirs exécutif et législatif, contrairement à ce qui se passe aujourd'hui ». Alors que la question de Martin Indyk , portait aussi sur l'indépendance de la justice vis-à-vis du roi, le ministre s'est contenté d'évoquer « une justice indépendante du Parlement et du gouvernement ». Il a aussi expliqué que les protestations pacifiques continuent au Maroc « pour demander une accélération des réformes ». Taieb Fassi Fihri a tenté de jouer la carte du terrorisme, en prévenant que le printemps arabe « ne sera pas forcément suivi d'un été arabe. L'exemple de la révolution iranienne est toujours probable ». Il a insisté sur le fait qu'Al Qaida profite des révolutions arabes pour mieux s'organiser à l'instar de ce qui se passe en Egypte. Mais, selon lui, le Maghreb est plus exposé, puisque le Grand Sahara est un terrain fertile pour la naissance des groupes terroristes. « Nous devons tous travailler, les USA, les pays européens, et les pays musulmans pour accompagner les processus de transitions démocratiques dans la région et ainsi barrer la route au terrorisme ». Répondant à une question sur la nature des prérogatives du roi dans la prochaine réforme constitutionnelle, Taieb Fassi Fihri, a d'abord rappelé que la monarchie marocaine est une des plus vieilles au monde. Elle est aussi, selon lui, le seul moyen d'unifier toutes les composantes ethnique, religieuse et linguistique du Maroc et « tous les Marocains préfèrent vivre sous ce parapluie ». Le ministre a peut-être été victime de sa non-maîtrise de la langue de Shakespeare, car il a affirmé en parlant de la dimension africaine du Maroc, que le pays est aussi subsaharien (sic), sans pour autant évoquer sa dimension amazighe. Si le Mouvement du 20 février a insisté sur l'article 19 de la Constitution et le pouvoir absolu qu'il accorde au roi, le ministre des Affaires étrangères a développé toute une théorie sur l'institution de la Commanderie des croyants pour le justifier: « Au Maroc le religieux est totalement séparé du politique, sauf au sommet de l'Etat, ce qui garantit l'unité de la Nation ». Après la réforme, le pouvoir de l'exécutif va s'élargir car le roi va « déléguer » plusieurs prérogatives au gouvernement, a-t-il affirmé dans un anglais approximatif. Répondant à la question "Le roi va-t-il garder les départements des Affaires étrangères et la Défense ?", le ministre marocain a répondu que «la Défense et les Affaires étrangères vont rester sous la main du roi, puisqu'ils garantissent l'unité du pays. Le sommet de l'Etat continuera à gérer ces deux départements avec des personnes membres du gouvernement ». Regarder la vidéo de la rencontre du ministre des Affaires étrangères avec le Think tank américain Brookings Institution.